En costume noir sur mesure, le club culturel Amagaba apparaît sur piste, bois « sacré » sur la tête baguettes en bois dans les mains. C’est à l’occasion de l’ouverture du festival de théâtre « Buja Sans Tabou »(BST). L’accoutrement crée polémique ! Le ministère qui a la culture dans ses attributions prend position : le festival est suspendu !
« Depuis quand le tissu en coton est une tradition burundaise ? L’écorce de ficus (impuzu y’igiti) là on l’oublie comment ? », réagit Alain, un jeune étonné par la décision du ministère des affaires de la communauté est-africaine, de la jeunesse, des sports et de la culture qui, au nom de la protection, la préservation et la sauvegarde du patrimoine culturel burundais, a jugé le dress code des Amagaba comme « ne respectant pas les principes sacrés de la danse emblématique d’Umurisho w’ingoma. »
Normalement, la tenue officielle des tambourinaires est constituée de trois tissus à trois couleurs : le blanc, le rouge et le vert ; couleurs représentant le drapeau national burundais. Alors voir toute une troupe de tambourinaires en costume et cravate était du jamais vu au Burundi.
BST réagit
En réaction à l’annonce de la suspension du festival, l’équipe Buja Sans Tabou sort un communiqué dans lequel elle dégage un sentiment d’incompréhension un peu comme Galilée et sa théorie de la terre qui tourne autour du soleil. Dans les premières lignes de son communiqué, BST présente une ouverture de festival« marquée par une splendeur de l’art et de la culture. »
Dans le même communiqué, BST présente ses excuses auprès du grand public et du ministère ayant la culture dans ses attributions mais explique que la scène des tambourinaires en costume « n’était que pour illustrer ce grand contraste d’une culture qui entre dans une autre ».
Les idées divergent
« C’était une bonne mais mauvaise idée vu que le tambour est la seule chose (sinon la principale attraction) que nous pouvons exhiber à l’étranger. »souligne Yvan, jeune diplômé de l’Université.
« Moi d’un côté je les comprends. Si nous nous plaçons dans leur contexte, c’est sans tabou ! », défend Christa, une jeune bujumburoise. Selon Mademoiselle, déjà accepter que Buja Sans Tabou existe c’est accepter que ce qui s’est passé se passe. Mu bisanzwe !-normalement.
Dans la matinée, Pierre Nkurikiye, porte-parole du ministère de la sécurité et des affaires intérieures avait crié au sacrilège et réclamé même des sanctions. Prière exaucée : Buja Sans Tabou suspendu !
D’autres se demandent si jamais ils auraient demandé la permission de porter les costards. À en croire le communiqué de BST sorti après la suspension du festival, il n’est nulle part mentionné que la permission avait été demandée d’avance. Mais était-ce vraiment nécessaire alors que même certaines autorités se permettent parfois de donner quelques coups d’umurisho au « sacré » Ingoma en costard ? Alors que des touristes s’amusent à reproduire le son du tamtam burundais parfois en tenue peut-être plus condamnable que celle de ville ?
Je vais chuter par des extraits d’un long commentaire d’un internaute, Joël Omega, sur la vidéo de ces tambourinaires s’exhibant en tenue de ville : «Jje viens de regarder le début de la vidéo et je n’ai pas pu continuer… plus nous prendrons les choses à la légère, c’est comme ça même que notre culture disparaîtra… qu’ils cessent de courir derrière l’argent des blancs en jouant ces pièces de théâtre… ».
Le théâtre est le rayonnement culturel. Un artiste toujours donne son « Point de Vue ». Sacrilège à condemner mais « Point de Vue » à questioner, mais pas condamnable.
Vraiment, je pense qu’il y a eu une erreur dans la preparation du festival car selon moi il ne pouvait pas mener un tel jeu avec le tambour sacré, c’etait alors pou montrer que meme ce que les autres considerent sur le tambour peut etre bafoué par un groupe de gens
La vie est injuste.
« Dura lex, sed lex ! Clair comme de l’eau de roche »
Des entêtement, des incompréhensions, des déceptions d’une part et des acclamations, un enthousiasme sans précédent d’autre part. La récente décision du Ministère ayant la Jeunesse, les sports et la Culture dans ses attributions de suspendre le festival Buja Sans Tabou a fait couler beaucoup de salive.
Hélas, le « Peuple » choqué par une prestation hors du commun, une exhibition ostentatoire allant au-delà des sentiers battus a hurlé, a jugé, et a exigé que l’État se charge de recadrer et de punir s’il le faut, pour servir d’exemple, ces gens qui se permettent de désacraliser le tambour sacré : Un joyau national qui fait la Grandeur Culturelle du Burundi. Face à un débat houleux, la toile enflammée par ces évènements n’a pas attendu longtemps avant d’avoir un verdict du Ministère. Non, seulement le Festival BST est suspendu, mais aussi le Groupe des Tambourinaires de la troupe « AMAGABA » est mis en quarantaine pendant six mois, ne disposant pas à cette effet aucune autorisation de participer aux activités culturelles et ne pouvant pas s’associer aux Autres Acteurs ou Associations exhibant la culture Burundaise. Avec Effet immédiat, au bled, la Consigne est la Consigne.
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« MEMOIRES, MEMOIRES, Un peu d’histoire ne tue pas…….. »
Certes, Le tambour, au Burundi, c’est beaucoup plus qu’un simple instrument de musique, c’est un objet sacré, relié à la tradition royale et inscrit au patrimoine immatériel de l’humanité de l’UNESCO.
Autrefois, nos ancêtres battaient le tambour en tenue locale et traditionnelle par excellence « L’écorce de Ficus » (Impuzu z’ibiti). Ce n’est qu’au sortir de la colonisation, dans les années 66, que l’Etat a demandé à ce que la tenue officielle qui devrait accompagner les tambourinaires se conforme aux couleurs tricolores du drapeau national.
La règle nouvellement admise a duré bien des années jusqu’à ce que les choses prennent une autre tournure dans les années 90 où la culture fut malheureusement politisée. Dorénavant, c’était fréquent de voir des tambourinaires en tenue partisane d’un parti politique. A ce stade, la tradition liée au tambour sacré de GISHORA perdait à petit feu, toute sa saveur.
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« BASTA. Et si l’on limitait l’art ? Un regard libéral et artistique »
Je définis l’art comme un moyen d’expression quel qu’en soit la discipline. C’est un moyen d’expression qui doit donc générer l’émotion ou la remise en question de celui qui en est témoin. Dans ce contexte, l’art entraîne forcément une émotion forte et douloureuse mais assortie d’une dimension esthétique (artistique, harmonieux, beau, …). En effet, l’art ne fixe pas de limites, ce sont les gens qui les fixent. L’intention de l’artiste et sa vision de sa création importent pour que l’art dans toute sa splendeur fasse éclats.
L’étendue culturelle joue en effet un rôle important de mémoire, elle constitue la pierre angulaire de la cohésion sociale d’un pays. Le patrimoine culturel d’un pays, est le reflet du passé, mais surtout du présent. Ce dernier questionne sur ce qu’on estime important de transmettre aux générations futures.
Nous sommes d’accord, chers artistes, que tout burundais lambda ayant assisté à la scène virale de la troupe AMAGABA a crié haut et fort à la désacralisation du Tambour sacré… ! Les neurones ne devant pas servir uniquement à Hercule Poirot, soyons moins superficiels et questionnons-nous : Est-ce que tout le monde doit comprendre la visée de notre œuvre ? Qu’aurait dit A. BARANSHAKAJE l’As du Tambour Sacré au Burundi sur la tenue conformiste de l’humain « occidental » lambda que portait les tambourinaires du club AMAGABA durant cette « prestation », le splendide étant toujours saugrenu, qu’aurait été la réponse d’un parent face à une question insistante d’un enfant ignorant et ne sachant pas trop pourquoi et pour la première fois de sa vie il assiste à une scène où des tambourinaires battent le tambour en tenue de ville ? Chers confrères et consœurs admettons qu’on a chamboulé un certain Trend en vogue sur les RS.
En l’état actuel de mes connaissances, il me semble important que penser avec le petit nombre et se faire entendre de la masse nous sera toujours bénéfique. Que nos aventures, nos plaidoiries et nos interventions prennent en compte la conjoncture en lice avant d’être présentés au grand jour.
Entre le bon et le mauvais, entre le vrai et le faux, entre le sacré et la calomnie, … y a un grand vide ? La tradition, le sacré, … oui. Mais la critique aussi! C’est ce qui permet aux sociétés d’avancer … Quelques des questions qui se posent … (1) qu’est-ce que le tissu en coton porté par les tambourinaires a de traditionnel et de culturel burundais, si j’embraie sur le commentaire de Alain? (2) Que voudrait signifier le port du costume porté par le groupe Amagaba, n’est-ce pas une critique en soi? (3) Que répondons-nous à cette critique ? (nous : burundais citoyens, burundais locataires des institutions garantes de …) et si nous -Burundais-Institutions et citoyens- nous nous fâchions contre tout ce qui ressemble à ce costume et qui pèse sur notre pays, Etat, nation? Il y a de vraies questions, fondamentales et qui pèsent d’une réalité qui nous est plus facile de se voiler au lieu de s’en prendre à une critique d’un symbole piétiné… et je ne pense pas que ce soit ces artistes qui piétinent le tambour burundais!
Si le tambour est toujours un symbole, et que ce qu’il représente est piétiné, faut-il punir celui qui pointe ce piétinement, ou faudrait-il piétiner celui qui piétine le « symbolisé » ?
… des « gens » offrent en cadeau des tambours, petits tambours, ils restent des symboles, (non ?) Mais j’ai jamais vu un petit doigt se lever pour interdire cette pratique d’offrir « le Burundi en son symbole »!
C’est grave !
Et puis, c’était un festival qui se veut « sans tabou » ! Justement ! Le tabou pèse trop !
Entre le bon et le mauvais, entre le vrai et le faux, entre le sacré et la calomnie, … y a un grand vide ? La tradition, le sacré, … oui. Mais la critique aussi! C’est ce qui permet aux sociétés d’avancer … Entre autres questions qui se posent …
(1) Qu’est-ce que le tissu en coton porté par les tambourinaires a de traditionnel et de culturel burundais, si j’embraie sur le commentaire de Alain?
(2) Que voudrait signifier le port du costume porté par le groupe Amagaba ? Quel message renvoie ce costume ?
(3) Que répondons-nous à ce message / cette critique ? (nous : burundais citoyens ordinaires, burundais locataires des institutions garantes de …)
(4) Qu’est-ce-qui est froissant dans ce costume ?
(5) et si nous -Burundais-Institutions et citoyens- nous nous fâchions contre tout ce qui ressemble à ce costume et qui pèse sur notre pays, Etat, nation?
Il y a de vraies questions, fondamentales et qui pèsent d’une réalité qui nous est plus facile de se voiler au lieu de s’en prendre à une critique d’un symbole « piétiné »… et je ne pense pas que ce soit ces artistes qui piétinent le tambour burundais, ils nous ont fait un clin d’œil !
Si le tambour est toujours un symbole, et que ce qu’il représente est piétiné, faut-il punir celui qui pointe ce piétinement, ou faudrait-il punir celui qui piétine le « symbolisé » ?
… des « gens » offrent en cadeau des tambours, petits tambours, ils restent des symboles, (non ?) Mais j’ai jamais vu un petit doigt se lever pour interdire cette pratique d’offrir « le Burundi en son symbole »!
C’est grave quand même !
Et puis, c’était un festival qui se veut « sans tabou » ! Mais, on veut absolument garder sous le parapluie du tabou ! Il pèse trop, le tabou !