Du riz burundais offert en don au peuple zambien en débat au parlement zambien d’un côté et des jeunes burundais arrêtés par la police zambienne de l’autre, ces deux dernières actualités n’ont pas laissé indifférent ce blogueur qui trouve que le moment est peut-être venu d’activer le levier de la diplomatie économique prônée par Gitega.
Dans un monde en perpétuel conflit, petit pays qu’il est, le Burundi assure avoir choisi son camp, celui de la neutralité et ne jure que par la diplomatie économique. Albert Shingiro se tue à le faire comprendre. Mais est-elle déjà effective, cette diplomatie ? Vous devez vous dire : pourquoi ce pauvre blogueur nous ramène tout ce baratin comme s’il voulait nous servir une leçon de relations internationales ? Eh bien, je vous comprends, moi-même j’aurai réagi comme vous. Mais croyez-moi, c’est lié à ce que je veux exprimer à travers ces lignes. Pour des curieux comme moi, le dernier débat dans l’hémicycle du parlement zambien n’est sûrement pas passé inaperçu.
L’hôpital qui se moque de la charité ?
Le riz burundais, les 5000 tonnes offertes gracieusement au « pays frère » qu’est la Zambie n’ont pas fini de faire parler d’eux. Entre ceux qui ne comprennent pas comment un pauvre pays, le dernier, selon les classements internationaux, se permet d’aider et ceux qui soupçonnent même du poison contenu dans notre aide, il faut dire que le don n’a pas fait que des heureux du côté de la Zambie. Et les critiques ne sont pas venues de la seule Zambie. Au Burundi, alors que l’inflation bat des records avec le coût de la vie devenu intenable, la pilule a du mal à passer. Difficile d’imaginer le Burundi offrant un don d’un produit devenu trop cher pour la bourse d’un Burundais lambda. Eh oui, s’offrit un kg de riz à 4000 BIF chaque jour, ce n’est vraiment pas à la portée de tout le monde.
Mais au-delà de ces critiques, je me suis rappelé de l’Eldorado que représente ou représentait la Zambie pour les jeunes burundais et je me suis dit : puisque les pays n’ont pas d’amis, mais des intérêts. Et si ces relations d’amitié et d’entraide entre le Burundi et la Zambie servaient à créer une occasion propice à la concrétisation de la diplomatie économique au profit des jeunes burundais qui galèrent en Zambie ?
Muti gute (Comment) ?
Un don pour un pays qui accueille sur son territoire de jeunes burundais partis à la recherche de l’Eldorado que représente le pays de Hichilema, quoi de plus normal, dites-vous ? Mais est-il toujours de l’Eldorado quand on sait à quel point nos jeunes jouent au chat et à la souris avec la police pour pouvoir faire ce dont ils sont partis faire, le petit commerce ? C’est justement le but de ce bruit que je fais à travers ces lignes. Ce dimanche, alors que je faisais la queue à une station-service, je me suis mis à la chasse de l’actualité de la semaine, histoire de tuer le temps. Alors que je scrollais, je suis tombé sur ces images des jeunes burundais chassés comme des malpropres, leurs maigres biens faits de vélos et de houes ayant été embarqués dans des véhicules de la police. Je vois certains d’entre vous avancer leur devoir de se conformer à la loi du pays hôte. Croyez-moi, je n’ai pas envie de vous contredire, mais c’est là où j’aimerais interpeller notre patron de la diplomatie.
Le temps d’activer le levier de la diplomatie économique ?
C’est évident, la Zambie est devenue une terre opportunité pour des Burundais, des jeunes en l’occurrence. Pourquoi ne pas négocier avec nos frères zambiens des mesures d’assouplissement à même d’alléger les conditions exigées pour faire du commerce dans ce pays avec lequel nous partageons l’appartenance de la Comesa, une communauté dont nous accueillons bientôt le sommet ? Un pays pour lequel on n’hésite pas de puiser dans notre maigre récolte pour lui venir en aide refuserait-il de se montrer un peu plus flexible pour arrêter des mesures qui institueraient des facilités en faveur de nos compatriotes ? N’est-ce pas le moment d’activer le levier de la diplomatie économique censée guider les relations avec le reste du monde ?
En janvier 2018, dans les colonnes de Yaga, je parlais de la Zambie comme nouvel Eldorado pour les jeunes burundais qui ne tarissaient pas d’éloges pour le pays qui les a bien accueillis. En 2024, si le pays reste hôte de plusieurs compatriotes, ils sont nombreux à regretter des conditions difficiles dans lesquelles ils travaillent. Sûrement qu’ils aimeraient voir leur pays, à travers les voies appropriées, se mêler de la question, au nom de la diplomatie économique.
La diplomatie burundaise tranquillise
Le ministère ayant les Affaires étrangères dans ses attributions met les pendules à l’heure. Pour lui, le levier de la diplomatie économique est déjà en marche. Et de rappeler les résultats de la visite du président burundais en Zambie qui a eu lieu du 1er au 3 août. Lors de cette visite, « les chefs d’Etat se sont engagés de mettre en place une commission ad hoc mixte chargée d’examiner la situation des Burundais en situation irrégulière ou en conflit avec la loi du pays hôte, en vue de trouver des solutions durables à cette situation », tranquillise le ministre Albert Shingiro. Il fait savoir à ce sujet que le Burundi a déjà constitué son équipe et attend le feedback de la partie zambienne pour s’y rendre. « Par ailleurs, nombreux sont des Burundais qui vivent dans ce pays régulièrement et certains d’entre eux sont prospères », souligne ce chef de la diplomatie burundaise.