Le coût des transports en communs a été revu à la hausse à Bujumbura, de 350 à 380 FBU. Cette hausse qui peut sembler insignifiante pour quelques nantis provoque désespoir et résignation chez les moins aisés. Et comme un malheur ne vient jamais seul, il se fait que les pièces de 10 et 20FBU qui pourraient servir de monnaie de rechange se comptent sur le bout des doigts, obligeant les clients à payer 400FBU, malgré eux.
Comme je prends moi-même souvent le bus pour me déplacer dans Bujumbura, j’ai eu l’occasion de constater avec amusement le comportement de certains clients face à cette nouvelle situation. Il y a d’abord ceux qui se murent dans leur incrédulité et qui tendent fièrement la même somme qu’avant comme si de rien n’était. Et quand le convoyeur réclame le reste, ils ouvrent grandement leurs yeux comme pour dire : « Sans blague !! ». Bien évidemment en examinant la mine du convoyeur, ils comprennent qu’il n’y a rien de comique dans la situation et c’est à contrecœur qu’ils donnent la totalité du tarif. Je me demande alors à chaque fois si vraiment ils ne sont pas au courant ou s’ils font semblant de ne pas savoir.
Il y a ensuite ceux qui guettent cette monnaie de rechange comme un lion guette sa proie. Pas question de jeter par les fenêtres 20 francs à chaque fois qu’on prend le bus ! Et si par malheur il arrive que le convoyeur ne les a pas, ils réclament férocement ce qui leur revient de droit, parfois même en traitant ce dernier de tous les noms. Des fois, celui-ci se confond en excuses pour justifier la situation ; d’autres fois il s’emporte lui aussi et les insultes volent. Et à la fin, que ces clients obtiennent gain de cause ou non, ils ne se privent pas de déverser toute leur rancœur sur les transporteurs.
Enfin, il y a les résignés. Attention ! Leur cas est beaucoup plus intéressant qu’il ne le paraît. Parmi eux, il y a ce qui se taisent parce qu’ils n’ont aucune envie de déclencher des querelles. Pour eux, surtout pas de boucan, quitte à perdre leur argent.
D’autres encore se taisent par pure lassitude. Pourquoi gaspiller sa salive pour une cause perdue d’avance? Pourquoi se fatiguer pour ne rien en tirer à la fin?
Toutes ces catégories de personnes symbolisent le mal-être qui caractérise les Burundais dans cette période de crise économique. Inflation, pénuries de carburant et de médicaments, etc. : milles maux pèsent sur leurs épaules. Et si le troupeau semble de loin apathique, au fond la colère gronde. Une colère que l’organisation à tour de bras d’élections ne saurait à elle seule calmer. Bien au contraire.
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