article comment count is: 2

Interdire aux femmes de battre le tambour ne devrait pas diviser

Autrefois source et vecteur d’unité nationale, le tambour divise dans la société burundaise depuis quelques jours. Et pour cause, le fameux décret avec l’article interdisant aux femmes de s’approcher de ce patrimoine culturel. Des émissions y ont été consacrées, des articles ont été rédigés dans la presse locale, parfois même internationale. Le débat s’est aussi invité sur les réseaux sociaux où il a été encore plus virulent. Pour notre contributeur Yves Patrick Iradukunda, à voir le débat qu’a suscité ce décret et « les contestations-manipulations-désinformations » qui s’en sont suivi, personne n’a mis en contexte le décret. Explications.

Beaucoup de personnes ont critiqué le fait d’interdire aux femmes de battre le tambour, accusant au gouvernement de faire une croix de saint André sur l’égalité des genres. Pour elles, cette mesure bafoue les droits de l’Homme : « on ne devrait pas interdire quelqu’un de faire ce qu’il veut », argumente-t-on. C’était sans mentionner le contexte de cette loi.

Plantons le décor !

En 2014, la danse rituelle au tambour royal est inscrite au patrimoine immatériel de l’humanité par l’Unesco. Une reconnaissance immense pour cette danse qui fascine et ce rythme et cadence qui donnent le frisson. Par cet acte donc, il me semble que le gouvernement s’est trouvé dans l’obligation de protéger ce patrimoine qui n’appartient plus seulement au Burundi et Burundais, mais à l’humanité tout entière. Il se trouve alors que le moyen dont l’État dispose pour ce travail de protection est la loi.

Venons-en à l’interdiction : à mon humble avis, que les femmes battent le tambour, il n’y a pas de problème. Mais en interdisant cette activité aux femmes, le décret voulait placer l’authenticité de cette tradition au cœur de sa protection. En mots simples, si un héritage culturel se trouve modifié au gré du temps, cela consisterait à le banaliser, à le dénaturer, à le rendre trivial. Feu Antime Baranshakaje, gardien du tambour de Gishora, n’y allait pas par quatre chemins pour qualifier cela.

Par contre, le décret reconnait le droit aux femmes de danser au son et rythme du tambour, comme dans le temps. Pour dire qu’il n’est pas venu écarter la femme quant à ce qui est en rapport avec ce patrimoine commun, mais cherche à rendre à ce dernier sa grandeur et sa symbolique d’antan.

Au nom de l’égalité des genres

La culture burundaise, tout comme beaucoup de cultures au monde donnent une place plutôt négligée à la femme. Des traditions rétrogrades et humiliantes sont encore aujourd’hui observées dans notre culture. Si l’égalité des genres en droit est proclamée au Burundi, on est encore loin du compte en ce qui concerne les traditions, les cultures, l’émancipation. Mais alors, faut-il transformer tout au nom de l’égalité des genres ? Des jeunes femmes burundaises exécutent souvent des danses aux figures majestueuses et des pas très complexes. Je suis convaincu que beaucoup de garçons peuvent les exécuter. Mais la magie, le charme seront les mêmes ?

Est-ce que vous avez trouvé cet article utile?

Partagez-nous votre opinion

Les commentaires récents (2)

  1. C’est la honte totale de voir l’aeroport soit disant international dans quel etat il est. Ainsi que la Route qui conduit de ce fameux aeroport sale petit mal entretenu Vers la capitale la plus sale du monde. Regardez ailleurs chez nos voisins.

  2. Je partage votre avis sur ce sujet. Tout comme liberté ne veux pas dire libertinage, la vie ne devrait pas se résumer à une compétition au nom de l’égalité. La culture formant les racines même de la société il n’y a aucun mal à vouloir la préserver au prix de ce qui pourrait être prouvé autrement. Donc chères soeurs et mères (etc), n’enterrez pas le peu qu’il reste de votre identité pour une question de « capacité ». Nous sommes capable de bien plus sans avoir à le prouver.