Le sénat a lancé officiellement, le 31 juillet 2023, l’évaluation du système des quotas ethniques dans l’exécutif, le législatif et le judiciaire. Est-ce le début de la fin d’un système qui avait essayé de rassurer toutes les composantes ethniques de la population burundaise ? Analyse.
Pouvoir pour la majorité et sécurité pour la minorité. C’est le but recherché par les quotas ethniques institués par l’accord d’Arusha et inscrit dans la constitution du Burundi. Dans les institutions, les hutu sont représentés à 60 % tandis que les tutsi à 40 %. Dans les corps de défense et de sécurité, les quotas sont de 50 % pour chacune des deux composantes. Ces quotas s’inspirent du modèle consociatif prôné par un politiste néerlandais Arendt Lijphart. Selon lui, c’est la forme que doit prendre les systèmes politiques démocratiques profondément divisés.
Parmi les bases du consociativisme, figure d’abord la formation d’une coalition gouvernementale où le pouvoir exécutif est partagé par les partis de l’opposition et ceux de la majorité afin de garantir la participation de tous les acteurs politiques dans la prise de décision politique. Ensuite, il y a la proportionnalité comme principe de représentation notamment au parlement, mais également dans l’administration publique. Il y a également le droit de veto comme moyen de protection des intérêts des minorités ou de lutte contre leur marginalisation.
Un modèle encombrant pour le Cndd-Fdd
Pour le cas du Burundi, la constitution de 2005 était restée dans les clous de ces principes. Avec la constitution de 2018, certains piliers du consociativisme burundais ont volé en éclats. Notamment, l’idée d’un gouvernement de coalition n’est plus d’actualité et il n’y a plus de droit de véto, car les lois sont votées par la majorité simple. La suppression des quotas est donc la dernière ligne droite pour achever le modèle Lijphart.
Il faut reconnaître que le consociativisme a donné beaucoup de fils à retordre au pouvoir du CNDD-FDD. Lors de sa première législature, il a subi beaucoup de blocages à l’Assemblée nationale suite à cette approche. Si les députés de l’opposition boycottaient l’hémicycle, la plénière ne pouvait pas se tenir. La Constitution exigeait un quorum des 2/3 des députés pour avoir lieu. Or, à l’issue des élections législatives de 2005, aucun parti politique ne pouvait seul atteindre ce quorum. Le parti de l’Aigle a retenu la leçon, et il a échafaudé une stratégie pour s’extirper de l’emprise de ce modèle. L’erreur de l’opposition de boycotter les échéances électorales de 2010 a sans doute conforté le CNDD-FDD dans cette position.
Pour l’heure, l’opposition n’est que l’ombre d’elle-même et le pays a basculé dans un monopartisme de fait. Seule note positive : le pouvoir n’a plus à se plaindre que l’opposition lui met les bâtons dans les roues.