Nos milieux de vie nous influencent forcément sur divers plans. Inspiré par son séjour immersif dans le fin fond de l’Imbo, notre contributeur nous partage son regard sur certains aspects de la manière de vivre des habitants de cette région.
Au moment où je trace ces mots, je me souviens des propos d’un certain professeur lors de mes derniers jours à la fac. « Le moment est venu pour vous de vous éparpiller à travers le pays, et peut-être même au-delà de ses frontières », nous disait-il.
Quant à moi, le destin m’a guidé vers le fin fond de la plaine de l’Imbo, passant mon séjour successivement de Bubanza à Rumonge. J’ai ainsi eu l’opportunité de m’immerger dans la région, côtoyant les « babo » de pure souche, ou du moins ceux qui s’affirment fièrement comme tels.
Dans ces lignes, je dévoile quelques aspects qui m’ont fasciné, moi qui ai grandi dans le Kirimiro. Justement, je ne fais qu’un regard à travers des lunettes de ce « voyageur-touriste » à la découverte de nouvelles contrées ou de nouvelles habitudes des gens.
Des gens volubiles ?
« Les gens de chez nous, parlent tout le temps. Tu le constateras par toi-même en y allant », blaguait un ami natif de Buganda (Cibitoke) sur un ton taquin. Et il ne m’a pas fallu beaucoup de temps pour le constater. L’ambiance qui règne dans les minibus reliant Bujumbura à Cibitoke est une illustration parfaite de cette réalité. Dans un kirundi teinté de leur accent caractéristique, des blagues fusent facilement, et les autres passagers ne tardent pas à en rire, leurs commentaires animant l’habitacle de la voiture.
Cette atmosphère joyeuse lors des voyages en transport en commun, je la vis également chaque fois que j’emprunte la route Bujunbura-Rumonge. En fait, j’ai remarqué que ces bus n’ont même pas besoin de la musique à plein volume comme j’en avais l’habitude. Les passagers se chargent de l’ambiance avec joie et humour nous faisant presque oublier le piteux état de la RN 3.
Un jour, je me souviens d’une discussion un peu farfelue qui avait animé presque tout le bus. A ce moment-là, un voyageur tanzanien qui était assis à côté de moi a fait ce constat en swahili : « les gens d’ici discutent beaucoup dans la voiture comme s’ils se connaissaient tous. » J’ai souri en répondant dans un swahili approximatif qu’ils sont comme ça même.
« Carnivores » dans l’âme
En abordant cet aspect, je signale un certain mème internet qui, une fois est passé devant mes yeux. Il caricature avec humour les habitudes culinaires des habitants des régions du Mugamba et de l’Imbo. C’est une photo d’une marmite contenant un méli-mélo de morceaux de viande avec des grains de maïs. En haut, une description laconique indique : « iyo umubo n’umugamba babana mw’i gettho », la viande étant sûrement associée au mubo et les grains de maïs au mugamba.
Evidemment, pour le mubo, la viande est une véritable histoire d’amour. D’ailleurs, chez lui, le terme imboga a une toute autre signification. Ce ne sont pas des légumes comme beaucoup pourraient le penser. C’est du poisson, ou tout simplement de la viande.
Cet amour pour la viande se manifeste partout. Dans les ménages, la pâte est presque toujours accompagnée d’au moins une sauce à base de petits poissons asséchés. Un quidam peut se rendre au bar, rien que pour se taper une ou deux brochettes de viandes avec de la pâte de manioc battue (uburobe) et continuer ses activités en toute tranquillité.
Comme à Rome, il faut faire comme les Romains, je commence à être influencé avec le temps passé dans les profondeurs de l’Imbo. Il m’est de plus en plus difficile d’avaler la pâte non accompagnée d’imboga. Au marché, je m’habitue petit à petit à choisir du bon poisson comme je le fais bien déjà pour les avocats (Ndi umunyagitega, lol).