Passer un week-end agréable au Burundi ne se limite pas à se prélasser sur les plages ensoleillées du lac Tanganyika ou à flâner autour du célèbre Lac aux oiseaux de Kirundo. Le pays regorge de merveilles naturelles souvent méconnues, mais époustouflantes. Mon escapade récente à Mwishanga m’a laissé de bons souvenirs. Des spectaculaires ponts suspendus rappelant ceux du Népal à la mystérieuse grotte des rituels de Kiranga, réputée porter chance aux visiteurs, l’aventure a été envoûtante.
L’aventure débute un vendredi matin. Sac à dos léger, chaussures solides, gourde remplie et une soif d’aventure hors des sentiers battus. Depuis Gitega, la route vers Rutana, où se nichent les chutes de Mwishanga, serpente à travers un paysage vallonné. À Kwiraro, des panneaux indiquent : 140 km vers la frontière tanzanienne, 62 km vers Kinyinya, un carrefour stratégique menant à Ruyigi-Cankuzo d’un côté, Rutana-Gihofi et Bujumbura-Gitega de l’autre.
Le décor change. Un panneau mentionne les chutes de Karera, les failles de Nyakazu et le massif sacré de Nkoma. La verdure dense, les cultures en terrasses et les sourires des enfants au bord de la route annoncent l’entrée dans une région où nature et authenticité règnent encore, préservées du tourisme de masse. En poursuivant vers Rutana, on atteint le centre de Ngoma, également connu pour la culture du sorgho de Nkoma, traditionnellement utilisé lors de la fête de l’Umuganuro, un rituel ancestral burundais.
Après un peu plus d’une heure de route, nous approchons des chutes. Première étape obligatoire : obtenir une autorisation d’accès auprès du bureau de l’OBPE (Office Burundais pour la Protection de l’Environnement). À environ 500 mètres, le grondement de l’eau se fait entendre, un bruit sourd, presque purificateur. Un instant, j’ai cru percevoir un écho venu des chutes du Niagara… Puis un souvenir musical m’a traversé l’esprit : la chanson Fallait pas.
La grotte rituelle de Karera : époustouflante et mystérieuse
Soudain, au détour d’un petit sentier, les chutes de Mwishanga se dévoilent, majestueuses, encadrées par une végétation luxuriante. L’eau s’élance avec force depuis une hauteur d’environ 30 mètres, créant une brume fine qui vient caresser le visage. Le chant des oiseaux accompagne ce spectacle grandiose, invitant immédiatement à la contemplation. Ce qui frappe ici, c’est la pureté du lieu. Aucun kiosque de souvenirs à l’horizon, seulement quelques panneaux de l’OBPE et des bancs en bois, idéalement placés pour admirer les chutes. Rien que la nature : brute, belle, indomptée. On se sent humble, presque intrus dans ce sanctuaire.
Notre guide, prénommé Bosco, nous explique que le site compte en réalité cinq chutes : Nyakayi, Mwaro, Mwishanga, ainsi que Karera 1 et 2, alimentées par deux rivières distinctes. Pour les admirer pleinement, il faut emprunter un impressionnant pont suspendu qui enjambe la canopée. On se croirait presque au Népal, célèbre pour ce type de passerelles aériennes suspendues aux flancs des collines !
Mais le véritable clou de l’aventure se trouve à quelques mètres des chutes. Dissimulée derrière une formation rocheuse, une petite ouverture discrète mène à la grotte des rituels de Karera, ou « grotte de la chance », comme l’appellent les habitants. Bosco nous en dévoile les secrets : des couples en quête d’enfant s’y rendent, souvent accompagnés d’un devin, pour des rituels de kubandwa censés favoriser la fécondité. La grotte est réputée exaucer les vœux sincères. « On dit que si tu entres dans cette grotte avec un cœur pur et une pensée positive, la nature t’écoutera », glisse Bosco avec un sourire énigmatique.
À l’intérieur, l’atmosphère est sombre, mais loin d’être inquiétante. On y pénètre accroupi pour découvrir une cavité naturelle où ruisselle une eau fraîche, presque glacée. Des stalactites ornent le plafond, et chaque goutte qui tombe résonne comme une note d’espoir. Je me suis recueilli un moment dans ce silence quasi sacré, loin du réseau, du bruit et du tumulte du monde. On comprend aisément pourquoi les anciens y voyaient un lieu mystique.
Un site à préserver
Malgré la beauté brute du site, certaines préoccupations émergent. L’absence d’infrastructures touristiques (pas de camping aménagé à proximité, nécessité de retourner au centre de Rutana pour y passer la nuit, ni de restaurant ou de stand de restauration rapide) est patente, mais la présence de graffitis sur certains rochers est plus alarmante. Il est encore temps de préserver ce joyau, à condition d’agir collectivement et de lui accorder une protection plus formelle.
Joséphine Nahimana, une habitante, partage cette inquiétude : « Nous craignons qu’un afflux de visiteurs ne le dégrade. ». Elle propose des pistes intéressantes : former des jeunes guides locaux, sensibiliser les visiteurs aux bonnes pratiques, mettre en place des règles d’accès claires et garantir une rémunération décente aux accompagnateurs.
Mwishanga, une escapade ressourçante
Ce qui rend cette destination si précieuse, c’est son accessibilité. Nul besoin d’un budget conséquent : une gourde, quelques provisions, un appareil photo et le désir de se reconnecter à l’essentiel suffisent. Mwishanga ne promet pas le confort d’un hôtel cinq étoiles, mais elle offre une expérience cinq étoiles pour l’âme. C’est le genre d’endroit où le temps semble ralentir, où l’on se rappelle que le vrai luxe réside dans le calme, la beauté brute et l’air pur que l’on respire à pleins poumons.
En quittant les chutes et la grotte « porte-bonheur », je n’emportais pas seulement des images à partager, mais une énergie nouvelle, celle que procure une nature encore intacte, accueillante, sans artifice. Alors, si vous êtes en quête d’une aventure authentique, loin du tumulte et du béton, mettez le cap sur Mwishanga. Et qui sait ? Peut-être repartirez-vous de la grotte avec un soupçon de chance.
Merci pour ce beau reportage. Mais il y a une chose que vous n’avez pas découvert à Mwishanga, c’est l’hôtel le Peroquet Vert, où on peut rester loger ou simplement manger et où l’accueil est très chaleureux. Je reste loger là à chaque fois que je vais à Mwishanga et les hôtes sont devenus des amis. Autre chose c’est le site juste à côté de l’entrée des chutes de Désiré Muhoza qui est agro forestier et plantes et préservé les espèces d’arbres, de plantes de la région. Une très belle personne qui nous fait faire des randonnées extra, par exemple des randonnées des chutes vers la faille des Allemands. Très belle nature. Il organise aussi des soirées avec des anciens musiciens d’inanga et ikembe autour d’un feu de bois. Ce sont de moments inoubliables, inanga combiné à un bruit de fond des chutes, un feu de bois, un mais grillé et un ciel étoilé. Moments de bonheur.