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Alerte Alerte Alerte : le père Noël, ne risque-t-il pas la panne sèche ?

C’est presque avec amusement qu’on découvre l’autodérision des Burundais, ces éternels pince-sans-rire, en ce moment où le moral de la population est en berne à cause de la pénurie du carburant (celui du sucre et du charbon de bois pointent aussi à l’horizon). Face à toutes ces informations, les unes plus anxiogènes que les autres, il faut bien trouver une panacée pour ne pas succomber au désespoir, à l’approche des fêtes de fin d’année. L’actualisé vue sous un autre prisme ? Lisez les lignes qui suivent.

« C’est comme s’il y a quelqu’un, dans ce pays, qui teste notre niveau de résilience … hé Dié, qu’est-ce qu’on t’a fait ? », s’est emporté un internaute du nom d’Alain Horutanga sur ses comptes X (ancien Twitter) et Facebook. Ce n’est pas lui seul qui sent l’étau se resserrer. Nous nous étions habitués aux longues files d’attente sur les parkings, mais depuis quelques jours, nous découvrons des files d’attente devant les points de vente des makara (charbon de bois). 

Un de ces Burundais, apparemment amateur de l’humour noir, s’est fendu d’une blague : « Le chef de ménage fait la queue pour le carburant, la maman fait la queue pour le makara et l’enfant fait la queue pour le sucre ». C’est fou, cette floraison de dérisions en ces temps de dures épreuves. Récemment, Akeza a publié une photo d’une des artères du centre-ville de Bujumbura désespérément vide. A la vue de la photo, un autre gugus qui a la langue bien pendue a pondu immédiatement une saillie : « None ko ibarabara ryera, n’abantu banywa ibitoro ?».  

Des groupes WhatsApp traqueurs de carburant

Le carburant, parlons-en encore un tout petit peu. Les gens sont tellement obnubilés par la pénurie qu’ils ont créé des groupes WhatsApp pour communiquer facilement au cas où certaines stations-services viendraient à être servies. Je me suis marré quand une amie m’a dit qu’elle a intégré un de ces groupes alors qu’elle n’a pas de véhicule. Elle m’a expliqué que c’est pour filer des informations à son copain qui lui est ‘’bagnolé’’. 

Ces groupes sont devenus de véritables squads qui traquent les camions transportant le carburant. Avant-hier, j’ai lu dans un d’eux : « Ikamyo zitatu zirinjiye i Kobero kandi zizanye esanse ». Quatre heures plus tard, je lis un autre message d’une autre personne : « Za kamyo zitatu zigeze mu Kayanza, ariko sinzi ko zipakiye esanse canke mazutu ». Les listes des stations-services soi-disant servies circulent trop, parfois, on découvre avec amertume qu’elles datent en réalité de quelques mois. 

Pour ce qui est des informations anxiogènes, nous ne sommes pas au bout de notre peine. La Sosumo a annoncé hier la suspension de production à cause des pluies diluviennes qui ont endommagé les cannes à sucre, ce qui sous-entend que la pénurie de sucre sera parmi nous bientôt. Nous n’avons même pas eu le temps de digérer cette info que l’Onatour a elle aussi jeté le pavé dans la mare en annonçant la suspension des activités de production à cause d’un « manque d’un produit utilisé dans la fabrication de la tourbe ». 

Le cordonnier éternellement mal chaussé

Ce matin, la boîte, pour laquelle je travaille, a envoyé le chauffeur acheter  l’électricité à la Regideso. Il est revenu bredouille, annonçant qu’il n’y a plus d’électricité à la Regideso. Normalement, je ne crache pas sur une occasion de lancer une blague. Je me suis donc entendu dire : « Les cordonniers sont mal chaussés ». On n’allait pas laisser cette histoire sans creuser, vous vous en doutez. La coupure de l’électricité qui touche le distributeur de l’électricité ! Avouez que c’est quand même cocasse ! Ils n’ont même pas de groupe électrogène ?, a risqué une question un collègue. A quoi a répondu un autre collègue : « Peut-être qu’ils n’ont plus de carburant ». C’est là que j’ai éclaté en fou rire : « Mais ce sont eux-mêmes qui importent du carburant. Si eux aussi n’ont plus une goutte, nous sommes vraiment dans la mouise ».  Après cette discussion, nous avons fait une descente à la Regideso. Un agent qui a requis l’anonymat nous a fait savoir qu’en fait, il y a eu une coupure de connexion internet qui a perturbé les activités de la Regideso et que ce problème a vite été réglé. 

‘’Something is rotten in the state of Danmark’’

Pour vérifier tout ça, notre chauffeur y est retourné et a effectivement pu acheter ‘’les unités’’ comme on dit, et c’est comme ça que j’ai pu écrire ce papier que vous êtes en train de lire.  Quand je suis resté seul, je me suis remémoré des difficultés que le pays a traversées durant cette année qui touche à sa fin : pénuries, dévaluation de la monnaie, manque de devises, VBGs, etc. Après quoi, je me suis rappelé de cette tirade de Shakespeare dans ‘’Hamlet’’ : « Something is rotten in the state of Danmark ». 

Je me suis même étonné que ce pays tienne encore debout, avant de me rappeler que nous avons mis Dieu devant. A ce propos, une question un brin cynique a jailli de mon esprit de chrétien ‘’vintage’’ : le père Noël, ne risque-t-il pas de tomber en panne sèche quand il va vous amener des cadeaux ? « Quoi ? A ton âge, tu crois encore au père Noël », m’a lancé en rigolant un collègue qui lisait au-dessus de mon épaule au moment où j’écrivais ces lignes. A quoi j’ai répondu : « Tu serais bien content s’il t’amenait un bidon d’essence de 20 litres, espèce de païen ! ». Mais restons stoïque, chers Burundais, ‘’nta mvura idahita’’ !   

 

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