Au risque de vous décevoir, il semblerait qu’aucun scientifique n’est en mesure d’expliquer l’étymologie des vocables «Hutu» et «Tutsi» ni de dater quand, par qui et pour quels objectifs ils ont été utilisés pour la première fois.
D’après le professeur Lothaire Niyonkuru, linguiste et enseignant au département des langues et littératures africaines à l’Université du Burundi, ces termes sont des substantifs qui ne dérivent pas des verbes.
Ainsi, il n’est pas facile de retrouver leur sens d’autant plus qu’il n’a pas été transmis par l’Histoire ni par la tradition orale. Celle-ci remonte à des temps immémoriaux.
L’historien Jean-Marie Nduwayo, chef du département d’Histoire à l’Université du Burundi, explique que si l’Histoire n’a pas gardé les balbutiements de ces vocables, cela signifie qu’ils n’étaient pas importants dans la société burundaise. Car, tient-il à souligner, l’Histoire ne retient que des faits importants.
Les universitaires linguistes et historiens burundais s’accordent sur une chose : «Aucune recherche scientifique et rigoureuse sur ces deux termes n’a encore eu lieu». Toutes les tentatives ont mené à des digressions.
Ils parlent en premier temps des travaux qui datent de la fin du 19ème siècle puis ceux du début du 20ème siècle.
Déformation…
Le premier à avoir tenté une définition de « Hutu » et « Tutsi » est français-kirundi du père hollandais Joannes Michael Van Der Burgt sur l’Urundi et les Warundi publié en 1903. Il présente les « Tutsi » comme des individus « de haute stature (jusqu’à […] 2m15) », « souvent au profil grec », originaires des « pays galla », « intelligents, rusés, hypocrites, fiers, très superstitieux », une « race de pasteurs » tandis que les « Hutu » comme des « vieux-Bantu », « cultivateurs, de taille moyenne, noirs, maigres, secs, nerveux, agiles, actifs, irascibles, vindicatifs, voleurs, menteurs ».
Quant au dictionnaire rundi de Rodegem, il définit un Hutu respectivement comme un agriculteur de la classe sociale moyenne d’une part et un individu dépendant de quelqu’un du statut plus élevé d’autre part. Au sujet du Tutsi, le même ouvrage parle du pasteur appartenant à la classe sociale supérieure.
L’allemand Hans Meyer a publié Die Barundi «qui signifie littéralement ‘‘Les Burundi’’» en 1916. C’était à la suite du voyage qu’il a effectué en 1911 dans le territoire qui était alors appelé Deusch Ost Afrika (c’est-à-dire les colonies allemandes de l’Afrique orientale). Pour rappel, l’Urundi, le Rwanda et le territoire de Tanganyika furent sous l’emprise allemande jusqu’à la fin de la 1ère Guerre mondiale.
Hans Meyer dresse une description caricaturale de la population burundaise. Il corrobore la théorie hamitique : «Les Tutsi étaient des pasteurs d’ascendance éthiopienne ayant envahi le pays et imposé leur domination aux autochtones bantou. Ils constituaient donc l’aristocratie dirigeante tandis que les Hutu se trouvaient réduits à une sorte de servage».
Il n’est pas superflu de souligner que Hans Meyer était géographe. Voyageur passionné, son périple s’inscrivait dans des recherches plus géographiques. Il en était d’ailleurs à son 5ème dans la même région.
Cependant, de par l’intérêt qu’il a porté sur la population, Hans Meyer s’est improvisé ethnologue. En conséquence, il a laissé en héritage un ouvrage des plus déroutants qui soient.
Les chercheurs francophones en comprendront la teneur grâce à l’historien français Jean Pierre Chrétien. Celui-ci fit en 1984 de la traduction française de cet ouvrage par Françoise Willmann.
D’après lui, la vision de l’auteur est davantage déformée quand il s’agit de l’origine du peuplement et des structures sociales. «Il est pénétré dans la fameuse hypothèse indiscutée à son époque».
Le dictionnaire français-kinyarwanda, une co-publication de l’Institut scientifique et technique de Butare au Rwanda et le Musée royale de l’Afrique centrale de Tervuren en Belgique (2005) s’inspire des légendes quant à l’explication de l’origine des ‘‘Hutu’’ et ‘‘Tutsi’’. «Gahutu, descendit d’Imana (Dieu), il est le cadet de Gatwa et l’aîné de Gatutsi», peut-on y lire.
Une étude linguistique comparée s’impose…
Les vocables «Tutsi » et «Hutu» sont des substantifs que l’on retrouve dans la région des Grands Lacs. Ils sont utilisés aussi bien au Burundi qu’au Rwanda et en République démocratique du Congo (Kivu).
Athanase Karayenga, intellectuel burundais, fait savoir que toute recherche sur leur étymologie devrait s’étendre aussi sur les régions proches du Burundi où il existe des populations Hutu et Tutsi.
Néanmoins, il estime que cette recherche sera très complexe voire impossible : «Les mots Hutu, Tutsi ou Twa n’ont pas de sens particulier».
Une idée qu’épouse le professeur Jean-Marie Nduwayo : «Personne ne connait leur origine ni leur signification. Les premiers Européens arrivés au Burundi qui ont tenté d’en comprendre le sens vers la fin du 19ème siècle n’ont rien trouvé». Pourtant, ils avaient l’avantage de contacter directement les vieux connaisseurs de la tradition burundaise. D’après cet universitaire, il n’y a que des légendes développées par les colonisateurs autour de ces deux termes.
Le linguiste Niyonkuru recommande une étude linguistique comparée. Elle devra s’effectuer sur les langues des communautés voisines du Burundi. Notamment le Kinyarwanda, le giha et l’igihangaza et l’urunyankoré.
L’objectif sera de retrouver la signification des deux vocables dans chacune de ces langues pour voir s’ils désignent la même chose ou non.
Cette entreprise sera-t-elle facile vu que le sens de ces deux vocables n’est pas resté statique ? «Être tutsi ou être hutu dans le cas du Rwanda et du Burundi n’a pas le même sens, en 1994 au moment du génocide, en 1894 quand les Blancs arrivent, en 1794 quand les anciens royaumes arrivent à leur apogée, en 1594 quand ils commencent à se structurer… », écrit Jean-Pierre Chrétien à la page 68 de son livre L’invention de l’Afrique des Grands Lacs : Une histoire du XXème siècle publié en 2010 aux Editions Karthala.
Les vocables «Hutu» et «Tutsi» ont marqué l’Histoire politique du Burundi depuis la seconde moitié du 20ème siècle. Autour d’eux se sont construits des idéologies manichéennes qui ont conduit les Burundais dans leur ensemble aux divisions intestines. Ils se sont tués, massacrés, etc. Pourtant, aucune recherche ethnologique et historique ne rapporte des cloisons entre ceux qui se qualifient Hutu, d’autres Tutsi.
In fine, la solution convenable aux Burundais ne serait-elle pas d’évoluer vers un peuple uni où certains ne se reconnaissent pas comme «Hutu» et d’autres comme des «Tutsi »?
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Mais l’histoire a pu retenir des regions comme Bututsi, Nyabututsi,…Pas important mais bon! Le deni n’est pas d’hier!
Ce que tout le monde sait est que Hutu et Tutsi sont des noms de peuples .
Hutu signfie Serviteur ( au Burundi) umuhutu wanje: Mon serviteur
Hutu est un radical. Il n’existe pas en tant que tel. Il est toujours suivi par un préfixe: umu ou aba pour désigner un ou plusieurs individu issu du peuple Hutu ou Tutsi
Kwihutura signifie; Quitter son identité de Hutu.
Tutsi : Une personne qui n’est pas Hutu
Le mot Tutsi possède des connotations selon les régions: il signifie Seigneur dans certaines régions hutu ou une personne qui a des aptitudes à diriger ou une personne arrogante . Tous les contes parlent des Tutsi comme des personnes intelligentes, malignes.
Bututsi: Une région du Sud du Burundi