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L’ordre intérieur, l’enfant terrible de la loi sur les partis politiques

Les conflits internes dans les partis politiques sont courants au Burundi. Ils sont interprétés différemment, selon celui qui juge. L’ordre intérieur, une brèche dont le gouvernement profite pour s’ingérer dans les affaires internes des partis politiques ? Ce blogueur s’est intéressé à la question. 

Martinez. C’est le nom que nous allons donner à un de nos intervenants qui a préféré garder l’anonymat. Selon lui, la plupart des conflits internes des partis sont exacerbés par l’extérieur. « On l’a constaté depuis quelques décennies. On l’a vu à l’époque Buyoya et aussi à l’époque CNDD-FDD depuis Edouard Nduwimana. Les ministres de l’intérieur détournent la loi pour casser ou « nyakuriser » les partis qui représentent un danger électoral.», explique-t-il.

Selon la loi n°1//16 du 10 septembre 2011 portant organisation et fonctionnement des partis politiques, l’article 22 dispose que « les partis politiques doivent mettre en avant la promotion et la protection des droits fondamentaux de la personne humaine, d’un Etat de droit fondé sur la loi, le respect de la loi et la défense de la démocratie. » Il revient à dire que le ministère de l’intérieur qui a la gestion des partis politiques dans ses attributions doit veiller, avant l’octroi de l’agrément, que cette obligation soit respectée. 

L’article 48 énumère les éléments que doivent contenir les statuts des partis politiques. Dans ces éléments, on y trouve la composition, le mode de désignation et la durée du mandat des organes dirigeants à l’échelon national. Néanmoins, l’article 4 reconnaît que les partis politiques s’organisent librement, ce qui revient à dire que c’est aux membres de fixer le nombre de mandats des dirigeants dans leurs statuts. 

Des partis confondus à leurs présidents ?

Pour Martinez, le fait que certains partis soient confondus à leurs présidents ne pose aucun problème et ce n’est pas un cas isolé. « Ce n’est pas seulement au Burundi, mais aussi dans d’autres pays hors d’Afrique. Pour le CNDD-FDD, c’est un système où plusieurs personnes se succèdent à la tête du parti. Ce n’est pas parce qu’on élit le président, tous les 4 ou 5 ans, que le parti est démocratique dans son fonctionnement. Le CNDD-FDD en est un bon exemple.  Pour le cas Rwasa, c’est une personnalité politique qui incarne une idéologie et qui a une légitimité populaire. Quand il a quitté le FNL, les gens l’ont suivi ». 

Selon lui, un membre qui adhère à un parti qui s’identifie à son président le fait en toute conscience et il ne devrait pas s’en plaindre après. 

Gédéon Ndayisenga, jeune juriste, n’est pas du même avis. Selon lui, les partis politiques sont, pour les citoyens, un moyen important de participer à leur gouvernement et concrétiser la démocratie représentative. Leurs membres ainsi que l’Etat doivent alors veiller à ce que les partis soient forts et dynamiques. « Les partis eux même sont les mieux placés pour s’organiser et se rendre fort. Il ne faut pas que le parti soit à l’image de certaines personnes, car une fois qu’elles disparaissent le parti disparaît avec elles », déclare-t-il. 

Que faire pour éviter l’émiettement ? 

Pour mettre fin aux conflits internes des partis politiques, M. Ndayisenga propose de limiter les mandats des dirigeants afin d’impliquer les autres dans la direction du parti. « C’est déplorable de voir une personne à la tête d’un parti pendant plus de 10 ans », regrette-t-il. Il propose également de partager équitablement les postes obtenus lors des élections pour éviter les mécontentements. « Il ne faut pas que ce soient les proches du dirigeant qui soient nommés. Il faut la transparence dans la gestion des ressources du parti, faire un rapport annuel des cotisations, des dons et autres moyens obtenus ainsi que les dépenses effectuées.», argumente-t-il. 

Néanmoins, il s’accorde avec Martinez que « l’Etat ne devrait pas s’ingérer dans l’organisation et dans le fonctionnement des partis politique comme le prévoit l’article 80 de la constitution.».  

Par contre, conformément aux dispositions de l’article 84 de la constitution, Gédéon explique que l’Etat devrait songer à mettre en place une loi fixant les montants à octroyer aux partis politiques pour leur permettre de mieux s’organiser, se renforcer et préparer les élections. « Cela est proposé par la Constitution, mais la mise en application reste impossible », déplore-t-il. 

 

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