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Séparation des pouvoirs au Burundi : y a-t-il péril en la demeure ?

La constitution du Burundi reconnaît la séparation des pouvoirs. Cependant, les sorties médiatiques de certaines autorités du pays ont poussé les gens à se poser des questions à ce sujet.  Ce blogueur s’en inquiète et en profite pour nous rappeler le fondement des trois pouvoirs dans un Etat démocratique.  

« Pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir », disait l’illustre Montesquieu dans son célèbre ouvrage intitulé Esprit des lois sortie en 1748. Récemment, les gens se sont posé des questions quand le président de l’Assemblée Nationale s’est prononcé sur les agissements des juges dans des termes plutôt crusL’exécutif quant à lui est soupçonné de s’immiscer dans les affaires judiciaires. Le seul fait que c’est l’exécutif qui nomme les magistrats est problématique, d’après certains analystes. C’est la raison pour laquelle certains soupçonnent des accointances, immixtions ou empiétements qui mettent à mal la séparation des pouvoirs. Peut-être est-il opportun de revenir sur les fondamentaux d’un Etat démocratique basé sur la séparation des pouvoir. 

Nous ne sommes pas les seuls à avoir senti ce besoin de revenir ces notions.  Ce sujet a récemment fait objet d’un débat entre Martin Ninteretse, secrétaire permanent au ministère du développement communal, Léonce Ngendakumana, l’ancien président de l’Assemblée Nationale, Faustin Ndikumana, le président du Parcem et l’avocat Rodrigue Majambere.

Selon Raymond Blaise Habonimana, expert en gouvernance et développement, le principe de la séparation des pouvoirs intervient dans un régime démocratique. Cela signifie que le peuple décide par le biais des représentants élus. « Pour que ceux qui détiennent le pouvoir n’en n’abusent pas, les fonctions de l’Etat sont séparées. », explique-t-il.  Les trois pouvoirs dont il est question sont l’exécutif, le législatif et la judiciaire.

Où se limitent les compétences de chaque pouvoir ? 

Les trois pouvoirs composent un régime démocratique, rappelle l’expert. Ils sont complémentaires mais sont séparés de façon à ce qu’aucun des trois ne puisse être en situation d’abuser de son pouvoir. En gros, ils se surveillent mutuellement. Chacun est le contre-pouvoir de l’autre. Par exemple, si l’exécutif va trop loin, le législatif et le judiciaire doivent pouvoir l’arrêter, d’où cet érudit de Montesquieu a déduit qu’ « il faut que le pouvoir arrête le pouvoir

Cet analyste fait savoir que le pouvoir législatif est exercé par une assemblée qui élabore et vote les lois. Il légifère. Le pouvoir exécutif exécute les lois et les fait appliquer. Ce pouvoir est exercé le plus souvent par le président et son équipe gouvernementale. Le  pouvoir judiciaire tranche les litiges sur la base des lois votées par le pouvoir législatif. Composé des cours de justice et des tribunaux,  ce pouvoir doit aussi interpréter la loi et contrôler sa mise en application. Bref, le pouvoir judiciaire intervient quand il y a des désaccords. 

Pourquoi la séparation des pouvoirs est-elle nécessaire ? 

Habonimana explique que la séparation des pouvoirs apparaît ainsi comme le corollaire indispensable de la protection des droits naturels de l’homme : « Le contrôle mutuel qu’exercent les trois pouvoirs, les uns envers les autres, préserve l’individu des atteintes à ses droits fondamentaux. ». En ce sens, la séparation des pouvoirs constitue un rempart contre la partialité, la mauvaise gestion de la chose publique, la violation des lois, le despotisme et la tentation du pouvoir personnel. Cela parce qu’aucune personne ne peut concentrer entre ses mains la totalité des attributs de la souveraineté.

Selon ce spécialiste, la séparation des pouvoirs existe et figure en bonne place dans la Constitution. C’est en 1992 que la constitution burundaise a clarifié la séparation des pouvoirs au Burundi. Avant cette date, notamment dans la constitution burundaise de 1974, le pouvoir était dans les mains du parti. « Le parti décrit l’orientation de la politique générale du pays et inspire l’action de l’Etat. Il contrôle l’action gouvernementale et du pouvoir judiciaire.», fait savoir l’analyste. 

La séparation des pouvoirs est-elle effective au Burundi ?

Les textes reconnaissent bien la séparation des pouvoirs. Mais en pratique, les choses ne sont pas si simples. Le président est en même temps le chef de l’exécutif et le juge suprême. Il préside d’ailleurs le Conseil Suprême de la Magistrature. « Les trois pouvoirs ne sont pas hermétiquement bien séparés », conclut l’expert. En effet, comme il le précise, l’exécutif dispose ainsi des moyens pour influer sur le judiciaire. Raymond Blaise Habonimana insiste néanmoins sur le fait que le décideur a l’obligation de garantir le principe de la séparation des pouvoirs, gage d’une vraie démocratie.

 

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