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Burundi : petit dictionnaire de la corruption

La corruption est parmi les grands maux qui hantent l’émergence économique du Burundi. Dans le chapitre corruption du petit dictionnaire rundi, de nouveaux mots ont vu le jour tandis que d’autres se sont vu conférer de nouveaux sens. Florilège.

Le mot « corruption » sous l’orthographe d’« igiturire », fait désormais partie du petit dictionnaire rundi. Il est le plus connu et place le Burundi à la 171ème place sur 180 pays, selon les indicateurs de Transparency International en 2022. La corruption faisant la normalité des Burundais, elle est en train d’innover et enrichir notre petit dictionnaire rundi. Jetons-y un coup d’œil pour s’assurer du bon usage de ces expressions. 

Umuceri

« Umuceri » veut dire le riz en français. Sauf qu’aujourd’hui, le mot a pris une autre tournure dans son usage courant, notamment sur le réseau social X. Initié par un compte anonyme du nom d’Umuhingayigenga, le mot renvoie à une information chaude, un scoop, avec preuve à l’appui, pour dénoncer les corrupteurs où les affaires louches qui ont une odeur de corruption. Pour les corrupteurs, leurs magouilles sont étalées au grand jour, et commentées à longueur des journées. Et curieusement, la méthode semble bien fonctionner, car il y a des dossiers qui ont été déterrés, d’autres poursuivis en justice, d’autres corrupteurs destitués, à cause de cet « umuceri wasesetse ku mayira ya Twitter ».

 Igifyoti 

Un vocable nouveau pour beaucoup de Burundais, il a été initié par le fameux pasteur Mbayahaga Isidore, le 29 septembre 2022, à Gitega, lors de la prière que le parti au pouvoir organise chaque dernier jeudi du mois. Pasteur ou comédien, ce jour-là, le prédicateur a été plus que satirique. Il a raconté un conte d’un oiseau de mauvais augure qu’il a baptisé « igifyoti », qui troublait l’eau de la source après y avoir bu, pour que les autres oiseaux ne trouvent pas à boire. Peu de jours après, le mot a été utilisé et continue encore d’être utilisé pour désigner les gens qui s’enrichissent via la corruption tout en bloquant l’accès à des millions de Burundais à la prospérité. 

Gufata iswa 

Dans la culture burundaise, « Gufata iswa » veut dire ramasser les termites. Mais aujourd’hui, le mot, qui est sur la bouche de nombreux Burundais, a été détourné de son vrai sens. Il a initié par Révérien Ndikuriyo, le secrétaire général du parti au pouvoir, qui expliquait que certaines leçons apprises à l’école ne permettent pas de gagner la vie ou d’avoir de l’argent. Ainsi, « iswa » au-delà d’être « termite », est devenu le nouveau nom pour signifier « l’argent ». Aujourd’hui, si une personne reçoit un décret ou est nommée dans un poste qui ne lui permet pas de se faire beaucoup d’argent ou de détourner les biens publics, on parle alors d’un décret ou poste idafata iswa.

Gukona 

Dans ce fameux chapitre sur la corruption, Gukona est aussi un vocabulaire nouveau. En riposte à la corruption, le président Ndayishimiye a commencé à destituer les corrupteurs, sans les punir ou les traduire en justice. Dans le langage rundi, lorsqu’on émascule quelqu’un sans lui couper le sexe, on parle de « Gukona ». C’est ainsi que pour signifier la stratégie de destituer les corrupteurs sans les traduire en justice, les Burundais disent désormais que « bakonye umutegetsi ». Ainsi, cette méthode de « gukona » n’a fait que renforcer la corruption au plus haut niveau, étant donné que le corrupteur déchu sans être poursuivi, vivra des jours heureux, voir investir son butin sans problème. 

Si nous ne coupons pas la corde qui nous lie à la corruption, l’évidence est que le dictionnaire burundais ne chômera jamais. Et vous, connaissez-vous d’autres mots dans ce chapitre ? Dites-les nous en commentaires.

 

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