Au lendemain de la mort du président Tanzanien, John Pombe Magufuli, et de sa succession par la vice-présidente Samia Suluhu Hassan, ils ont été nombreux à affirmer que cette dernière est la première femme à diriger un pays de l’EAC. En réponse à cette affirmation, beaucoup ont répliqué que c’est plutôt à Sylvie Kinigi que revient ce mérite. Mais qu’en est-il réellement ? Eclairage.
A l’issue des rumeurs sur la santé du président Magufuli, la nouvelle a fini par tomber: le président John Pombe Joseph Magufuli est mort, laissant son pays, ses concitoyens et les pays voisins dans le désarroi. Annoncé par la vice-presidente à la télévision d’Etat, cette disparition a été largement commentée et les médias continuent d’en faire les choux gras, parfois avec une once de spéculations sur la cause réelle de sa mort. Certains évoquent la thèse des complications cardiaques. D’autres défendent mordicus que c’est plutôt la Covid-19 qui a eu raison de lui, insistant surtout sur sa position « corona-sceptique », comme s’il y avait une relation de cause à effet.
Mais sur un autre terrain, c’est plutôt sa succession qui fait couler beaucoup d’encre et de salive. Ils sont en effet beaucoup à affirmer que Samia Suluhu Hassan, le successeur, est de facto la première femme à accéder à la présidente d’un pays de l’EAC. « Loin de là », semble affirmer d’autres, citant pour preuve une certaine Sylvie Kinigi comme quoi c’est elle qui a le mérite d’avoir été la toute première présidente d’un pays de la sous-région, en l’occurrence le Burundi, après l’assassinat du président Melchior Ndadaye. Ont-ils raison ? Rien n’est moins évident.
Sylvie Kinigi, présidente ?
Un petit rappel du contexte pour commencer. En 1993, en juillet pour être précis, lorsque Ndadaye accède à la magistrature suprême, contre toute attente, il choisit Sylvie Kinigi comme Première Ministre. Une première dans un pays à tradition patriarcale. C’est elle donc qui se retrouve chef du gouvernement issu des toutes premières élections démocratiques de la République du Burundi. Je vous vois d’ici murmurer que le Burundi avait déjà connu de telles élections en 1961. Mais moi, je réplique qu’à l’époque, c’était sous le Burundi monarchique, avant que Micombero ne sonne le glas de la monarchie et proclame la République.
Vous êtes aussi sans l’oublier, après seulement trois mois, Ndadaye est assassiné. Sont aussi assassinés Pontien Karibwami et Gilles Bimazubute respectivement Président et Vice-Président de l’Assemblée nationale. Ce sont donc là tous les cas de figure de la succession légale du président que prévoyait la Constitution de 1992. Sans président de l’Assemblée nationale ni son vice-président (tous assassinés), c’est le désarroi. Le vide constitutionnel s’installe.
C’est là donc que Sylvie Kinigi se retrouve propulsée sur le devant de la scène. Gros détail : la Constitution de l’époque ne permet pas qu’elle assure l’intérim à la mort du président. La seule chose prévue par cette Constitution , dans l’article 85, est « qu’en cas de vacance pour cause de démission, de décès ou de toute autre cause de cessation définitive de ses fonctions, l’intérim est assuré par le président de l’Assemblée nationale ou, si celui-ci est à son tour empêché d’exercer ses fonctions, par le Gouvernement. »
Vous l’aurez compris donc, ce n’était pas au premier ministre d’assurer l’intérim. En l’absence du président de l’Assemblée nationale, c’est le gouvernement dans son ensemble qui prend les choses en main. Et c’est ce qui s’est passé à l’époque. Sylvie Kinigi agira en collégialité avec son gouvernement jusqu’au mois de février 1994 lorsque Cyprien Ntaryamira accède à la présidence à l’issue des négociations entre les « forces vives de la nation ».
Sylvie Kinigi, présidente donc ? Vous voyez que non. C’est le collège gouvernemental qui prendra les choses en main en attendant la normalisation de la situation. D’ailleurs, elle n’a jamais prêté serment comme présidente alors que l’article 63 de la Constitution de 1992 stipulait bel et bien : « Le mandat du président de la République débute le jour de sa prestation de serment et prend fin à l’entrée en fonctions de son successeur ». Qui plus est, comme pour aller dans le même sens, si les accords d’Arusha et la Constitution de 2005 prévoient que les anciens chefs d’Etats siègent au sénat (la Constitution de 2018 ne le permet plus), Sylvie Kinigi n’y a jamais siégé parce que justement elle n’a pas été présidente du Burundi. La mettre au même diapason avec Samia Suluhu est donc erroné et c’est ne pas connaître la situation pour le moins inédite qui prévalait à l’époque au pays des mille collines.
Merci de vos éclaircissements cher Yaga. Va de loin.
Merci de votre transparences
Pays des mille collines? C’est bien nous, vous êtes sûr?
Sinon merci pour vos précisions. Je me demandais justement pourquoi elle ne siégeait pas au sénat.
Juste pour vous donner mille Mercie de la part de vos éclaircissements !!!Je l’entendais souvent ailleurs parler que le Burundi a eu la présidente,et je me demandais pourquoi ça n’a pas été mentionné nul part !!Je vous remercie davantage
Je comprend pas !et alors tout le temp quel etait le titre de madame Sylvie kinigi ? de 1993-1994?
de 1993_1994 Madame Sylvie avait quel titre?quelle fonction sur le pays alors?
ceux qui croit KINIGI comme président ne savent pas ce que stipule la loi en cas de vide présidentiel.