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Dry Bujumbura : sale temps pour les buveurs

Bujumbura est sous régime sec. La pénurie des boissons Brarudi, on connaissait déjà, mais la situation s’est profondément dégradée depuis quelques jours, au grand désespoir des buveurs. Des stratagèmes pour débusquer la moindre goutte de bière ? Dans l’adversité, l’imagination des Burundais ne tarit jamais. Utiliser les réseaux sociaux pour traquer la dive bouteille, voilà la nouvelle astuce qui fait fureur à Buja-la-belle.

« La perte d’un époux ne va point sans soupirs (…) sur les ailes du temps la douleur s’envole », disait Jean de la Fontaine. Il y va un peu fort, vous dites-vous sans doute. Comparer la bière à un époux décédé ?! Je persiste et signe, la détresse que vivent les buveurs est à la hauteur de la profondeur de cette citation de Jean de la Fontaine. Les bars de Bujumbura sont désespérément secs. Ceux qui ont encore de la chance servent des Bocks ou des Royales. Mais c’est connu, les Burundais sont friands de la Primus, iki mamie, notre bière nationale. Hélas, il est difficile de trouver le fameux breuvage dans les buvettes de Bujumbura ou de l’intérieur du pays. Ne parlons même pas d’Amstel ou de ‘’Beshu’’, « ni amosozi y’ingwe » (des larmes de panthère, Ndlr).

Un drame national ? Nous ne voulons pas ajouter de l’huile sur le feu, mais c’est presque ça, le Burundais est un grand buveur devant l’éternel. L’auteur de ces lignes lui-même ne crache pas sur une ‘’Beshu’’ bien tapée.  

Bon, bref,  la semaine dernière, j’étais en mission à Gitega. Je descends dans un hôtel après le boulot. Triste nouvelle : que des Royales. De ma vie de buveur, je n’ai jamais réussi à avaler un verre entier de Royale que je trouve infecte (le DG de la Brarudi et les amateurs de cette boisson me pardonneront). Je décide quand même d’essayer. J’avale deux gorgées avec toutes les difficultés du monde. Un serveur, qui m’observait à la dérobée,  me prend en pitié et vient me murmurer à l’oreille : je connais un endroit en ville où il y a des Amstels, mais c’est cher et il faut me payer une moto. L’affaire est vite conclue et je débourse en tout 20 mille Fbu pour avoir 3 Amstels ! C’est à ce moment-là que je réalise que la situation est grave. 

La solution miracle

Quand je regagne Bujumbura, je me rends compte que la situation n’est guère reluisante. Ces soiffards de citadins passent leur temps à se refiler les adresses où débusquer les produits Brarudi. Des messages aussi anxieux les uns que les autres circulent dans des groupes WhatsApp. Un d’eux disait que la Brarudi ne produit plus de bières à cause du manque de Malt, un des ingrédients servant à la fabrication de la bière. Zut ! On va mourir, m’a dit un ami lui aussi porté sur la bière. 

Le lendemain matin, je dors tranquillement. Une amie à qui je demandais si elle ne saurait où on peut trouver une ‘’Beshu’’, m’envoie un lien d’un groupe WhatsApp, avec un message laconique du genre : Injira muri iyi groupe kugira uze uramenya ahari inzoga. J’éclate de rire ! Je connaissais des groupes pour traquer le carburant, mais jusque-là, je n’en connaissais pas qui traquaient la bière. Le signe des temps ! Rien que le nom du groupe montre, pour moi, la détresse par rapport à cette situation : MUTURANGIRE AHARI AKAYOGA. Veuillez aussi noter l’utilisation des majuscules. Donc j’entre dans le groupe. Je tombe des nues quand je constate que le groupe compte déjà 1025 personnes alors qu’il n’a été créé que la veille, c’est-à-dire le 24 avril 2024. Une heure plus tard, j’apprends qu’on doit en créer un autre parce que le nôtre est déjà saturé. 

Entre temps, un message tombe dans le groupe : à Kinindo près du campus ‘’Lumière’’, il y aurait des ‘’Beshu’’. Je décide immédiatement de déposer la plume et d’arrêter donc ici l’écriture de ce billet pour aller vérifier si l’information est exacte. En bon Kirundi, on dit : « Ngiye kwisama ». Tenez bon les soiffards !

 

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Les commentaires récents (1)

  1. Comment se peut-il que plus de 60 ans après l’indépendance on ait qu’une seule brasserie dans tout un pays? Il semble qu’à la fin du 19e siècle, en Belgique, une ville comme Bruges de la taille de la ville de Rumonge actuelle, avait 300 brasseries. Le monopole de la Brarudi doit cesser!