21 décembre 1981. C’est la date d’adhésion du Burundi au COMESA. A deux mois de la célébration de 43 ans d’anniversaire de son appartenance à cette missa solemnis de l’intégration économique et du développement régional, le Burundi abrite son 23 ème sommet, du 28 au 31 octobre 2024. Au-delà des décors, des sourires, des costumes stylés et des discours diplomatiques, quel palmarès affiche le Burundi dans ce grand espace du commerce et des affaires ? Analyse.
C’est l’un des évènements les plus importants que le pays « du lait et du miel » organise sur son sol cette année. Ouvrons ce chapitre avec quelques antécédents de l’évènement actuel.
Si le 23ème sommet se tient bel et bien au Burundi, un autre du genre a, dans le passé, été annulé à la dernière minute. Cela pour des raisons de « sécurité » des Chefs d’Etats qui devraient y prendre part. C’est le 20e sommet qui devait se dérouler du 1er au 10 juin 2018. Il a été reporté 10 jours avant sa tenue et délocalisé vers la Zambie pour le mois suivant. Comme l’avait expliqué Sindiso Ngwenya, alors secrétaire général du Comesa, « le Burundi n’avait pas rassuré » les Chefs d’Etat sur leur sécurité à Bujumbura. Seuls 4 Chefs d’Etats avaient confirmé leur participation alors qu’ils devraient être, au minimum, 13.
Depuis, le Burundi ne cessait de réclamer le remboursement des dépenses engagées dans les préparatifs de ce sommet. En 2019, la secrétaire générale de ce bloc, en visite au Burundi, avait promis que son organisation est prête à rembourser les dépenses des préparatifs de ce sommet délocalisé. La question qui reste pendante est celle de savoir si le remboursement a été fait comme promis par Chileshe Mpundu Kambwewe ou pas. Mais également le comment.
Un positionnement stratégique mitigé
Les Chefs des Etats membres du marché Commun d’Afrique Orientale et Australe (COMESA) sont attendus dans la capitale économique Bujumbura ce 31 octobre. Au menu des évènements parallèles, un forum d’affaires et un conseil des ministres des affaires étrangères se sont tenus, respectivement les 28 et 29 octobre. « Ce sommet est un évènement clé pour renforcer l’intégration économique et le développement régional parmi les Etats membres » ; lit-on sur le site web spécifique du sommet.
L’une des opportunités phares qu’offre le Comesa est la promotion de l’intégration régionale du commerce notamment la libre circulation des capitaux et des investissements. La récente mise en place d’une zone de libre-échange (ZLECAF) qui garantit la libre circulation des biens et des services produits au sein du Comesa en est une importante étape franchie.
Force est de constater que le Burundi semble être un marché d’écoulement pour les autres pays membres de ce bloc des affaires. Les exportations du Burundi sont de loin inferieures aux importations, selon les statistiques de l’Institut National de Statistiques du Burundi (INSBU).
Les chiffres disent mieux
L’annuaire statistique du Burundi 2022 montre que le pays a importé des pays du Comesa des marchandises d’une valeur de 429,196 milliards de BIF contre 139,365 milliards d’exportations ; soit une différence de 289, 831 milliards de BIF.
L’Ouganda venait en tête des pays où le Burundi a importé plus de marchandises avec une valeur de 153 milliards suivi du Kenya avec 137 milliards, ensuite la Zambie avec 55 milliards, l’Egypte avec 32 milliards, et enfin la RDC avec 24 milliards. Au niveau des exportations, la RDC est le principal partenaire. Le Burundi y écoule en grande partie des bières et des savons. Parenthèse ; en marge de ce 23ème sommet, la ministre burundaise du commerce et des transports, madame Marie Chantal Nijimbere, va lancer officiellement le régime commercial simplifié (RECOS) du COMESA entre le Burundi et la RDC, à travers la frontière Gatumba ; ce 30 octobre.
Environnement des affaires : le Burundi arrive en queue de peloton
« L’image économique que présente le Burundi aux autres pays membres de la communauté n’est pas reluisante » ; a commenté l’économiste André Nikwigize.
En 2024, le taux de liberté des affaires se pointait a 38% selon Index of Economic Freedom. Sur ce point, le Burundi vient seulement avant le Soudan (34%). En 2022, seules 11% de la population avait accès à l’internet (en fin de tableau par rapport aux autres pays). Le taux de l’accès à l’énergie oscille autour de 11% selon la Banque Mondiale (queue de file). En 2023, les investissements directs étrangers s’équivalaient à 29 millions de dollars selon la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement (mauvais élève, juste avant le Comores et l’Erythrée).
Le Burundi a adhéré à cette grande communauté dès sa création (ZEP) et bénéficié du tarif extérieur commun de la communauté, soit 25% pour les produits finis, 10% pour les biens intermédiaires et 0% pour les matières premières et pour les biens d’équipement.
Lors du forum des affaires tenu ce 28 0ctobre à Agateka Hall, il a été révélé que l’intégration effective dans le Comesa fait encore face à certains défis, entre autres l’exigence des visas aux populations des pays membres, l’insuffisance des infrastructures de transport ou encore la charte du transport aérien. En plus de ces défis communs, le Burundi doit faire face à la concurrence, étant donné qu’il importe plus qu’il n’exporte, ainsi qu’à l’inefficacité des systèmes internes.
Si le Burundi est à l’honneur cette année en hébergeant le #COMESASummit2024, il reste tout de même déplorable que ce territoire de Rwagasore et Ndadaye se classe en fin de tableau sur la ligne des opportunités qu’offre cette communauté à laquelle il a adhéré dès les premières heures.
Génèse du COMESA en bref :
Regroupant actuellement 21 pays et étant une des communautés économiques régionales reconnues par l’Union Africaine, le Comesa a au départ été créé en 1981 en tant que Zone d’échanges préférentiel des Etats de l’Afrique orientale et australe (ZEP). C’était dans le cadre du Plan d’action de Lagos et de l’Acte final de Lagos adoptés par l’Organisation de l’Union africaine. La ZEP a par après été transformée en COMESA en 1994.
Etats membres : Burundi, Djibouti, Egypte, Erythrée, Eswatini, Ethiopie, Kenya, Libye, Madagascar, Malawi, Maurice, Ouganda, République démocratique du Congo, Rwanda, Seychelles, Somalie, Soudan, Tunisie, Union des Comores, Zambie et Zimbabwe.