C’est un fait. Les clubs de football burundais se vident de leurs talents, entraîneurs ou joueurs. L’insécurité et le peu de moyens étant la cause de ces départs vers d’autres pays. Résultat : le championnat national perd de sa saveur.
«Comment pouvons-nous être capables de nourrir nos familles, éduquer nos enfants, aspirer tout court à une vie meilleure alors que nous sommes irrégulièrement et pitoyablement rémunérés?», se plaint Mc Arthur Arakaza, ancien gardien de Vital’O qui vient de rejoindre le club kenyan, Kakamega Homeboyz, en passant par l’Ouganda dans l’équipe de Villa Sports Club.
G.D aujourd’hui dans un club au Rwanda fait savoir qu’aucun joueur ne peut vivre de ce qu’il gagne du foot burundais. «Une grande différence avec les clubs de la sous-région, où l’on peut faire vivre sa famille et avoir une vie décente », soutient-il.
Tous les pays de l’EAC ont déjà devancé le Burundi en ce qui concerne la prise en considération des talents footballistiques, selon Arakaza. Justement, car plusieurs clubs du Burundi ne donnent pas de salaires. « Seule la prime de match est offerte, et elle varie selon les clubs (entre 15 000 francs burundais et 20 000). Les mieux offrants donnent un salaire mensuel qui varie entre 50 000 et 150 000 francs Burundais aux joueurs mais ces derniers ne bénéficient ni d’assurance maladie ni de cotisations dans la caisse sociale », nous révèle un président d’un club burundais.
En comparaison, selon le gardien de but Mc Arthur Arakaza , un joueur au Rwanda est payé environ 500 000 francs rwandais (à peu près 1 500 000 fbu) et plus de 300 000 francs (presque 900 000 fbu) dans un club moins nanti. En Tanzanie, les clubs les moins offrants donnent 500 dollars (qui font environ 1 400 000 fbu) tandis qu’en Ouganda on touche plus de 400 dollars. Au Kenya, où les footballeurs sont les mieux payés, le salaire va de 1000 dollars à plus de 3 000. Là, encore, on n’a pas pris en compte la prime de match qui est 4 voire 6 fois plus élevée qu’au Burundi.
De lourdes conséquences
Tenez, au moins 7 meilleurs entraineurs burundais ont quitté le pays (Jimmy Ndayizeye, Masudi Juma, Omar Ntakagero, Okoko Godefroid, Kanyenkore Jean Gilbert, Francis Haringingo dit Mbaya et Pablo ancien joueur de Rumuri et Prince Louis). Ce qui, par conséquent, fait chuter davantage le niveau des championnats burundais. «Le championnat national va chuter à plus de 50% compte tenu du départ de ces entraineurs qui étaient les mieux côtés », analyse Désiré Hatungimana journaliste sportif. D’ailleurs on se souvient du départ de Kanyenkore de Vital’O. « Maintenant le club le plus titré du Burundi n’est plus que l’ombre de lui-même », se désole un fan de Vital’O.
Les départs sont souvent pour les meilleurs et les clubs burundais n’ont pas de moyens pour recruter dans d’autres pays. «Si le Burundi devait jouer le Chan (championnat d’Afrique des Nations, une compétition réservée aux joueurs prestant dans les clubs locaux), il ne pourrait aller loin…Les meilleurs sont partis !», observe Hatungimana. Et d’ajouter : «Seulement, suite à la formation qu’ils (joueurs) reçoivent ailleurs, la sélection nationale pourra au moins profiter de leur savoir-faire ».
Qui veut aller loin s’en donne les moyens
Avoir des talents ne suffit pas pour que le niveau du football burundais se développe. Faut-il encore les exploiter valablement. Pour Tharcisse Tungabose, un des plus anciens journalistes sportifs burundais, seuls la détermination et l’investissement financier vont décanter la situation. « Notre football a besoin de plus de financement pour assurer une meilleure survie des joueurs et de bons encadreurs passionnés.», analyse-t-il, avant de proposer : «Il faut qu’il y’ait les états généraux du football pour statuer sur ce qui ne va pas et relever les défis.»
Pour ce spécialiste du football burundais , « nous avons besoin des sponsors qui vont aider les clubs à rembourser les dettes dans un premier temps mais également pouvoir dépenser sur le marché des transferts et ainsi donner les notes de noblesse au ballon rond et rendre plus fort notre championnat. »
Des chiffres en constante hausse
D’après l’enquête menée par Yaga, plus de 20 joueurs de talents prestent maintenant dans le championnat rwandais. Caleb Peace Bimenyimana, Shassir Nahimana (Vital’O) et Pierrot Kwizera (Athletico Olympic) sont au Kigali au Rayon sport. Blaise Bigirimana ancien de Buja City et Francis Moustafa alias Njali (Muzinga) désormais enfilent les maillots de Kiyovu sport.
Saidi Irakiza ancien de Muzinga, Christophe Ndayishimiye, Kévin Hakizimana ancien d’Athletico, Kiza Hussein, Kubi ancien d’Inter star, Christophe alias Kulu, ancien de LLB mais de la fondation pépinière, Gael et Ali sont à Mukura victory. Omar Ngando et Emmanuel Ngama (Athletico) sont à l’As Kigali, où Claude Ndarusanze va les rejoindre.
Amagaju a sollicité les services de Trésor Ndikumana ancien de LLB, Patrice de Flamengo, Hussein Shabani Tchabalala, Issa Bigirimana dit Walcott, Yannick Bukebuke ainsi que Yannick Mukunzi sont à l’APR FC. Le club rwandais Espoir aligne le gardien burundais du nom d’Anselme alias Gege (Academie Tchité), tandis que Kirehe FC est entrainé par le burundais Omar Ntakagero, qui y fait jouer Samuel Ndizeye. À Bugesera FC y jouent Emery Nimubona, Steve Nzigamasabo et le gardien Yannick Bigirimana (Vital’O).
Et une autre bonne dizaine de joueurs évoluent dans d’autres pays de la sous-région : Balenge Pistis et Ndikumana Landry, ex joueurs de Vital’O, viennent de rejoindre l’équipe de Mbalala City récemment promue en première division ougandaise. Une équipe qui n’a pas du tout le niveau technique de Vital’O mais un potentiel financier très important.