On parle souvent de junkies mais on oublie toujours de mentionner une autre catégorie de victimes : les familles des consommateurs de boost. Entre incompréhension, désespoir et fatalisme, elles se sont confiées au blogueur Jean Blaise Migabo.
Si le mot boost semble ne pas signifier grand-chose pour certains, pour d’autres il a un goût amer car entaché de mauvais souvenirs. C’est le cas de Michel. À l’évocation de boost, il se mure dans un silence avant de lâcher, « ntivyoroshe kibondo » (ce n’est pas facile mon enfant, Ndr). Ce père dans la cinquantaine a eu un enfant qui prenait de cette drogue. Il raconte : « Je n’ai su qu’un peu tardivement. Il fréquentait d’autres jeunes du quartier, quelque chose que je trouvais normal. Un jour je l’ai surpris avec une cigarette, je me suis dit que c’est peut-être une crise d’adolescence, que ça va passer. Quelques jours après, j’ai commencé à remarquer un changement de comportement : il rentrait tard. Arrivé à la maison, tantôt il était trop calme, tantôt trop agressif. »
Sur le moment, le parent se contenta d’un rappel à l’ordre et de quelques conseils jusqu’à ce jour où le comportement de son fils prend une autre tournure: il le surprit en train de voler dans l’entourage. Sonné, le père lui demanda ce qui ne va pas. L’adolescent resta coi. « Ce n’est que par l’entourage que j’ai appris qu’en fait mon fils se droguait et qu’en plus il prenait une drogue chère, le boost. Il volait donc pour s’en acheter. Il en était devenu complètement dépendant », confie-t-il.
Pour se mettre à l’abri de l’agressivité et des vols répétitifs à la maison, le père décida de construire une petite maison annexe juste pour son fils, pour que ce dernier ne mette plus les pieds dans la maison principale : « Imaginez vivre et surtout dormir la nuit avec la hantise d’être réveillé parce que quelque chose a disparu dans l’entourage avec comme premier suspect votre fils», se rappelle-t-il douloureusement. Et comme le jeune homme continuait à se droguer, la famille s’attendait toujours au pire, qui ne tarda pas à arriver. Un soir comme les autres, les voisins vinrent frapper à la porte : « Alors que je m’attendais à une énième fouille, on venait plutôt m’annoncer la mort de mon fils. Il avait été atteint à mort par les balles d’un policier qui gardait la maison où il était allé voler», se lâche le parent dans une voix meurtrie par le chagrin. Une double peine : la perte d’un fils et un déshonneur. Ce dernier était mort en volant, « comme s’il manquait de quoi que ce soit chez moi. »
Aller sans retour
Même son de cloche chez Anastasie qui a aussi un fils qui prend du boost. Elle a découvert le mal de son garçon quand celui-ci fut admis dans un hôpital pour des problèmes psychiatriques. « Quand les médecins m’ont dit qu’en fait mon fils n’était pas fou mais qu’il se droguait, qui plus est par des injections, j’étais abasourdie et je refusais d’y croire», raconte-t-elle. Mais la femme entre deux âges revient à la raison. Elle se dit que son fils avait une compagnie d’autres jeunes assez louches et que ça venait de là peut-être. Le frère de ce jeune homme, parti pour un temps à l’extérieur du pays, dit avoir failli ne pas le reconnaître: « Il était devenu tellement maigre et avait perdu ses facultés intellectuelles d’antan », dit-il. Le jeune junkie sera mis en séances de désintoxication et connaitra quelques améliorations avant de replonger comme c’est le cas pour la plupart des consommateurs de boost qui vivent dans un cycle de crise-accalmie.
Michel, Anastasie ont eu « la chance » d’avoir leurs fils sous leur toit. D’autres voient leurs enfants disparaitre du jour au lendemain. Ces derniers vont s’établir dans ces hotspots où se vend et se consomme le boost, se shootent et fument à longueur de journée, puis se livrent au banditisme pour se payer leur dose. Un aller quelques fois sans retour.
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