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Sans l’entretien des infrastructures, que deviendra la vision 2040-2060 ?

Comment espérer atteindre le statut de pays émergent en 2040, puis de pays développé en 2060, si nous ne pensons pas à l’entretien de nos infrastructures ? Honnêtement, cela relèverait du mirage. Muti gute ?

Récemment, le journal Ikiriho a posté un thread dont le titre est évocateur : « Bujumbura : Capitale économique oubliée, ville livrée à elle-même ? ». Ikiriho fait un état des lieux sans concession de l’aménagement de la ville de Bujumbura. Il revient tour à tour sur les infrastructures vétustes, le désordre caractérisant le transport, l’insalubrité, etc.  Mais ce n’est pas Bujumbura seulement qui a le problème d’entretien des infrastructures.

Il n’y a pas longtemps, un internaute a réagi à un tweet expliquant pourquoi les travaux de finition du stade de Bubanza stagnent depuis cinq ans, précisant qu’il leur manquait 500 millions de BIF pour achever les travaux. Il a commenté : « Cela signifie que même si on termine ce stade, ils ne pourront pas l’entretenir, autant l’abandonner. » Entretien ? En lisant cela, j’ai ri, si seulement l’entretien faisait partie de nos habitudes !

Un constat amer

Il y a peu, je me suis rendue à l’Université du Burundi pour une activité. Nostalgique, je me suis aventurée vers les pavillons, un lieu chargé de souvenirs, où j’ai vécu mes peines, mes espoirs et ma fatigue. Mais le décor a hélas bien changé, et pas en bien. Une corbeille à ordures, autrefois vidée chaque matin, débordait de déchets avec des mouches tournoyantes autour. En arrivant aux toilettes, une file d’attente ! (Ntaco tutazotondera ndabarahiye!) Une amie me glisse : « Une seule fonctionne… »

Trois ans plus tôt, il y avait trois WC à siège. Déjà à l’époque, ils ne fonctionnaient pas bien, mais aujourd’hui, un seul tient encore debout. Les autres ? Juste des dépotoirs de plastiques.

Avant, il y avait des planches qui servaient de murs assurant un minimum d’intimité. Aujourd’hui, elles ont disparu, et pour signaler sa présence, il faut chantonner ! Le plus préoccupant ? Cet étage du pavillon compte une vingtaine de chambres, et chaque chambre accueille plus d’une personne, ouais, erega haga imitima ! Toutes doivent donc se partager ce seul WC encore fonctionnel. L’amie me confie:« On a toutes peur d’y aller. J’ai déjà eu des infections. On l’a signalé, mais rien n’a changé. C’est toujours difficile de faire venir les réparateurs ici. Parfois, même les portes de nos chambres ne fonctionnent pas et nous sommes obligées de nous débrouiller ou de les faire réparer nous-mêmes. »

Le cas n’est pas isolé…

Parfois, je n’aime pas prendre l’exemple de Rumuri, car de nombreux articles ont déjà évoqué cet endroit sous différents aspects, et j’ai l’impression de ne rien vous apprendre de nouveau. Jetons un coup d’œil au-delà, vers les autres infrastructures publiques. Les routes, par exemple, avez-vous déjà pris la route Bujumbura-Bubanza ou Bujumbura-Kabezi ? Tout commence par de petits nids-de-poule négligés jusqu’à ce que toute la chaussée se dégrade. Les feux tricolores ? Un à un, ils ont cessé de fonctionner, au point qu’à certains carrefours, on a oublié qu’ils existaient. Mais bon, on s’est habitué aux policiers qui gèrent la circulation maintenant !

L’éclairage public ? Qui se souvient encore du projet d’installation des lampadaires dans les quartiers ? Certains fonctionnent encore (chapeau !), mais sur certaines avenues, comme l’avenue de la Mort, les lampadaires sont morts, laissant place à une obscurité totale.

Et les poubelles publiques ? Certaines sont pleines depuis si longtemps que le sol a pris le relais ! Dans d’autres endroits, elles sont trouées, et ce que vous jetez finit directement par terre.

Et si on pensait à l’entretien ?

En parcourant la fameuse vision 2040-2060, j’ai découvert un programme ambitieux, avec même des infrastructures régionales. Mais soyons réalistes : si nous ne sommes pas capables d’entretenir ce que nous avons déjà, comment prétendre atteindre cette vision ? L’entretien n’est pas une option, c’est une nécessité. Sinon, adieu 2040-2060 !

 

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