Il est rare de voir des jeunes burundais publier des livres. Lorsque le tout nouveau livre de Patrick Bizoza a atterri dans mes mains, j’étais excité : « Enfin, un autre jeune burundais qui écrit ». Et en le lisant, dès les premières lignes, je n’ai pas cessé de voir dans ce livre, un guide de vie qui pourrait servir à la jeunesse burundaise actuellement.
Selon une étude menée en 2016 par le Réseau des organisations des jeunes en action (REJA), le chômage chez les jeunes au Burundi est trois fois plus élevé que chez les personnes âgées de 35 ans et plus. Face à cette situation, certains jeunes décident de militer dans un parti politique afin de décrocher un travail, d’autres choisissent de quitte le pays car peut-être ailleurs l’herbe est plus verte, et les plus téméraires tente de joindre les deux bouts comme ils peuvent en faisant de petits boulots ici et là. Pourquoi alors je ramène tout cela dans ce qui est censé être une critique d’un livre ? Parce qu’il s’agit d’une œuvre littéraire de son temps. Et « les temps sont durs » pour la jeunesse burundaise.
Inspirer…
« Life out of a Cage », que l’on peut traduire par « La vie en dehors d’une cage », est un livre de 123 pages. Écrit dans un style proche de celui des livres de développement personnel, il est une forme de guide vers la connaissance de soi. Certes, un peu plus proche des concepts théo-philosophiques « New Age », mais ce petit « guide » invite le lecteur à une forme d’introspection sur sa vie. Pa exemple, à la page 24, Patrick Bizoza écrit : « Tu ne pourras pas vivre une vie meilleure sans avoir découvert ta mission sur Terre, et que tu commences à vivre avec ‘le vrai toi’ ». Inspirant non ?
Le septième chapitre est celui qui m’a le plus intéressé. Intitulé : « Le pouvoir de l’unité pour le développement communautaire ». Patrick Bizoza revient sur l’importance de l’unité dans le processus de développement des communautés. Il écrit : « Si nous pouvions apprendre comment l’unité apporte de bons fruits, nous ne serions pas divisés à cause de nos différences ». On peut voir par-là, un appel aux jeunes burundais toujours en querelle à cause des affiliations politiques…
Un guide, mais quelques hics !
En lisant « Life out of Cage », nous ne cessons pas de rencontrer des références bibliques ici et là. L’auteur use des versets bibliques pour appuyer « ses enseignements ». Or, cher Patrick (maintenant, je vais m’adresser à vous), les (jeunes) lecteurs burundais qui vous liront, ne sont pas tous des chrétiens chevronnés. Certains sont de religions différents de la votre (musulmans, animistes,…) et, d’autres ne se réclament d’aucune croyance. Ainsi, la prochaine fois, pensez à nous tous !
Le livre est aussi en anglais. Certes, ce n’est pas un pêché d’utiliser la langue de Shakespeare mais et si « Life out of Cage » était écrit en français, ne pensez-vous pas qu’il toucherait beaucoup de monde quand l’on sait que notre pays est plus proche de la langue de Molière que celle de Mr Bean ?
Les plus littéraires pourraient aussi vous reprocher de ne pas avoir usé d’un style spécifique. Oui, je l’avoue, moi aussi j’aurais aimé que le livre ait un story telling proche de celui de Paulo Coelho par exemple. Ce n’est pas pour rien que L’Alchimiste est l’un des livres les plus lus dans le monde.
Mais qu’à cela ne tienne, « Life out of Cage » est un livre de son temps. Dans un monde en perpétuel changement, et on ne va pas l’ignorer, les livres de développement personnel ont la côte. Que l’on soit un amoureux de la littérature qui se balade avec un Éric-Emmanuel Schmitt dans les mains ou un simple étudiant de l’université du Burundi dont son prêt-bourse prend une éternité à venir, le genre de livres de développement personnel est là, et des fois, nous sommes obligés d’y jeter un coup d’œil : n’est-ce pas le très regretté Jean d’Ormesson qui disait que « tout livre a pour collaborateur son lecteur » ?
Dans un Burundi où il est difficile de joindre les deux bouts du mois, les jeunes créateurs sont emprisonnés dès qu’ils sortent une chanson qui « dérange », d’autres (jeunes et adultes) sont prêts à tout pour se rendre dans destinations aussi exotique que la Serbie…de tels œuvres (« Life out of Cage ») sont nécessaires. Il nous rappelle qu’au-delà de ce qui se passe à l’extérieur, nous sommes capables de puiser des forces à l’intérieur de nous, pour avancer.