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La vie à deux lorsque l’un des conjoints est séropositif

Il se dit beaucoup de choses sur le VIH. Quand il s’agit de se mettre en couple, alors là, c’est un florilège de mots. « Ntivyoshoboka! Yohava anyanduza, abana bacu bakawuvukana! » (C’est impossible ! Elle pourrait me contaminer, nos enfants seraient contaminés dès leur naissance !) Cependant, certains, comme Don*, bravent cette crainte et choisissent un conjoint séropositif et le soutiennent dans leur quotidien. Témoignage.

Ma femme et moi avons grandi dans le même quartier et d’ailleurs nous avons fréquenté la même école primaire. A l’époque, il n’y avait pas trop d’interactions entre elle et moi. Comme des gamins quoi. Elle jouait avec les autres enfants et moi de même.

Dans l’insouciance de l’enfance, le SIDA ne me traversait pas la tête et encore moins, je ne me posais pas la question de savoir si elle l’avait ou pas. J’avais entendu dire qu’elle habitait chez sa tante mais sans plus. Arrivés en 7ème année, nous nous sommes retrouvés dans la même classe vu que j’avais repris l’année et à partir de là, nous nous sommes rapprochés encore plus.

En 9ème année, l’attirance que j’avais pour elle grandissait peu à peu. Depuis la 7ème, nous étions chez le même prof pour les cours du soir. Ensemble en classe puis dans le cours du soir sans oublier les promenades après le cours, on passait vraiment beaucoup de temps à deux. Les hormones n’ont pas tardé à s’en mêler et l’adolescence m’a frappé de plein fouet.

Nos premiers pas

Devant mon insistance à devenir plus proche, elle a décidé de me parler de sa séropositivité. A ce moment-là, nous étions en 10ème année. Je la vois qui me tire par le bras et qui m’emmène derrière notre salle de classe. C’est là qu’elle m’a tout dit. Je n’avais jamais soupçonné qu’elle avait le SIDA et là, elle me dit qu’elle est née avec. La nouvelle m’est tombée dessus comme un coup de massue. Elle m’a aussi dit qu’elle m’aimait vraiment et qu’elle ne voulait pas me transmettre ça. Ceci expliquait la raison pour laquelle elle me repoussait quand je me mettais à la toucher.

Après l’annonce, elle m’a parlé avec un peu plus de détails sur ce virus avec lequel elle a vécu toute sa vie. Son enfance en entier était rythmée par la prise des médicaments, qu’elle prenait sans trop comprendre pourquoi. Elle ne comprenait pas non plus les visites à la SWAA Burundi ni les prises de sang itératives. C’est en 8ème année qu’on lui a tout révélé pour éviter qu’elle ne contamine quelqu’un par mégarde.

Je ne mentirais pas la nouvelle m’a terrifié et l’année d’après, je changeais d’établissement. Je ne pouvais pas continuer ainsi avec elle juste à côté. Mais je ne me doutais pas que quelques années après nos chemins allaient se recroiser. Elle est devenue très active dans la RNJ+ et a commencé à sensibiliser les gens dans la communauté. C’est dans ce contexte et à l’université qu’on s’est revu.

Un nouveau départ

La revoir et de surcroît les informations qu’elle nous partageait me faisait voir les choses sous un angle nouveau. La vie à deux est possible et même les enfants peuvent naître sans le virus. J’ai voulu en apprendre davantage et rebelote, la complicité entre nous s’est réinstallée. Alors un petit B-A-BA sur le traitement : les médicaments doivent être bien pris, c’est-à-dire tous les jours, et les contrôles doivent être réguliers.

Quand on a décidé de passer à l’étape supérieure et nous marier, je savais que je devais jouer un grand rôle pour la soutenir. Le conjoint doit être impliqué pour limiter la transmission. Donc moi, j’ai suivi les enseignements avec ma femme. Comment avoir des relations sexuelles ? Comment cela se passe-t-il pour les naissances ?

Résultats ? Quelques années après, nous avons un enfant. Bien portant et en bonne santé. Moi aussi, je suis en bonne santé et je n’ai pas le SIDA. Les années de mariage n’ont rien changé à la ferveur que j’ai pour soutenir ma femme. Je vais prendre ses médicaments quand elle est empêchée. Je suis persuadé que c’est grâce à l’entraide qu’il y a entre nous que ça marche si bien.

Les membres de la famille qui étaient réticents à notre union ont changé d’avis. Ils nous rendent visite et nous partageons des moments ensemble. C’est parce que nous nous sommes soutenus que cela a réussi et parce que nous avons suivi les conseils que nous avons reçus.

 

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