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Un gouvernement de transition n’est pas pour demain

Lors de la dernière session du dialogue inter-burundais tenue à Arusha, la question d’un gouvernement de transition a été soulevée par une des parties en conflit. « Ce qui risque de ne jamais arriver », analyse le blogueur Jean Marie Ntahimpera. Ce dernier propose une solution alternative.

À l’issue des récents pourparlers d’Arusha, le CNARED a demandé qu’il y ait un gouvernement de transition afin de régler la crise burundaise. Si cette proposition était acceptée, la crise actuelle pourrait se régler de la même manière que celle de 1993 soldée sur la signature de l’Accord d’Arusha en 2000 et celui de Cessez-le-feu en 2003: un gouvernement de transition a été mis en place en 2 tranches, la première dirigée par le président de l’époque Pierre Buyoya et la deuxième par Domitien Ndayizeye qui était issue de l’opposition.

Mais est-ce que ce scénario peut se répéter aujourd’hui ? Pierre Nkurunziza et le Cndd-Fdd peuvent-ils accepter qu’un politicien venant de l’opposition devienne vice-président puis président de la République dans le cadre d’une transition ? C’est très peu probable. 

L’un des éléments qui ont fait que le président Buyoya accepte de céder le pouvoir est que, avant tout, il était un président illégitime qui avait pris le pouvoir par un coup d’État. Toute la communauté internationale, y compris les pays de la région, faisaient pression sur lui, embargo à l’appui. 

Le troisième mandat de Pierre Nkurunziza est aussi illégitime, puisqu’il viole l’Accord d’Arusha et l’âme de la Constitution. Le problème est que certains des leaders de la Communauté est-africaine, y compris le médiateur Museveni, ne voient aucun mal à se maintenir au pouvoir, de la même façon que Pierre Nkurunziza. Ils n’ont aucune légitimité pour lui demander de quitter le pouvoir avant la fin de son mandat, et c’est pourquoi ils ne le font pas. 

Des rapports de force disproportionnés 

La deuxième raison qui a joué en faveur de la transition après l’accord d’Arusha est que les rapports de force entre le pouvoir et l’opposition armée étaient proportionnés. Les groupes rebelles étaient forts, disséminés partout dans le pays, et le pouvoir de l’époque était loin de gagner la guerre. Aujourd’hui, l’opposition politique est anéantie, et les groupes armés n’existent que de nom, ce qui fait que les rapports de force sont largement favorables au gouvernement. Ni les partis politiques de l’opposition, ni lesdits groupes armés ne peuvent rien faire pour obliger le gouvernement à accepter un gouvernement de transition. Les sanctions économiques imposées par certains pays ont montré leurs limites.  

Je ne suis pas en train d’encourager les opposants à prendre massivement les armes pour équilibrer les rapports de force parce que je sais que le prix à payer surtout en vies humaines n’a rien de comparable. Et comme on l’a  déjà écrit sur  cette même plateforme, si l’opposition parvenait à s’imposer par les armes, ce serait un nouveau cycle de dictature qui commencerait. L’histoire l’a prouvé, ceux qui prennent le pouvoir par la violence cherchent à le garder par la violence, et c’est pourquoi le Burundi est là où il en est aujourd’hui. 

Que faut-il faire ?

Un gouvernement de transition est incontournable pour remettre le Burundi sur les rails, mais il y a peu de chances qu’il voie le jour aujourd’hui. Alors je  suggère à l’opposition de proposer un deal, un plan B qui, peut-être, n’aura pas beaucoup d’acclamations. De un, laisser Nkurunziza terminer son mandat. De deux, exiger qu’il s’engage à quitter le pouvoir en 2020 et à ne pas modifier la Constitution. Et enfin, au lieu d’organiser de nouvelles élections, mettre en place un gouvernement de transition en 2020 sans Pierre Nkurunziza, et tenter de reconstruire le Burundi sur de nouvelles bases. Ce plan pourrait bénéficier du soutien sans faille de la Communauté est-africaine. Ainsi, faute de ne pas avoir pu empêcher Nkurunziza de briguer un troisième mandat, nous gagnerions en lui empêchant de briguer un quatrième.

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