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« This is America », ou doit-on dire « This is Burundi »?

Véritable phénomène médiatique, le clip de la dernière chanson du chanteur-cinéaste Donald McKinley Glover  a créé la polémique en proposant une lecture au vitriol de la société américaine. « Les réalités racontées dans cette vidéo musicale s’apparentent aussi au Burundi », juge le blogueur Fabrice Nkengurukiye.

Il y a quelques jours, je suis tombé sur une de ces chansons qui te laissent le cerveau en bouillie tellement la chanson et la musique te parlent. « This is America » de Donald McKinley Glover aka Childish Gambino est pour moi la chanson américaine la plus engagée depuis « Where’s Love ? » du groupe Black Eyed Peas. La chanson me touche en tant qu’être humain, noir et Burundais de surcroît.

La chanson débute avec un chant envoûtant. On voit un homme noir qui prend et joue de sa guitare. Après le chanteur apparaît, effectue une danse en marchant puis sort un revolver et tire sur le paisible guitariste, qui en passant n’a plus sa guitare, mais porte une cagoule et les mains liées. Le choc passé, on se rend compte que le coup est parti dans un « Jim Crow pose ». Jim Crow étant un personnage de théâtre utilisé pour se moquer de l’homme noir dans le sud des États-Unis pendant la ségrégation raciale. Pire encore, son forfait consommé, le chanteur continue son chemin en dansant comme si de rien n’était. 

Dans le contexte burundais, cela correspond pour moi à toutes ces victimes des différentes guerres depuis l’indépendance et plus précisément les jeunes vies fauchées par la  récente crise. On vit dans une période où prendre une vie, pour certains, est devenu chose facile. Pas un jour ne passe sans des images macabres sur les réseaux sociaux ou sur Whatsapp. On se précipite dessus pour voir si c’est une connaissance, si ce n’est pas le cas, on pousse un ouf de soulagement et on fait notre bout de chemin en priant que cela n’arrive jamais à un proche. La mort est devenue chose courante que cela ne touche plus vraiment grand monde, la vie continue quoi. À voir les réactions sur Twitter et Facebook, tant que ça ne concerne pas un proche ou un semblable, ce n’est pas grave, certains même n’hésitent pas à jubiler de la situation.

Un peu plus loin, le chanteur tire sur toute une chorale, un détour pour parler du « Charlestone mass shooting » en 2015, un de ces tirs de masse fréquents aux États-Unis qui a pris la vie à neuf Afro-Américains. L’auteur du forfait avait pour but de déclencher une guerre des races, allez savoir quel intérêt il allait y trouver. Au Burundi, plus récemment le carnage de Ruhagarika et les différents massacres qui ont suivi après les manifestations de 2015 sont de ces crimes inhumains qui ne servent qu’à engendrer plus de violence. Des vies, des familles, des voisins, des frères fauchés au nom de la politique.

Que conclure ?

Tout au long de la chanson, des danses à la mode se succèdent pour attirer notre attention sur les danseurs, mais derrière eux des crimes continuent de se perpétrer. Cela correspond à ce semblant de paix dans lequel le Burundi est plongé  depuis quelques années. Tout semble aller dans le meilleur des mondes, mais il suffit de se connecter sur les réseaux sociaux ou faire un tour dans le pays pour se rendre compte que tout n’est pas aussi rose que ça. Le crime est moins apparent peut-être mais les démons rôdent toujours à la recherche de la prochaine proie.

La chanson se termine sur l’auteur fuyant pour sa vie, mais visiblement finit par se faire prendre. Dans un Burundi où la violence est quasi quotidienne, où l’on ne sait jamais de quoi sera fait demain, on devrait savoir que la roue tourne et qu’il est plus que temps que nous nous asseyons ensemble d’égal à égal pour que nous trouvions des solutions pour une paix durable. Comme l’a dit si bien Martin Luther King, « nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères, sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots. »

 


A relire : Arusha I : Accords de paix et de stabilité

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Les commentaires récents (1)

  1. Pour une paix durable, le dialogue devrait être permanent et non conjoncturel ni circonscrit a un seul événement pris pour référence a tort pour certains et a raison pour d’autres.