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Le passe-droit, cet impair du « customer care » au Burundi

Petits privilèges, passe-droits, petits arrangements, etc, ces petites faveurs de la vie courante tendent à devenir un fléau au Burundi. Et ce n’est plus seulement la tare des services publics, le secteur privé y a aussi succombé. Si les fournisseurs des services sont souvent incriminés, les demandeurs y ont leur part de responsabilité aussi.  La règle devrait être : premier arrivé, premier servi. Comment en finir avec ces prémices de la corruption ? 

Voulez-vous vous faire soigner,  renouveler  l’attestation de contrôle technique, faire un retrait ou un dépôt bancaire, prendre une police d’assurance automobile, etc., tout cela sans faire la queue ? « Est-ce qu’il ya quelqu’un qui va m’arranger le coup ?», voilà la question que beaucoup de Burundais ont l’habitude de se poser. La réponse sur toutes les lèvres est : «  Je vais appeler untel ». Il faut  ce « bon samaritain » pour  vous éviter une longue file d’attente! Si vous ne connaissez pas ce quelqu’un, il faut quand même connaître un autre quelqu’un qui connaît quelqu’un qui va le faire. Cela vous évite de poiroter dans un service public ou privé très sollicité. Vous êtes servi en premier alors qu’il y a des personnes âgées, des femmes enceinte et parfois des enfants qui font la queue. Et vous êtes fier d’être traité comme un roi alors que les autres suent sang et eau pour avoir accès un service auquel ils ont droit. 

Ces incivilités ne sont plus du domaine public seulement, le secteur privé a aussi été contaminé. De nos jours, un agent de sécurité d’un service se permet (sans que personne ne le lui demande)  d’accompagner un particulier dans le but de faire en sorte qu’il soit servi toute affaire cessante. 

Les services privés ont aussi attrapé le virus

On le disait plus haut, le secteur privé n’est pas épargné. Dans les banques commerciales, les micros finances, les sociétés d’assurances, les sociétés de téléphonie mobile, nous sommes habitués à  voir  un caissier servir son ami qui vient à peine d’arriver avant tout le monde. Dans les hôpitaux et les centres hospitaliers privés, au-delà du fait que parfois le côté financier prime sur la compassion, un patient peut se voir obligé d’attendre un autre patient qui vient juste d’arriver alors que son cas n’est pas aussi grave. 

A l’école et à l’église, lieux de socialisation, ces pratiques sont une réalité et les exemples sont légion. 

Le passe-droit fait partie de notre quotidien

Ces mauvaises pratiques sont ancrées dans notre mentalité et elles font partie de notre quotidien. Beaucoup de gens trouvent cela normal parce qu’ils ont grandi avec. Ce qu’on appelle « service ». « Ngiye gusaba naka service » (je  vais demander un service à tel)  équivaut à un passe-droit qui pourrit la vie des citoyens honnêtes.

 Et cela ne choque plus personne. La passivité est passée par là. Et c’est monsieur tout le monde qui doit attendre sagement qu’on daigne s’occuper de lui. On dirait qu’il a été créé pour attendre. Son temps à lui ? Il n’est pas si précieux que ça. C’est ce qu’il mérite. Et ne vous inquiétez pas pour lui, il n’est pas pressé ! Un vrai « foutage de gueule » comme dirait l’autre. 

Cela  ne donne naissance à aucun scandale. Y a pas mort d’homme, voyons ! Cela n’entraîne ni arrestations/licenciements encore moins des condamnations. Même les journaleux, ces vendeurs de mots ne s’y intéressent pas, pensent sûrement ces petits privilégiés.   

Premier arrivé, premier servi : la règle d’or

C’est cette sacro-sainte règle qui devrait régner dans tous les domaines de la vie : premier arrivé, premier servi. Les demandeurs des services s’en prennent souvent au personnel. Mais en réalité c’est le responsable qui devrait veiller à ce que sa boîte traite les gens au même pied d’égalité. Et puis, parfois les demandeurs des services ont leur part de responsabilité. Pourquoi vouloir être servi en premier au détriment de ceux qui sont arrivés avant. D’autre part, les concernés ne dénoncent pas suffisamment ces tares. Bien sûr quand on fait la queue à l’hôpital et qu’un cas très grave se présente, c’est humain de le laisser passer. Mais qu’est-ce qui explique que quelqu’un doit passer devant moi quand je veux récupérer mon argent que j’ai confié à la banque qui, au passage, prend un certain montant ? J’ai entendu dire que dans certains pays, to line up/to queue (faire la queue) est une règle inviolable partout, presqu’une coutume. Nous qui aimons copier jusqu’aux tics des étrangers, pourquoi ne ferions-nous pas nôtre cette bonne pratique ?

 

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