À 121 km de Bujumbura, sur la côte du lac Tanganyika, se trouve une petite ville réputée pour ses hommes et femmes d’affaires. Elle donne aussi sur la Tanzanie, avec laquelle le commerce est florissant. Il suffit de s’aventurer à Kabonga pour constater les « va-et-vient » incessants des motos et des bateaux toujours prêts à l’assaut des vagues. Découverte.
Nyanza-lac, une des communes de la province Makamba, est un nom qui a toujours étrangement sonné dans mes oreilles. Durant des années, j’ai cru que c’était « l’ailleurs » ou « mu mahanga » comme on aime le dire chez nous jusqu’au jour où j’ai fini par découvrir que ce bel est bien une région du Burundi lourde d’histoire.
Avant de poser mes pieds sur cette terre frontalière de la Tanzanie, mes oreilles avaient déjà été chatouillées par cette histoire d’insurrection qui aurait déclenché les massacres de 1972. En fuyant les combats entre rebelles et l’armée, plusieurs Burundais auraient passé par Kabonga pour se retrouver à l’autre rive. Poussé par ma curiosité, au milieu de Nyanza-lac, je me suis mis à circuler, à poser des questions qui allaient dans tous les sens aux gens que je croisais. Avant de me retrouver en compagnie d’un Tanzanien très bavard installé à Kabonga qui me raconta dans un swahili difficile à déchiffrer les bonnes relations et la cohabitation pacifique qui unissent les deux peuples.
Des pratiques d’un autre temps
La discussion avec le Tanzanien m’a donné envie d’aller jusqu’à la frontière. C’était sans savoir qu’une petite mésaventure m’y attendait. Je ne savais pas que dans cet autre univers, le peuple est encore obligé d’apporter de l’eau aux militaires qui surveillent la contrée. Avec des bidons d’eau sur la tête, ils acheminent cette eau jusqu’à la position militaire. Je n’en croyais pas mes yeux. Avant d’arriver à la barrière très connue de la contrée, le motard qui me transportait, me dit de préparer 500 F pour échapper à cette corvée. Je croyais que c’était une blague jusqu’ à ce que j’aperçoive moi-même de loin les bidons alignés.
Un gentil policier m’attendait comme si on avait rendez-vous. Le motard freina son engin et je pris mon temps pour fixer le policier en lui demandant gentiment : « Je suis nouveau ici et je viens visiter la frontière, que dois-je faire puisque je ne peux pas monter à la position militaire avec un tel bidon sur ma tête ? ». La réponse du policier fut brève : « Il faut payer quelqu’un pour le faire à ta place ! ». Jouant les ignorants, je lui demandai combien coûtait cette corvée. « C’est 1000F pour toi ! » Mon visage de Congolais venait de me trahir, car pour les autres cela coûtait 500fbu. « Ici, les affaires ont plusieurs couleurs », me dis-je en partant.
Au monument » Burton-Speke »
En quittant Kabonga, je me sentais un peu contrarié. Il fallait que je retourne à l’hôtel Palm Beach pour me préparer au rendez-vous du soir avec Beny, un natif de Nyanza-lac. Vers 17h, alors que je quittais mon hôtel à pieds, une petite pancarte routière attira mon attention. Au fait, je marchais sur l’avenue « Burton-speke ». D’un coup, ma curiosité était réveillée. Je savais que dans les livres, un monument avait été érigé en mémoire du passage de deux explorateurs britanniques Richard Burton et John H. Speke sur les rives du lac Tanganyika vers les années 1858. Au bout de 45 min, j’avais trouvé l’endroit presque au hasard. Ce qui m’a beaucoup écœuré, c’est l’état dans lequel se trouvait le monument. Je me demandais comment un tel monument pouvait être abandonné dans cet état juste aux alentours des hôtels les plus réputés de Nyanza-lac.
Un monsieur au visage serein m’attendait dans un cabaret hyper branché de Nyanza-lac. C’était bien le jeune Beny. Au bout d’une petite conversation avant de savourer le plat plein d’oignons et de frites du cabaret, Beny me raconta la vie à Nyanza-lac. Il semblait avoir tout vu : des jeunes qui n’arrivent pas à monter des projets pertinents, des responsables qui ne cherchent que leurs intérêts, des adultes qui exploitent les jeunes, ceux qui abandonnent leurs études faute de moyens, des grossesses non désirées, ceux qui quittent Nyanza-lac pour l’Afrique du Sud etc. Pour Beny, son grand rêve, c’est de voir « des politiciens qui, après les élections oublient complètement leurs partis politiques, pour servir les intérêts de la nation et non ceux de leurs partis ». D’après lui, c’est ça qui gâche le bonheur de millions de Burundais.
Un autre jeune, Julien, actif dans une association de la localité, avoue que pour lui, tout ce dont la jeunesse a besoin, ce sont des dirigeants qui ne sont pas animés par des idéaux séparatistes.
Ce que Benny vous a raconté n’est pas pour nyanza-lac uniquement. La plupart des burundais ne pensent qu’au présent. Le future non! Nous avons besoins d’un politicien que penses à 50, 100, 200 ans et même au-delà
Le monument Richard Burton et John H. Speke m’interpelle aussi, l’état dans lequel il se trouve est déplorable. Il a besoin d’être entretenu parce qu il est mieux placé pour le tourisme de part sa proximité aux rives du lac et des luxueux hôtels de la localité