Depuis 2021, le président Evariste Ndayishimiye n’a cessé de souligner l’importance d’améliorer le climat des affaires au Burundi. Mais au-delà des discours, où en est réellement le Burundi ? Les étoiles sont-elles désormais bien alignées pour une ruée des investisseurs au pays du lait et du miel ? Quelles leçons pouvons-nous tirer du Forum des investisseurs ? Analyse.
C’est une évidence, le Burundi a besoin de ressources pour se développer. Seulement, celles en provenance d’endettement s’avèrent moins efficaces que les capitaux venus des investisseurs étrangers.
Or, la réussite de ce processus exige des législations qui suppriment les contraintes sur la mobilité des capitaux. Néanmoins, à première vue, le pays semble être une terre de défis. Il suffit de jeter un œil aux chiffres pour saisir l’ampleur de la situation.
Un exemple avant d’aller plus loin. Selon la loi portant fixation du budget général de l’État exercice 2024-2025, nous constatons un déficit global de 449,60 milliards de BIF. Son financement implique deux scénarios qui entraînent le couple « impôts et inflation ». Or, ce couple ne fait qu’éroder l’épargne domestique. Il détruit l’espoir de tout investisseur et par ricochet fait fuir même les investisseurs étrangers.
En 2021 (lors d’une réunion stratégique sur le financement du développement du Burundi), un véritable souffle d’espoir a traversé le pays lorsque le président de la République a décidé de prendre les choses en main, en s’attaquant enfin à la question cruciale du climat des affaires. Cela a été perçu comme un tournant prometteur, avec l’espoir que des réformes ambitieuses et une nouvelle dynamique puissent apporter les résultats tant attendus.
Cependant, malgré cette prise de décision audacieuse, les résultats tangibles tardent encore à se manifester, et la réalité reste plus mitigée qu’espéré.
Un petit coup d’œil dans le rétroviseur
Parlons des affaires dans des termes accessibles au commun des mortels. Le 30 novembre 2024, la société fintech Sama Money a annoncé la suspension temporaire de ses activités au Burundi à partir de janvier prochain. Cette décision fait suite à une stratégie de réorientation des ressources vers d’autres marchés africains où la plateforme connaît une « croissance significative », précise le communiqué officiel. C’est la dernière en date, sinon d’autres entreprises ont connu des déboires et ont mis la clé sous le paillasson. C’est le cas de Lacell qui opérait sous le nom commercial de Smart.
C’est également également le cas de Econet-Leo, une autre entreprise de télécommunications. Tout récemment, elle a été confrontée au problème de dette fiscale colossale, estimée à 44 millions USD et 88 milliards BIF.
Bien que toujours fonctionnelle, ses activités sont grandement perturbées et son avenir est incertain en raison de pressions financières et administratives.
Quelques obstacles subsistent
Une question s’impose : que fait concrètement le Burundi pour convaincre les investisseurs de sa stabilité économique, politique et financière ? Le manque chronique de devises, la pénurie de carburant qui continue de freiner les affaires, ou les réformes monétaires, comme le récent remplacement des billets de 10 000 et 5 000 BIF, peuvent être perçus comme un signal d’instabilité et d’imprévisibilité pour un investisseur potentiel.
Qu’est-ce qui garantit aujourd’hui que ces défis ne vont pas se transformer en obstacles sérieux pour les investisseurs ? En réalité, le seul et unique climat favorable aux affaires est le profit. Or, vu la situation actuelle du pays, le Burundi n’est pas véritablement un Eldorado pour ceux qui veulent investir. Autrement dit, il y a beaucoup de risques pour ceux qui investissent dans notre pays.
Et si le Burundi s’inspirait de la méthode Obasanjo ?
Comme l’a si bien souligné Olusegun Obasanjo lors du forum des investisseurs, « Un investisseur vient pour les bénéfices ».. Il a même abordé la question de la corruption. Le président de la république ne cesse pas non plus de dénoncer la corruption dans les services de l’État, un fléau qui fragilise la confiance des investisseurs et entrave l’efficacité de nos institutions.
Comme l’a bien décrit un blogueur, il est grand temps d’agir. Pour Obasanjo un pays gangrené par la corruption ne sera jamais une destination prisée par les investisseurs. Cette réalité s’impose à nous avec une clarté implacable.
Aller au-delà de beaux discours
Le gouvernement burundais s’est fixé une ambition de taille : faire du pays une économie émergente d’ici 2040 et un pays développé d’ici 2060. Un objectif qui inspire, mais qui ne pourra être atteint sans des actions stratégiques concrètes. Les discours motivants, c’est bien. Mais ce dont le Burundi a vraiment besoin actuellement, c’est d’une gouvernance qui agit.
Il est donc urgent de rétablir des partenariats solides avec des acteurs comme l’Union Européenne, qui a longtemps été l’un des principaux bailleurs du pays. Ce genre de forums ne doivent pas seulement être symboliques. Il faut qu’ils aboutissent à des engagements concrets en matière de financement du développement au Burundi. Il faut aussi penser à assainir les relations avec les pays voisins. La fermeture des frontières avec le Rwanda voisin reste une épine dans le pied du pouvoir de Gitega.
Dans l’urgence absolue, il est temps d’assainir l’environnement des affaires et de protéger les initiatives économiques. Il faut notamment réduire les obstacles tels que la pénurie de carburant, la rareté des devises, la lourdeur administrative et la corruption afin de stimuler les acteurs locaux et attirer des investisseurs.