Quelle ineptie ! Croire bêtement, au 21ème siècle, que coucher avec un malade mental procure la richesse financière ! Cette idée reçue est pourtant à l’origine des tribulations de la pauvre Catherine Muhorakeye violée par son oncle, incomprise à l’hôpital et inaudible en justice. Témoignage.
Catherine a 16 ans. Cette jeune fille de la colline Nyangungu de la commune Mutaho n’a jamais prononcé un seul mot depuis sa naissance. En plus, elle n’entend rien de ce qui se dit autour d’elle. Elle est sourde-muette de naissance. Etant la seule infirme de la fratrie de cinq enfants, elle est ignorée, délaissée et incomprise. « Un jour, nous avons commencé à la voir marcher nu, à se couvrir d’herbes et à dormir dans la forêt ». Voilà comment la tante raconte le moment où Catherine dérégla dans la chimie du cerveau et de la pensée. Elle finira à la rue en tant que schizophrène.
Récupérée par sa tante, Catherine atterrit au centre neuropsychiatrique de Gitega. Hébergée par la famille de sa tante, Catherine ne terminera pas son traitement. La folie des hommes la rattrapa et sa vie bouscula.
Victime de la bêtise humaine
Le hic, la situation financière de la famille n’était pas au top. Des mésententes entre son oncle et sa tante à cause de Catherine éclosent. Son traitement coûte cher. Un jour, le mari de sa tante laisse sous-entendre que Catherine pourrait être la solution. Selon un préjugé connu de tous, coucher avec un attardé mental est source de richesse. La tante qui le prend comme une blague ne sait pas que son mari est sérieux.
Le matin du 05 janvier 2018, l’irréparable est commis. Son mari, profitant de l’absence de sa femme, se faufile dans la chambre de Catherine et se rue sur elle. Incapable de se défendre, criant sans parvenir à sortir un son à cause de son handicap, elle est cruellement violée. Quand sa tante rentre, elle trouve sa nièce en train de pleurer, blottie dans un coin de la maison. Comme sa tante et elle pouvaient communiquer avec le langage des signes, elle lui explique tout ce qui s’est passé.
Incomprise jusqu’à la fin
La tante n’en revenait pas. Elle porte plainte devant l’officier de police judiciaire (OPJ). Ne pouvant pas parler avec la fille, car ne connaissant pas le langage des signes, l’OPJ ne compte que sur la seule parole de sa tante contre celle de son mari qui nie catégoriquement.
Pour trancher, l’OPJ demande une expertise médicale. Même son de cloche pour le médecin. Il ne connaît pas non plus le langage des signes et ne peut donc pas communiquer avec Catherine pour mieux l’examiner. Incomprise et sans preuve médical, son agresseur est relâché. Pour ne plus croiser son agresseur, Catherine s’est évadée de la maison. Jusqu’aujourd’hui, sa tante ne l’a jamais retrouvée. Elle-même finira par divorcer de son mari. Désormais rongée par les remords et la colère, elle plaide pour que le langage des signes soit appris aux OPJ et aux médecins pour pouvoir mieux prendre en charge ses enfants sourds-muets.