Les activités de production du sucre par l’unique société sucrière du pays ont été suspendues pour la campagne en cours. Les autorités compétentes évoquent des inondations qui ont envahi les champs de culture de canne à sucre. Le retard (d’un mois) du début de la campagne serait l’origine de tout. La ministre en charge du commerce annonce la libéralisation de l’importation du sucre, mais doute sur la disponibilité des devises.
La Sosumo, l’unique société de production du sucre au Burundi se trouvant dans la commune de Bukemba de la province Rutana a suspendu ses activités. La direction générale de la Sosumo évoque de fortes précipitations qui ont forcé l’arrêt des activités. Sur les ondes de la Radio Bonesha Fm, Aloys Ndayikengurukiye, directeur général de cette société, a précisé qu’au seul mois de novembre 490 mm ont été enregistrés contre 98 mm au même mois de l’année précédente. « La quantité des pluies s’est multipliée par 5 », a-t-il ajouté, ce qui a causé les inondations des champs de cultures. Il est donc impossible aux tracteurs de transporter les cannes à sucre coupées.
Lundi le 12 décembre, dans une séance des questions orales des députés aux différents ministres, Prosper Dodiko, ministre en charge de l’agriculture, a confirmé l’arrêt des activités suite aux fortes pluies.
Le retard de la campagne y est pour quelque chose
Une source de Yaga au sein de la Sosumo confirme également les raisons avancées par ces autorités et nous procure d’autres de détails. Les activités ont été suspendues précisément le 4 décembre. Selon K.N, ce sont les rivières Malagarazi, Mutsindozi et Muyomvozi qui ont débordé, envahissant par la suite les champs de canne à sucre.
Une autre grande précision est le retard du début de la campagne, souligne-t-il. « La campagne de récolte qui était précédemment lancée le 15 juin a connu un retard de plus d’un mois. Cette année, elle a débuté le 21 juillet ». Ce retard est causé par l’entretien des machines. La campagne de production allait se boucler avec la fin de ce mois même. En ce moment, 13,700 tonnes sont disponibles sur une prévision de 20 tonnes, informe K.N
L’arrêt des activités de production vient enfoncer le clou dans la plaie des consommateurs du sucre. Il intervient au moment où s’observait durant ces derniers mois, une persistante pénurie du sucre. Réagissant aux inquiétudes des députés, Marie Chantal Nijimbere, ministre en charge du commerce, promet comme solution la libéralisation de l’importation du sucre. « Des commerçants capables pourront importer le sucre librement », affirme-t-elle devant les députés. Toutefois, elle évoque la problématique de tarissement des devises. Rappelons que la Sosumo détenait jusqu’ici le monopole de l’importation du sucre au Burundi.
La modernisation se fait toujours attendre
Si la problématique des pluies intenses paralyse les activités, la Sosumo connaît des défis de production depuis des années. Malgré ses efforts dans l’augmentation de la production (passant de 4 658 tonnes en 1988 à 20 434 tonnes 2020), l’offre ne satisfait toujours pas la demande. Pour combler le déficit, cette société se rabat toujours sur les importations. En 2020, 52 % du sucre consommé était importé, soit 785,1 tonnes. Au cours du premier trimestre 2023, le sucre était en tête des importations parmi les produits sensibles (sucre, maïs, riz, farine de blé, etc.) soumis à une tarification spéciale telle que définie dans la deuxième partie du Tarif Extérieur Commun de la Communauté d’Afrique de l’Est. La valeur de son importation représentait 44,7 % des produits sensibles, soit 8,5 milliards de Fbu.
Ces dernières années, le gouvernement avait affiché la volonté de hausser la production. En 2021, le gouvernement prévoyait de débourser environ 106 milliards de Fbu pour la réhabilitation et la modernisation-extension de l’usine ainsi que 26 milliards de Fbu pour l’implantation d’une distillerie. Le gouvernement comptait recourir à des financements extérieurs pour importer les équipements. Cependant, ce projet n’est pas encore mis en œuvre, sauf quelques actions d’extension de culture de canne à sucre (qui se sont arrêtées par après), selon toujours notre source à la Sosumo. Par ailleurs, en vue de redynamiser la société, le gouvernement avait affiché en 2018 la volonté de céder 53, 68 % de ses actions aux privés.
Avec une population qui ne cesse de croître, le gouvernement devrait prendre au sérieux la modernisation de cette société pour suivre la cadence de la démographie galopante.