Les travaux de bitumage de la route nationale 17 a fait de Mahwa un melting-pot où se rencontrent des gens venus de différents coins. De cette rencontre, il s’est observé une recrudescence de grossesses non-désirées que les tante-écoles essaient de juguler.
La tradition burundaise estime qu’il y a des secrets tellement intimes que la pudeur ne permet pas d’en parler avec sa mère. Dans ce cas, l’alternative est automatiquement la tante. Comme le dit l’adage, « uwutagira inasenge arisenga », signifiant littéralement qu’une jeune fille qui n’a pas de tante se charge elle-même de sa toilette. La vraie raison étant que, avec les attributs sexuels qui se développent, la mère ne peut plus « oser » voir sa fille nue. Ce rôle est alors dévolu à la tante.
C’est exactement la mission qu’exerce Caritas Nisabwe, la tante-école du lycée Mahwa Joy secondary school . « Et pas que pour les filles, précise-t-elle ». Les cas qu’elle a à traiter sont divers. « Des enfants orphelins qui veulent décrocher par manque de moyens, des écoliers avec des séquelles issues des conflits familiaux et bien d’autres cas ».
« Les chauffeurs profitent de la précarité des jeunes élèves »
Niyonsaba Gloriose est tante-école au lycée communal Mahwa. Elle reconnait que « les jeunes filles tombent facilement dans les filets des chauffeurs des entreprises de constructions qui les leurrent avec de l’argent ».
C’est là qu’intervient son action, elle qui habite à Mahwa où les nouvelles courent vite. « Nous recevons des informations concernant des filles qui fréquentent les bars en compagnie des hommes qui ne sont pas d’ici, souvent de passage. Dans ces cas, nous contactons personnellement ces élèves pour une discussion franche », dit-elle.
La discussion, c’est également l’arme de Niyonzima Pascaline, tante école à l’ITAB de Mahwa. « Notre école est déjà réputée pour sa rigueur, les élèves essaient de se conformer à nos conseils », révèle-t-elle avant de nuancer son propos en mettant en exergue sa position de senge, la tante : « Mais moi je suis plus dans le dialogue. Nous sommes au courant de ces liaisons entre les chauffeurs et les élèves, et nous engageons des discussions avec nos élèves sur cette réalité pour éviter que ça se produise dans notre établissement ».
Sur le front contre les grossesses non désirées
L’une des fiertés de Caritas est que son établissement n’enregistre pas des cas de grossesses non désirées. Sa pierre apportée à cet édifice est une batterie de séances d’échanges organisées autour des thèmes de la santé sexuelle et reproductive.
« Les thèmes sont vraiment variés. Du changement de leurs corps avec l’âge en passant par les moyens de lutte contre le SIDA en passant par le leadership pour qu’ils deviennent à leur tour des relais », explique celle que ses élèves appellent affectueusement tantine.
Gloriose, elle, doit se montrer plus convaincante pour rivaliser avec ceux qui tentent d’entrainer « ses filles » dans leurs filets. « Mes filles sont des externes, l’encadrement après les heures d’école est difficile. Elles rencontrent des commissionnaires qui sont envoyés par les chauffeurs. Je dois être vigilante et parler avec toute fille qui a été en contact avec ces gens-là ».
Ce rôle de tante école demande néanmoins des investissements. En temps et en moyens. « Toutes ces personnes qui se donnent corps et âmes devraient bénéficier d’un petit soutien tant leur rôle est grand dans une société où la sexualité est taboue », note Pascaline de l’ITAB.
C’est la première fois que j’entends une telle chose et c’est une nouvelle réjouissante.
A toutes les tantes-école, bigapuuu sana ! Vous êtes des héroïnes ❤️