La ZES de Warubondo, ce vaste projet lancé en grande pompe par le gouvernement du Burundi a du plomb dans l’aile. Seules quelques hectares ont été aménagés alors que toute la zone couvre une superficie de près de 600 hectares. Les infrastructures tardent à sortir de terre. Comment la machine s’est-elle enrayée ? Un blogueur y a fait un tour. Reportage
11h. Nous sommes en zone Gatumba de la commune Mutimbuzi. Ici, les dégâts des récentes inondations sont encore visibles. Sur les murs des maisons et les poteaux électriques, on peut facilement deviner le niveau qu’a atteint la montée des eaux. Dans certains endroits, les protections de fortune contre les inondations sont toujours en place. Les barrières faites de sacs de sable se trouvent encore devant certaines maisons d’habitation.
Un air d’abandon plane sur Warubondo. La route qui y mène est en terre battue. Les nids de poule remplis d’eau s’observent à plusieurs endroits. Les herbes ont envahi les pistes tracées lors de la viabilisation. La clôture en fer est en partie détruite. La ZES de Warubondo c’est plus de 580 ha. Ce méga projet est une initiative de Gitega datant de 2015. L’idée derrière ? Accroître les exportations pour augmenter le volume des devises entrant au pays. Pour cela, il faut diversifier les produits manufacturés d’exportation. Mais ce n’est pas seulement cela. L’Etat compte améliorer le bien-être de la population tout en augmentant les rentrées fiscales et en promouvant en même temps l’industrie.
Au mois de septembre 2018, Gitega a donc concédé ce terrain de 580 ha à l’entreprise Procerv pour construire des infrastructures nécessaires pour une durée de 50 ans renouvelable. Cette société avait accepté de faire les études de faisabilité, de viabiliser ce terrain et de chercher des investisseurs.
La route en piteux état
Warubondo n’est pas loin, pourtant il est difficile d’accès. La petite route est étroite et dépourvue d’accotement et de caniveaux. Si tout était en place et pleinement opérationnelle, il serait quand même difficile de desservir la ZES Warubondo. Charlotte, une femme qu’on a prise en auto-stop déplore déjà l’état de la route : « L’entreprise exécutante n’a pas vraiment réussi à construire cette route. Dès le début, elle s’est continuellement dégradée. Peut-être que ce marché international qu’on voulait y installer n’a pas ouvert à cause de cette route », soupçonne-t-elle.
Charlotte se donne le devoir de nous en dire plus. « Voilà où commence la délimitation du site. Il s’étend sur plusieurs hectares ». Par certains endroits, les constructions qui n’ont jamais servi tombent en délabrement. A l’intérieur de la zone, sur la partie qui donne sur la RDC, tout est calme. Pas de moteurs d’engins de terrassement ni de machines compacteur ou niveleuses. « Il n’y a plus de chantier», lâche Charlotte notre guide improvisée.
Une petite visite nous permet de découvrir une machine en panne couverte de rouille. Sur une affiche, on lit trois projets prévus qui devaient être exécutés dans cette zone : le projet de construction de clôture et de viabilisation du site, celui de la construction d’un barrage hydroélectrique et solaire, et un autre de construction des hangars industriels sans oublier celui concernant le captage d’eau de forage. En dessous, le nom du bailleur : Procerv, une société d’origine arabe
Non loin, un bâtiment de toiture rouge est visible. On voudrait avoir l’autorisation de visiter les lieux. Mais personne ne garde la barrière à l’entrée. Selon une source sur place, cet édifice comporte cinq galeries de 18 boutiques chacune, un hangar commercial, un bloc administratif, un abattoir et des sanitaires.
L’Exécutif reconnaît l’échec du projet
Cela saute aux yeux, le projet est à l’abandon. Par ailleurs, le chef de l’Exécutif a reconnu l’échec du projet au début de l’année. Le problème ? D’un côté, le Burundi n’a pas honoré ses engagements. D’autre part, l’absence d’un plan de construction générale, les aléas climatiques, le problème de communication suite à l’indisponibilité de l’une des parties prenantes de ce projet. Voilà entre autres les causes du blocage.
Quelques zones d’ombre entourent ce projet. Certes, l’Etat n’a pas pu honorer ses engagements, mais cela ne suffit pas pour expliquer pourquoi ce projet ne décolle pas. Quelle était la mise de l’Etat au départ ? Que dit la convention entre le Burundi et la société Procerv ? Quel est le coût total du projet ? Pour avoir les réponses à ces questions, nous avons contacté l’organe chargé de la gestion de la ZES. Ce dernier a promis de s’exprimer ultérieurement.
Une affaire à suivre…
Pas fouillé