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La médecine traditionnelle et les Burundais : un lien (im) mortel

Le Burundais est un être attaché à la tradition et ses croyances. Dans certains cas de maladie, l’on préférera l’avis d’un guérisseur plutôt qu’un docteur. Cependant, les conséquences peuvent être dramatiques. « Leur manière de procéder est vraiment douteuse… l’excès de ces médicaments peut même entraîner une hépatite virale. », alerte un médecin. 

C’est devenu presque banal d’entendre ces phrases : « Bamuhaye isumu », « Baramuroze », « bamuteye pese ». Pour dire qu’une personne a été empoisonnée, ensorcelée, etc.

Pascaline, une femme de 50 ans qui habite à Ruyigi, avait des douleurs abdominales. Une amie lui a conseillé d’aller consulter un guérisseur. Elle témoigne : « Quand je suis arrivée dans la maison du guérisseur, il m’a accueillie à l’intérieur. Pour détecter ma maladie, il m’a dit de me laver dans un liquide froid qui ressemblait à de l’eau. Mes veines se sont gonflées et il a conclu que j’avais été empoisonnée. Pour me soigner, il m’a donné des herbes hachées, de couleur marron. »

Plus tard dans la soirée, Pascaline n’a pas quitté son lieu d’aisance, car elle enchaînait des vomissements suivis des diarrhées. « Mon état s’est empiré et j’ai atterri dans les urgences médicales. » Quand un médecin a su ce qui lui était arrivé, il lui a formellement déconseillé de consulter les guérisseurs à l’avenir, car elle aurait pu y laisser la vie. Depuis ce jour, elle n’a pas remis les pieds chez un tradi-praticien.

Georges, un père de famille de 42 ans, souffre d’une maladie chronique depuis des années. À côté des médicaments prescrits par le médecin, il prend des plantes recommandées par un tradi-praticien, surtout les feuilles de vernonia (Umubirizi), bien que les médecins lui aient formellement déconseillé de recourir aux remèdes traditionnels.  « Même si je fais des rechutes, je ne peux pas m’en passer. C’est comme si les plantes traditionnelles avaient d’autres vertus, une plus-value par rapport aux comprimés qu’ils nous donnent à l’hôpital. », se justifie-t-il.

Des pratiques suspectes

« Nous accueillons des gens qui affirment avoir été ensorcelés et prennent le soin de consulter en premier les guérisseurs. Ils viennent chercher l’aide du médecin seulement lorsque les symptômes ne cèdent pas ou en cas de complications. », observe Dr A.D, un médecin prestant dans un hôpital de Bujumbura. 

Ce médecin se montre septique quant à la pratique de ces pseudo-soignants : « Leur manière de procéder est vraiment douteuse. Il paraît que c’est en touchant ou en léchant la paume de la main qu’ils peuvent diagnostiquer l’empoisonnement ou la maladie. Or, c’est à partir d’un examen clinique et des examens complémentaires qu’on peut vraiment diagnostiquer une maladie. »

Il alerte aussi sur ces remèdes que ces guérisseurs donnent aux malades : « Ces produits vont induire des vomissements fréquents et des diarrhées qui peuvent plonger la personne en état de déshydratation. Dans le pire de cas, suite à cette déshydratation, nous recevons des patients qui ont développé une insuffisance rénale aiguë. Aussi, l’excès de ces médicaments peut entraîner une hépatite. Des fois, ces personnes arrivent dans les urgences dans un état comateux et succombent quelques heures après. »

Ce clinicien n’est pas contre une médecine traditionnelle bien régulée. Si nous nous référons à la Chine, dit-il, ce domaine devrait être assuré par des experts en médicaments traditionnels qui pourront bien doser leur prescription. Du côté des décideurs, ils doivent prendre cette situation en urgence, car si ces mauvais soins des tradi-praticiens persistent, c’est la santé de toute la population qui est en danger.

 

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