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Le nouveau code minier à lui seul ne suffit pas

Il y a quelques années, Gitega a entrepris la réforme du code minier dans le but d’augmenter les revenus générés par ce secteur. Malheureusement, selon le professeur Gilbert Midende, le code minier à lui seul ne suffit pas. D’autres mesures sont nécessaires pour réussir ce pari. Analyse.

Au début du mois d’août 2023, le président Evariste Ndayishimiye a promulgué le nouveau code minier. Selon la loi des finances, Gitega prévoit que ce secteur apporte plus de 26 milliards dans ses caisses.  Dans une table ronde organisée lors de la journée des Nations Unies, le Professeur Gilbert Midende a décortiqué le secteur minier. « La contribution du secteur minier a été presque insignifiante jusqu’à présent. Elle représente entre 1 et 1,5 % du PIB. » 

Et pourtant, ajoute-t-il, ce secteur est considéré comme l’un des principaux axes de développement du pays et pourrait apporter une contribution significative à l’avenir. Cela se retrouve dans de nombreux rapports. Le discours politique actuel met également en avant les potentialités de ce secteur minier. « Quel est le problème qui se pose ? », s’interroge l’ancien ministre des Mines.

Avant de répondre à cette question, ce spécialiste donne une brève explication sur le potentiel des minerais au Burundi : « Tout d’abord, permettez-moi de faire une petite clarification, une petite parenthèse. Lorsque nous examinons les potentialités du secteur minier, nous distinguons deux choses. Il y a des indices, et non des minerais. » 

 L’absence de recherche…

Selon lui, au Burundi, il existe des indices de minerais qui ont une valeur unitaire très élevée, ainsi que ceux des minerais qui ont une valeur marchande assez moyenne. Qu’est-ce que cela signifie ? Les minerais qui ont une valeur unitaire très élevée sont ceux dont la production n’est pas très coûteuse. De plus, leur concentration et leur transport sont également peu coûteux. Il s’agit notamment de minerais tels que l’or, le tungstène, le tantale et l’étain.

Pourtant, d’après le professeur Gilbert Midende ces minerais sont également sujets à des exploitations minières artisanales. Ce qui les rend plus propices à la fraude parce qu’ils sont facile à exploiter, à traiter et à transporter.  De manière surprenante, ces minerais n’ont jamais fait l’objet d’une recherche sérieuse. « Aucune étude de faisabilité n’a été réalisée, par exemple, sur les minerais d’or présents au Burundi, du nord-est au nord-ouest.  De même, il n’y a pas eu d’études de faisabilité sur les minerais 3T, tels que la cassitérite, l’étain, le wolfram, qui ont une valeur très élevée.»  

Une activité minière artisanale florissante

De plus, il existe des minerais qui ont une valeur marchande moyenne. Ils sont difficiles à exploiter en raison des investissements lourds, des coûts de traitement et de transport élevés. Cela inclut des gisements tels que le nickel et les terres rares, selon les études menées par Professeur Gilbert Midende, une activité minière florissante, principalement artisanale, s’étendant du nord-est au nord-ouest. « Selon une recherche que j’ai faite, il y a une quinzaine d’années, environ 200 000 personnes travaillent dans ce secteur.»

En outre, il est estimé qu’il y a environ 200 artisans miniers, et pour obtenir une estimation plus précise, il est possible de multiplier ce chiffre par un certain facteur. « Et ce sont des activités qui génèrent beaucoup d’argent. », insiste-t-il.

Dans le cadre de ces études, notamment celles réalisées pour la Banque mondiale, à peu près une à deux tonnes d’or sont produites ici au Burundi. Cela revient, aujourd’hui, à plus de 120 millions de dollars issus des exploitations artisanales. 

Prof. Midende en est certain : « J’ai fait pas mal de conférences à ce sujet. J’ai partagé cela avec pas mal d’autres collègues, et il n’y a personne qui m’a contredit jusqu’ici.» 

Un secteur minier rapporte peu 

Selon Gilbert Midende, cela soulève des questions pertinentes : « Nous pouvons nous demander, ces 100 millions de dollars, où sont-ils ? Où se situent-ils dans l’économie du pays ? » Cela signifie que le secteur de l’artisanat minier est très important au Burundi.  Autrement dit, si le Burundi veut réellement voir ce secteur minier contribuer au développement économique du pays, il faut certainement promouvoir la recherche et l’exploitabilité de ces gisements à valeur marchande très élevés, qui, jusqu’à aujourd’hui, n’ont pas fait l’objet de recherches. 

En outre, il faut attacher une importance beaucoup plus accrue, beaucoup plus attentive à ces exploitations minières artisanales, en les formalisant. « Cela a existé ailleurs dans d’autres pays. On ne va pas inventer la roue. Et je suis convaincu que ces exploitations minières artisanales peuvent significativement changer la donne économique à court terme. »

D’après M. Midende, il y a des exemples, et même pas très loin de chez nous, qui ont réussi à mettre de bonnes pratiques en matière des exploitations artisanales. « Et de plus en plus, je prends même l’exemple de la Tanzanie, qui réussit assez bien dans son secteur de l’artisanat minier. D’autres comme l’Ethiopie.» 

La formalisation, une solution à court terme

Il s’agit des stratégies qui s’adressent à des minerais à valeur marchande très élevée. Ces innovations visent à amener l’artisan minier à travailler dans la légalité, tout en lui assurant un bon profit.  

D’après l’expert, il y a moyen, mais tout cela nécessite des préalables. Et un des préalables à réussir, c’est bien sûr la bonne gouvernance. Le secteur minier est généralement un secteur où il y a beaucoup de corruption. « L’un des préalables, c’est vraiment une volonté politique et une bonne gouvernance du secteur.»  

En ce qui concerne le nouveau code minier, professeur Gilbert Midende donne son point de vue : « C’est vrai qu’un code minier est déjà un élément très important. C’est un instrument de mise en œuvre des politiques minières et d’atteinte de ces ODD. Ce n’est pas le seul, malheureusement ».

D’ailleurs, un code minier ou les règlements miniers, comme on le dit souvent, ils ne valent que ce que valent les hommes qui les mettent en pratique. « Vous pouvez faire un très bon code, mais s’il n’est pas mis en pratique comme il faut, ça va rester lettre morte. »

 

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