L’industrialisation est un véritable levier du développement des pays. Néanmoins, au Burundi, l’industrialisation ne décolle pas. L’insuffisance des infrastructures, le climat des affaires peu favorable constituent quelques-uns des défis qui minent ce secteur.
La Banque Africaine de Développement (BAD) a publié fin 2022 son rapport sur l’industrialisation des pays africains. Le Burundi est classé 51ème sur 52 pays selon l’Indice de l’Industrialisation en Afrique, réalisé pour la période de 2010-2019.
Analysons d’abord l’apport du secteur industriel burundais à l’économie nationale. Il ne contribue que 17% du Produit Intérieur Brut (PIB) et emploie aux environs de 2% de la population. La part de la valeur ajoutée du secteur industriel dans le PIB n’a évolué que très lentement depuis des décennies. Elle est passée de 10% en 1971 à 15,1% en 2015, selon le rapport sur la compétitivité industrielle du Burundi.
Quels sont les défis auxquels fait face ce secteur ?
Les raisons sont multiples. D’abord l’insuffisance des infrastructures de base. Les infrastructures énergétiques font défaut au Burundi. Les entreprises burundaises font face au manque de l’énergie électrique pour faire tourner la machine. Le courant de la Regideso n’arrive plus à faire tourner les machines de certaines imprimeries par exemple. Ne parlons pas des coupures répétitives du courant qui paralysent même les petits métiers. Il faut souligner en passant que seul 10% de la population ont accès à l’électricité. Cela handicape par conséquent les activités de l’industrie manufacturière.
Au moment où le PND 2018-2027 prévoit que le Burundi aura besoin d’au moins 400 MW pour son industrialisation, la production actuelle de l’électricité ne tourne qu’au tour de 100 MW. Cette situation met à genoux le secteur industriel. La BAD estime d’ailleurs que le coût moyen de l’électricité pour les entreprises manufacturières est 4 fois plus en Afrique qu’ailleurs.
Sur ce volet infrastructure, les infrastructures de transport inadéquates ou mal entretenues freinent l’industrialisation du pays. Lors du forum national sur l’investissement du Burundi en novembre 2021, Dieudonné Dukundane, actuel ministre en charge des infrastructures (alors secrétaire exécutif du Corridor Central) avait déclaré que sur par exemple sur 19933 km des routes burundaises, 761 km était en bon état, environ 40%. Le reste nécessitait des interventions d’urgences qui couteraient environ 1,2 milliards USD. Le mauvais état des infrastructures cause des pertes aux investisseurs.
D’autres défis sont liés au climat des affaires peu favorable. Le financement est problématique. Le difficile accès au crédit est un défi pour les petites et moyennes entreprises manufacturières. Les taux d’intérêt effectifs moyens étaient de 15,3 % en 2020 selon les résultats d’un diagnostic du secteur privé fait par la Société Financière Internationale (IFC). Sur 190 pays, les derniers classements du Doing Business classaient le Burundi à la 176ème place pour l’accès au crédit. Le cout élevé des hypothèques empêche également les investisseurs du secteur privé.
Le manque de main d’œuvre qualifié, l’autre défi ?
C’est ce que laissent croire les industriels burundais. Selon Olivier Suguru, président de la CFCIB, les industriels ont du mal à trouver des compétences locales.
Le secteur industriel comme le secteur privé est également confronté à des défis liés à la faiblesse de la gouvernance. Le favoritisme et la corruption empêchent les industries naissantes de décoller. A ceci s’ajoute la problématique de change. Le tarissement des devises n’arrange pas les affaires pour les investisseurs du secteur.
La certification des produits burundais pose aussi problème. Certaines industries de transformation (surtout des jus) mettent sur le marché des produits sans contrôle. L’organe de régulation qui est le BBN présente des lacunes. Son système de certification n’est pas accrédité.
Le Burundi peut compter sur ses potentialités pour son développement industriel notamment son sous-sol riche, sa population jeune, sa pluviométrie (il pleut de 8 à 9 sur 12 mois). Les organisations régionales dont il est membre peuvent servir de marché d’écoulement. Mais, avant tout, il faudrait améliorer son environnement des affaires.