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Mpanda : 13 ans et déjà la tête bien sur les épaules

« Taxi-vélo » le matin et écolier l’après-midi, Éric* est l’exemple vivant que le dicton « Aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années » dit vrai. Retour, cette rencontre inspirante.

Me revoilà sur la route en terre qui va me mener kuri 13. Je marche une dizaine de minutes et je vois un jeune garçon sur un vélo « matabaro ». Je l’arrête mais il continue. Il a l’air de ne pas m’avoir vu. Je l’interpelle et enfin, il me remarque. Il me rejoint et je lui lance « Sha ntubona ko umukiriya yaragucitse ». Il sourit et j’embarque. Tandis qu’on roule, ses petites épaules me font douter de sa capacité à m’emmener à bon port.

On arrive enfin sur le macadam, et là, je m’intéresse à lui. Je lui pose quelques questions, dont les réponses me clouent sur mon siège en fer.

Un homme dans la peau d’un garçon

Éric a 13 ans. Il habite à Rubira, en commune Mpanda de la province Bubanza. Benjamin d’une fratrie de cinq enfants, il fréquente l’école fondamentale de Rubira en 4ème année. Vous vous demandez ce qu’il fait au guidon d’un vélo plus grand que lui ? Eh bien, il commence les cours à 12h, et au lieu de glander, ici et là comme ses pairs, il fait taxi-vélo depuis maintenant deux ans, dit-il fièrement. Je suis son deuxième client, le précédent, il vient de le déposer à Buterere.

Avec son métier à temps partiel, ce petit ambitieux me révèle qu’il peut gagner 10.000 Fbu par jour. Remarquant mon étonnement, il renchérit que le samedi, il peut gagner jusqu’à 25.000 Fbu, car il a alors toute sa journée. Grâce à ces revenus, me vante-t-il, il achète lui-même ses fournitures scolaires : « Uyu mwaka, na uniforme nije nayiguriye ! »

Il n’est pas seulement travailleur, il a des projets. Avec l’argent qu’il a épargné – parce qu’en plus, monsieur est un bon gestionnaire – il compte acheter du petit bétail.

« On se moque de moi, mais je m’en fous »

D’après Éric, ses potes n’arrêtent pas de le chambrer à cause de son job. « Ils me disent de laisser tomber et de venir me balader avec eux. La plupart ne comprennent pas pourquoi je veux gagner de l’argent. Ils me disent tous que mon père peut payer ce qu’il me faut, mais mes oreilles restent closes à leurs railleries. Ce que je fais, rend mon père fier de moi, car il voit que je prospère avec le vélo qu’il m’a acheté.»

Sur ces belles paroles, on arrive au bus en partance pour le centre-ville et on se sépare. Vous saurez que ses épaules, aussi petites soient-elles, m’ont ramené safe and sound.

Esprit de combattant ou conditions de vie difficile ?

Certains seraient tentés de dire que le petit n’a pas le choix, qu’il doit faire face aux conditions difficiles. A mon avis, ce serait être étroit d’esprit que de ne pas reconnaître la maturité de ce garçon.

Les conditions difficiles peuvent être une raison de batailler comme il le fait, mais contrairement à ses petits camarades, qui préfèrent s’amuser, lui, il s’est fixé un objectif qu’il est en train de se donner la peine d’atteindre.

Personnellement, son histoire m’a poussé à faire une introspection. Et vous ?

*nom d’emprunt

 

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