La société burundaise pâtit des attitudes qui régressent son évolution. L’une d’elles, c’est la façon dont certaines personnes mêlent le travail et les relations familiales ou amicales. Ce comportement ignominieux engendre le désaccord, la haine et handicape souvent le travail.
Éric* est membre de l’un des clubs culturels œuvrant en mairie de Bujumbura. Nous avons passé un certain moment ensemble pour converser de l’avenir de ce secteur. Il est 19 heures et nous nous apprêtons à rentrer. Son téléphone sonne. C’est l’une de ses voisines de kugatumba, mais qui habite présentement à Bujumbura. Elle voudrait lui accorder un deal pour sa fête de mariage. Nous nous hâtons chez elle pour qu’il ne rate pas ce marché.
La déception…
Arrivés chez elle, les négociations commencent. Moi, en retrait, je reste spectateur, car je n’avais jamais assisté à des négociations du genre. Après quelques minutes de discussions tendues sur le prix, la future mariée commence à appâter Eric* en lui faisant des yeux de velours pour qu’il restreigne son prix. Elle utilise pas mal d’arguments jusqu’à ce qu’elle sorte la carte de famille : « N’oublie pas que tu es de chez nous. Rappelle-toi comment on s’entraide depuis longtemps lors des fêtes. Tu sais que le budget d’un mariage est lourd. Tu devrais donc me faire une faveur comme une personne de ta famille et non pas comme un client quelconque. »
Après une heure de discussion, Eric* tente de lui expliquer en vain que les soixante-dix mille qu’elle lui propose ne peuvent pas couvrir la location du matériel, le déplacement et le paiement de dix danseurs. Malgré toutes les explications, la voisine du village demeure ferme et ne veut augmenter d’un iota son prix.
A la fin, nous décidons de partir avec une fausse promesse d’Eric, d’y réfléchir plus calmement et d’y répondre ultérieurement.
« Je te jure, chaque fois que je négocie avec les gens, soit de ma famille ou d’autres parmi mes proches connaissances, j’affronte ce genre de difficultés. Comment une affaire de deux cent mille peut se faire à soixante-dix mille. Je ne peux pas accepter de tomber en faillite sous prétexte qu’elle est ma voisine de kugatumba », se confie-t-il sur le chemin de retour.
Pas d’amitié dans le business
Deux jours après, le jeune homme a informé la fille qu’il a carrément laissé choir l’affaire. Et du coup, la future mariée a suspendu tout contact avec lui, arguant que ce dernier n’a pas voulu la soutenir pour son mariage.
Le cas d’Eric n’est pas isolé. Beaucoup de gens s’appuient sur les relations quelconques pour profiter du travail des autres. C’est un comportement à bannir. Un deal, c’est un deal, l’amitié vient après. En plus, les amis et membres de la famille devraient plutôt bien payer le service demandé pour booster le business du concerné, au lieu de le faire reculer en payant la moitié du prix au nom de l’amitié ou de famille. Les Burundais ont d’ailleurs trouvé un bon dicton pour bien résumer tout ça : « Ikijama cinshi cica akazi », pour dire que trop de familiarité tue le travail.