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Quand pénurie rime avec profit

Alors qu’une pénurie de carburant frappe durement le pays, la population en voit des vertes et des pas mûres pour se déplacer. Hélas, cette situation engendre des comportements ignobles, certains voulant tirer profit du malheur des autres. Cette blogueuse l’a appris à ses dépens.

Lundi, 17h. Après une journée épuisante de travail, je me rends en ville à la recherche d’un bus pour rentrer. L’espoir d’en trouver facilement relève de l’illusion. La sévère pénurie de carburant paralyse notre quotidien. Arrivée au parking des bus à 17h30, je découvre une file d’attente interminable. Je me mets sur le fil des bus qui desservent  Ruziba. Après une heure d’attente, un grand Coaster de la société Memento arrive enfin. Autant dire un miracle. Un sentiment de soulagement m’envahit. Vivement que j’arrive à la maison après cette longue et épuisante journée.

En embarquant un à un, sans désordre, j’ai l’espoir de trouver une place pour m’asseoir confortablement. Lorsque mon tour d’embarquer arrive, le bus est déjà plein. Le convoyeur nous demande de rester debout, autoritaire: « Egera inyuma muhagarare n’abari imbere ni muze ino inyuma haracariho ibibanza vyo guhagararamwo »  (Reculez et restez debout, ceux qui sont devant, avancez vers l’arrière, il y a encore des places).

10 000 BIF  pour pouvoir m’asseoir

Mon cœur se serre quand je réalise que je suis de ceux qui devront rester debout. La fatigue de la journée pèse lourdement sur mes épaules, et l’idée de ne pas pouvoir m’asseoir me décourage. Je m’accroche aux barres métalliques, m’efforce de trouver un peu de stabilité dans cette agitation, tandis que le bus démarre brusquement. Le balancement du véhicule, les soupirs des passagers épuisés et une chaleur étouffante ajoutent à mon épuisement. Chaque minute passée debout semble être une éternité. Je m’efforce de trouver un semblant de confort dans cette situation, en me disant que je serai bientôt chez moi.

C’est à ce moment qu’un policier et un homme, en pleine discussion, s’approchent de moi. Ils me demandent : « Mademoiselle, as-tu de l’argent dans ce sac à dos ? » Je reste bouche bée, étonnée par cette question inattendue. Après quelques secondes, ils me demandent 10 000 BIF en échange d’une place assise. Les personnes autour de moi semblent également étonnées. Surprise, je me demande pourquoi un policier se permettrait de demander une telle somme pour une place.

Avec une insistance déconcertante, le policier ajoute : « Donne-moi 5 000 BIF et je vais te trouver une place pour que tu ne te fatigues pas. » Je décline l’offre poliment mais fermement. Si quelqu’un doit me céder une place, ce sera gratuitement. Des rires moqueurs accueillent ma réponse. « C’est difficile d’obtenir de l’argent d’une fille. Si c’était un homme, il aurait déjà payé», commentent-ils.

Après une minute, je me surprends à réfléchir à la demande qui vient de m’être faite. Je me rappele alors de l’adage Kirundi : « Atagapfuye ntagakira ».

Les conditions difficiles poussent certaines personnes à profiter du malheur des autres.

 

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