Malgré quelques progrès, l’émancipation de la femme au Burundi a encore du chemin à faire. À côté des associations qui militent pour la cause, la nouvelle génération a besoin d’une éducation axée sur la compréhension de celle-ci dès son bas âge, ce qui n’est chose facile pour les parents. Un père se confie.
L’égalité des genres. Voilà un sujet auquel je ne croyais pas m’intéresser un jour. Maintenant que je suis père et que je vois ma fille grandir, je me sens plus concerné qu’avant. N’étant pas encore au stade de féministe engagé, j’ai au moins déjà dépassé la croyance selon laquelle l’homme est supérieur à la femme. Alors plutôt que de me lancer dans des associations, je me suis donné pour défi d’éduquer ma fille pour devenir une femme émancipée.
Burundais que je suis, mes racines ont parfois tendance à prendre le dessus. Mais ne pouvant pas fermer les yeux sur toutes les injustices faites aux femmes, et voyant ma fille, du haut de ses quatre ans, grandir à toute vitesse, je me sens appelé à la préparer à temps à ce monde patriarcal qui refuse encore d’accepter la femme comme l’égal de l’homme.Toutefois, moi-même je me perds des fois dans les concepts.
La femme, l’égal de l’homme… en quoi ?
Cette question peut causer polémique, si on ne se situe pas dans un contexte bien déterminé. Pour moi, la femme est et n’est pas l’égal de l’homme. Elle l’est dans la mesure où il n’y a plus de métiers que seul l’homme peut faire et la femme non. Elle ne l’est pas parce que comparer une femme à un homme équivaudrait à dire qu’être femme n’est pas suffisant pour donner le meilleur de soi-même. L’homme est homme, la femme est femme, il n’y a pas à comparer leurs physiologies, mais plutôt leur rendement dans une activité quelconque.
Je dis tout cela mais il n’est pas évident de l’expliquer à sa fille. J’ai finalement décidé que mon approche éducative pour son émancipation serait de lui apprendre ses droits et devoirs en tant qu’actrice du bien-être de sa famille et du développement de son pays, sans attendre qu’on lui donne sa chance.
Puisque la plupart de Burundais ont compris la nécessité d’envoyer filles et garçons à l’école (même si des traînards ne manquent pas), il reste à inculquer à nos jeunes filles cet esprit de voir grand et d’avoir confiance en elles dans tout ce qu’elles entreprennent. De plus, aujourd’hui elles ont de plus en plus de femmes leaders et femmes d’influences sur qui prendre exemple.
Éduquer de futures femmes autonomes
Vous m’excuserez de ne pas mentionner la question des droits de succession, puisqu’il n’y a plus de terres cultivables même pour ces héritiers « de facto ». Ma fille devra savoir que le plus grand héritage est le savoir et le savoir-faire. Qu’ils les gardent ces héritages que l’on acquiert avec des regards en chien de faïence des cousins et parentés éloignés en bonus, elle les gagnera à la sueur de son front, et elle en est capable. Sa richesse ne devra nécessairement pas venir de ces héritages tant convoités, mais de son travail.
À vous tous pères ayant le souci de voir vos filles grandir émancipées et réussir leurs vies, donnez-vous cette image : elle, présidente de la république, ministre, femme d’affaire, et tout cela en étant épouse et mère. Cela est possible, à condition que nous éduquions nos filles à ne reculer devant aucun obstacle dans la vie, à être ambitieuse et passionnée, à ne pas se laisser abattre par l’adversité due à une tradition déjà dépassée en plusieurs points. C’est là, à mon avis, la plus grande contribution que l’homme moderne puisse donner aujourd’hui et pour la future génération.
« …ses droits et devoirs en tant qu’actrice du bien-être de sa famille et du développement de son pays »
Cher auteur, vous pensez agir au nom de l’émancipation de la femme en dressant ce point de vue, mais au contraire, vous contribuez inconsciemment à la maintenance du patriarcat. Pourquoi ses droits et devoirs envers sa famille? Peut-être vouliez-vous dire autre chose. Mais à première vue c’est comme si vous apprendrez à votre fille comment être une bonne femme mu rugo, une bonne mère, une soeur, en bref un objet qui la privera de se connaître et poursuivre son propre chemin
Cher Claudine, comme vous l’avez bien insinué, l’auteur voulait dire autre chose. En évoquant les « droits et devoirs en tant qu’actrice du bien-être de sa famille, l’auteur a voulu évoquer le devoir d’une bonne mère qui octroiera à ses enfants l’éducation qu’elle a obtenue étant enfant, d’être en quelque sorte indépendante dans tous ce qu’elle entreprend, dans son travail auquel elle cherchera à vouloir prendre part au développement de son pays, chose d’antan était sous-entendu réservé aux hommes seulement.