Une circulaire du ministère de l’Éducation interdisant aux filles victimes de grossesse ou contraintes au mariage de réintégrer le système éducatif formel est apparu sur les réseaux sociaux vers la fin du mois de juin. Cette mesure a provoqué un tollé. Quatre blogueurs de Yaga se sont prononcés sur cette décision. Premier article.
Depuis mon jeune âge, j’ai entendu parler d’ « Igisumanyenzi », la sanction que devait subir toute jeune fille qui tombait enceinte avant le mariage. Il faut dire que nos ancêtres ne badinaient pas. Je m’imaginais un monstre qui déchiquetait ces jeunes filles et les êtres dans leur sein, petits êtres qui ne seront jamais au courant de la raison de cette sentence. Plus tard, j’appris que c’était une forêt dans laquelle étaient jetées ces filles, devenues une abomination pour l’honneur de leurs parents et familles.
Aujourd’hui, il m’est difficile de croire à ces histoires. Je me suis simplifié la compréhension en me disant que la famille s’arrangeait pour envoyer l’enfant chez un oncle ou une tante dans une région lointaine, où elle n’était pas connue, qu’elle vivait cachée durant 9 mois et qu’elle pouvait refaire sa vie après. Pourquoi pas ?
L’éducation par le bâton et la terreur
Cette simplification des choses tenait jusque-là. Mais, c’était avant la décision-choc du ministère de l’Éducation.
« Toute fille ayant été victime de grossesse ou contrainte au mariage étant encore au niveau du fondamental ou du post fondamental de même que le garçon auteur d’une grossesse n’ont pas droit de réintégrer le système éducatif formel public ou privé. Toutefois, ils sont tous autorisés de fréquenter l’enseignement des métiers ou de suivre la formation professionnelle », peut-on entre autres lire dans la circulaire signée de la main de la Docteur-Ministre.
Je n’en revenais pas ! Comment peut-on être aussi insensible et dur envers une « victime » ? Puisque c’est le qualificatif à leur donné et pour moi, ce sont effectivement des victimes. Victimes de leur sang chaud, des circonstances, des prédateurs, mais aussi du manque d’éducation notamment sexuelle dans leurs foyers comme à l’école.
Au fait quel est leur tort madame la Ministre ?
Sont-elles coupables d’avoir eu des relations sexuelles? D’avoir succombé ? De n’avoir pas été prudentes ou plutôt malignes ? D’être fragiles, manipulables, ou pas assez fortes pour se défendre ? Ou au final, leur tort, c’est de n’avoir pas avorté façon « ni vu ni connu ».
Si c’est la première raison, je proposerais au ministère de faire un test de virginité à toutes les écolières et élèves et on verra le résultat. « Igisuma ni igifashwe » (n’est voleur que celui qui est attrapé, ndlr), me direz-vous…Très bien, mais en tant qu’éducatrice, êtes-vous sûr d’avoir armé comme il le faut vos disciples pour qu’ils puissent faire face à ces tentations ?
Et cette décision est-elle prise pour leur bien ou celui des enfants qui vont naître ? Ou Est-ce pour leur faire comprendre qu’un crime de lèse-majesté ne peut être sanctionné que de la sorte? Et d’ailleurs, qu’elles s’estiment heureuses que ce ne soit qu’une petite mise au ban de l’éducation formelle, n’est-ce pas?
Quel message pour ceux qui font les métiers ?
Cette circulaire peut être aussi comprise de cette manière : écarter les rebuts de la scolarité, puis les placer, pour ne pas dire jeter, dans l’enseignement des métiers et la formation professionnelle. Un message qui n’est pas très glorieux pour tous ces jeunes qui ont choisi la formation professionnelle, mais qui en dit long sur la place et la valeur qui leur sont accordées.
A relire : Grossesses chez les adolescentes : que faut-il faire ?
La décision du ministère de l’éducation est moins réfléchie. Le Burundi a besoin d’élites pour le relever de sa chute; alors privé la jeunesse de l’éducation pour cause de grossesse ou une autre excuse est une grosse bêtise. J’ai vécu au Burundi et je veux voir un jour un BURUNDI développer par la force de sa jeunesse; je porte la jeunesse Burundaise a cœur contre cette réflexion injuste. Je m’aligne derrière ceux qui soutiennent l’éducation de nos sœurs; filles et mères du BURUNDI. J’espère que notre cher Gouvernement va revoir sa décision.
Mes salutations et soutiens depuis la RDC
Article très intéressant!