Depuis le premier trimestre de l’année scolaire, les entrepôts de stockage de vivres des cantines scolaires dans la direction communale d’enseignement de Musigati sont vides. Les conséquences commencent à se faire sentir à l’ecofo Gahisi. Sur l’effectif de 424, 40 écoliers dont 25 ont déserté l’école. Reportage
13h30, nous sommes au centre de la commune Musigati. C’est à une dizaine de kilomètres du centre urbain de la province de Bubanza. La saison pluvieuse bat son plein. Au-dessus des collines verdoyantes de la Kibira surplombant ce centre, les nuages et le brouillard couvrent les sommets des montagnes.
Notre destination, l’école fondamentale Gahizi érigée sur la colline Musigati. Pour y arriver, on bifurque à gauche de la route menant à la commune Musigati. Après trois minutes, on arrive sur la colline Gahisi. Mais la voiture ne peut pas accéder à l’école construite au sommet de la colline. On y monte à pied.
Les écoliers sont en classe. Ceux qui sont dans l’une de salle de classe chantent tandis ceux sont dans une autre classe font des exercices. Ils crient « S’il vous plaît… s’il vous plait ».
A l’extérieur des classes, une fille berce un bébé dont elle porte sur le dos. Pourtant, ce n’est pas une nounou. C’est une écolière. Elle donne un coup de main à l’une des deux enseignantes dispensant les cours dans la classe de la première et de la deuxième année. Elle suit les cours à travers la fenêtre.
Les cas d’abondons sont alarmants
Cette école donne l’impression d’un établissement bien organisé. L’effectif des écoliers n’est pas pléthorique. Deux apprenants par banc pupitre. Cependant, la réalité est toute autre. L’ecofo Gahisi n’a que deux salles de classe. Les élèves qui suivent les cours sont de la première et de la deuxième année. Ceux de la troisième, de la quatrième année, cinquième année, sixième année ont étudié dans l’avant-midi.
Outre cela, cette école fait face à un véritable problème. Les chiffres des cas d’abandons scolaire font froid dans le dos. Alexis Misigaro, directeur de cet établissement, s’inquiète. « Les cas d’abandons sont alarmants. Au cours du premier trimestre, sur l’effectif de 424 écoliers, 40 ont quitté l’école »
Parmi ces cas abandons, 25 sont des écoliers batwa. L’école compte 53 écoliers de batwa. L’ecofo Gahisi enregistre le plus grand effectif d’écoliers batwa de la direction communale d’enseignement de Musigati.
Pour tirer la sonnette d’alarme, le directeur brosse le tableau des cas d’abandons de deux dernières années scolaires. « L’année scolaire 2020/2021, sur l’effectif de 391 écoliers, nous n’avons enregistré que trois cas d’abandons. L’année scolaire 2019/2020, sur 274 élèves, seuls 3 ont abandonné. », souligne Alexis Misigaro
Le taux de réussite en decrescendo
D’après ce responsable, ces abandons s’expliquent par une principale raison: le système de cantine scolaire ne fonctionne plus. Depuis le début de décembre 2021, les stocks alimentaires sont vides.
Lorsqu’il y a rupture de stocks, précise Alexis Misigaro, cet établissement compte beaucoup d’absences parce que de nombreux ménages n’ont pas assez de moyens pour nourrir leurs enfants.
M. Misigaro craint que la situation risque de s’empirer si rien n’est fait. Jusqu’à l’heure actuelle, la direction ne connaît ni la raison de cette rupture de stock ni quand elle sera approvisionnée.
En outre, la rupture de stocks affecte les performances des élèves. Au cours du premier trimestre, à l’ecofo Gahisi, le taux de réussite se chiffre à 65% alors qu’il était 70% au cours des trimestres précédents.
Les enseignants s’inquiètent
Estella Dushimirima, l’enseignante de deuxième année fait savoir que la rupture de stock alimentaire a considérablement perturbé les écoliers. « Actuellement, beaucoup d’élèves tombent malades. Chaque jour, nous comptons entre 5 et 10 absences”
D’après elle, ventre affamé n’a point d’œil. Les élèves ne peuvent se concentrer lorsqu’ils n’ont rien mangé. Certains s’endorment pendant les cours ou vomissent à cause de la faim.
Selon cette jeune femme, sur neuf écoliers batwa, six ont abandonnée l’école. Ces trois restants ne sont pas réguliers en classe. Avant la rupture des stocks alimentaires, cette classe avait un effectif de 38 écoliers.
La direction provinciale s’explique
La direction communale est aussi inquiète. Sylvestre Banzubaze, directeur communal confirme que les stocks alimentaires sont vides. Au premier trimestre 2021, sur effectif de 14007 élèves bénéficient le programme de la cantine scolaire, 464 ont abandonné l’école. Au total, sur 22 326 écoliers inscrits à l’école fondamentale dans la commune Musigati, 843 ne fréquentent plus l’école. Sur 52 écoles fondamentales de cette commune, 32 seulement reçoivent l’appui des cantines scolaires.
Selon la direction provinciale de l’enseignement, le système scolaire ne parvient plus à nourrir les élèves tous les jours de classe. “Selon, la revue annuelle 2020/2021, les élèves devraient être nourris 198 jours de classe. Cependant, ils sont nourris 96 jours, soit moins de 50%. », précise Claude Badugaritse, le directeur provincial d’enseignement. Cette direction compte 228 écoles, 105 seulement reçoivent l’appui des cantines scolaires.