Alors que les chiffres des violences basées sur le genre (VBG) ne cessent d’augmenter au Burundi, avec leur lot de victimes, l’analyse de son coût permet de saisir non seulement son ampleur, mais également son incidence économique sur le pays. Analyse.
Les VBG n’épargnent personne. Pas même le portefeuille des États. Tenez. Au niveau mondial par exemple, le coût des VBG non sexuelles est d’environ 4,4 milliards dollars américains, représentant 5,2 % du PIB mondial. Pour les violences sexuelles à l’égard des femmes, c’est autour de 66,7 milliards dollars américains qui s’ajoutent chaque année aux budgets des États. Le Burundi ne fait pas exception. Selon une étude sur les fonds sur l’emploi du budget pour l’assistance judiciaire, psychologique et médicale des survivants de violences sexuelles et basées sur le genre, le coût de la prise en charge globale et holistique des victimes prévu par le gouvernement de 2019 à 2021 est de 1.860.000.000 Fbu.
Le budget de l’Etat en souffre…
Selon le Docteur Ndorukwigira, médecin à l’hôpital Mutaho, lors des coups et blessures, voire fracture due à une violence physique, ou une bartholinite consécutive à une violence sexuelle, la femme est clouée au lit de l’hôpital pendant des semaines, sous le portefeuille du gouvernement via la carte d’assurance-maladie. Pour avoir une notion de ces dépenses, de 2017 à 2019, la prise en charge globale et holistique des victimes des VSBG a déjà consommé une bagatelle de 374 600 000 Fbu en 2017, 427 600 000 Fbu en 2018 et 483 600 000 Fbu en 2019. Un total de 1 285 800 000 Fbu.
Là, c’est sans parler des bourreaux qui, une fois emprisonnés, vont eux aussi vivre en prison sous les frais du gouvernement, et cela, pendant 25 ans. Les VBG, c’est comme une sangsue qui suce le budget de l’Etat en gonflant les dépenses, ce qui accroît la dette publique intérieure par exemple, et par là, l’inflation avec toutes les conséquences qui vont avec.
… et la productivité en pâtit
Selon M. Nimubona Jean, expert des questions du genre, les femmes clouées au lit de l’hôpital ou troublées psychologiquement à cause de ces VBG, interrompent souvent leur travail, ce qui constitue un coup à leur productivité. Tout cela dans un pays où selon une étude de la FAO, 97,4 % des femmes en âge d’activité travaillent dans le secteur agricole qui rapporte, en valeur ajoutée, plus de 50 % du PIB et 95 % de l’offre alimentaire. Et c’est sans parler de la perte de revenus des ménages qui, dans d’autres circonstances, auraient pu allouer ces ressources à des activités génératrices d’emploi, de revenus et d’investissement.
En plus, le fameux VBG dénommé « Kwidelibera » qui consiste à coucher avec son éducateur pour réussir facilement un examen, produira quels types d’ingénieurs, d’enseignants , de juges, etc. et quels genres de dirigeants pour le Burundi de demain ?
L’évidence est là. L’analyse des coûts de la violence basée sur le genre permet de saisir non seulement son ampleur, mais également son incidence économique sur le pays. Pour l’intérêt général de la nation, le combat contre les VSBG nous concerne tous, et investir dans leur élimination est une nécessité absolue, au-delà du budget actuel qui est moins de 0,5 % du budget général.