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Financement des communes : 15 ans après, quel impact ?

Au Burundi, la gestion des communes constitue une grande problématique. Pour aider les responsables communaux à planifier des projets évaluables recommandés pour le budget programme désormais mis en avant par le gouvernement, l’Assemblée nationale a mis à leur disposition un plan de référence commun. Mais, quid de l’évaluation de l’impact des fonds de soutien versés aux communes depuis 2007 ? 

Dans la semaine du 22 au 24 mai, l’Assemblée nationale a procédé à la restitution d’un document (plan de développement communautaire) qui aidera les communes à bien élaborer leurs projets de développement. Ce document a un double avantage selon ses concepteurs. D’après l’honorable Nestor Ntahontuye président du groupe parlementaire permanent ayant les questions économiques dans ses attributions, « le but est de mettre à disposition des communes un outil qui leur facilitera dans la préparation des projets de développement. » A part cela, les députés estiment que cet outil servira de référence pour évaluer les projets. 

L’élaboration de ce document constitue donc un soutien technique important pour les administrateurs communaux. Pour chaque année, la commune devrait pouvoir justifier ses dépenses et dégager des outils nécessaires pour rendre ses performances assez lisibles.  Malheureusement, l’expérience démontre le contraire jusqu’ici. Si les communes ont bénéficié des fonds de l’Etat depuis 2007, il reste difficile de savoir quel en a été le résultat sur le plan du développement.

Le financement des communes en chiffres

Le programme de financement des communes ne date pas d’hier. Alors que le montant accordé aux communes pour appuyer leur développement était de 50 millions de Fbu depuis 2013, cette somme sera multipliée par dix pour atteindre 500 millions pour chaque commune. Au niveau national, le pays devait donc débourser plus de 59 milliards de Fbu pour l’ensemble des 119 communes. En 10 ans, ce programme a déjà coûté environ 595 milliards de Fbu, rien qu’en considérant les sommes uniquement octroyées aux communes, sans les frais de fonctionnement qui doivent aussi être considérables. Si l’on comptabilise ces chiffres depuis le début du programme en 2007, on trouve un chiffre largement supérieur à 630 milliards de Fbu.

Qui de la gestion de ces fonds ?

Il est légitime de se demander quelle est la contre-valeur de ces fonds déboursés chaque année par l’Etat. D’après l’exposé du groupe parlementaire lors de la restitution du Plan Communal pour le Développement Communautaire (PCDC), il n’était pas auparavant facile d’évaluer les projets développés par les communes. 

A voir tous ces efforts investis par le gouvernement, il fallait évaluer l’impact produit durant ces 15 ans de financement et de subvention. Cependant, l’enquête menée par le FONIC fin 2022 lève le voile sur une situation assez inquiétante.  Dans un article publié sur son site le 21 décembre 2022, le ministère de l’Intérieur confessait : « Avec les études menées par le FONIC, le constat a été que les statistiques sont très faibles, car il y a peu de données fiables pour évaluer l’indice de progrès des domaines dans lesquels le gouvernement est en train d’investir ».  

Dans ce texte, le FONIC n’y va pas de main morte : « Il n’y a même pas d’indicateur ou d’information qui peut aider à classer le progrès de développement des communes et surtout le développement communautaire », peut-on y lire.

Il fallait d’abord évaluer le projet

Si le gouvernement est maintenant dans l’incapacité de rétablir les faits et d’évaluer l’impact économique de tout cet argent injecté dans les communes, cela signifie qu’il y a eu une certaine défaillance. Nous pouvons dès lors nous demander pourquoi le gouvernement a décidé en 2013 de multiplier ces financements par 10 sans avoir préalablement évalué le projet. Ce qui est sûr, la gestion des deniers publics au niveau des communes reste très problématique.

Nous avons encore en mémoire l’histoire de «  la semaine témoin » en début de l’année 2021, lorsque le ministre de l’Intérieur d’alors a décidé de chasser tous les percepteurs des taxes communales. Dans la municipalité de Bujumbura seulement, 121 millions de Fbu supplémentaires avaient été collectés en une semaine. En avril 2021, Gervais Ndirakobuca ministre de l’Intérieur de l’époque a annoncé la destitution de tous les comptables communaux en pleine réunion avec les gouverneurs et les administrateurs. Il les accusait d’avoir handicapé la collecte des recettes communales en complicité avec les anciens percepteurs précédemment démis de leur fonction. Une preuve supplémentaire d’une gestion lacunaire des fonds alloués, d’où la nécessité d’un accompagnement technique. 

 

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