La ferveur des supporters de Musongati a poussé la fédération à les appeler en renfort pour les matchs de l’équipe nationale. Leur pugnacité est devenue leur marque de fabrique. Mais en plus de donner de la voix, ils participent dans bien d’autres volets de la vie du club.
« Los dias que tu juegas sontodolo que soy (les jours où tu joues, je suis tout ce que je suis), entend-on dans l’hymne dédié au dixième sacre du Real Madrid en Champions League. Autre club, autre pays, même ferveur. Les jours où Musongati joue, le spectre du match plane sur la ville. Gitega se pare de jaune et de vert. Les deux couleurs sont omniprésentes.
Sur la deuxième avenue numéro 50 du quartier Nyamugari, un ménage revoit ses petites habitudes journalières les jours de matchs. Depuis plus de deux décennies, c’est là qu’est préparée la nourriture des joueurs, autant pour les matchs à domicile que quand l’équipe est en déplacement. Tout cela sans demander le moindre sou à l’équipe.
Ali Nahimana, barbe blanche abondante est maître de céans. Ce mordu du foot est fan des jaune et vert des premières heures. « Depuis sa création dans les années 80 avec la fusion des équipes Mbogo et Nzovu », raconte-t-il avec une fierté non feinte. Il partage ce virus avec sa famille. Sa femme, plus connue sous le nom de Mama Musongati n’est pas la dernière des supportrices. « Quand nous étions encore fiancés, je me souviens qu’on la chassait de chez elle parce qu’elle vivait dans un coin acquis à l’équipe rivale du moment, Zèbre FC », raconte Ali.
Si Mama Musongati a vécu des sales quarts d’heure infligés par les supporters des tifosi de Zèbre, c’est parce que Gitega a comme ce penchant pour un football bipolarisé. Il fut un temps, être un fan de Zèbre ou de Musongati était une seconde identité. Même les autres équipes du championnat local étaient d’une des obédiences entre les deux cadors. Cela donnait lieu à des derbys particulièrement bouillants. Une tradition qui se perpétue avec la montée en puissance de Flambeau du centre, le vice champion national.
Un douzième joueur dans les gradins, mais pas que…
Omar Itangishaka plus connu sous le sobriquet de Manyinya est, si l’on peut dire, tombé dans le chaudron de la musongatimania quand il était petit, « je dirais que je suis carrément né au stade, j’ai grandi au stade », clame-t-il haut et fort. Il est actuellement à la tête du collectif des fans de Musongati. Secrétaire général adjoint de l’équipe quand il était encore un jeune élève de neuvième puis gardien titulaire indiscutable pendant plusieurs saisons, il est un fin connaisseur de l’histoire du club.
Si vous voyez les fans qui se sont enduits de jaune et vert, le chœur accompagnant leur fanfare pour donner de la voix dans les gradins, Manyinya y est pour quelque chose. Tout part du retour de Musongati dans l’élite en 2016. Pour maintenir l’équipe en première division et rêver des titres, ils se sont inspirés du modèle de Rayon sport pour le management des supporters.
L’influence est flagrante : le grand consortium des fans de Rayon sport est appelé « Ijwiry’aba Rayon », Musongati a « Ijwirya Musongati ». Et si vous venez du Rwanda et que vous attendez quelqu’un dire « Gikundiro » à Gitega, sachez qu’il ne parle pas des bleus et blancs de Kigali !
45 groupes WhatsApp au four et au moulin
Sans sponsor officiel, Musongati roule en grande partie grâce aux fonds récoltés auprès de ses supporters. Ceux-ci sont regroupés en 45 groupes WhatsApp. « Chaque groupe a un rôle spécifique qui lui est imparti le jour du match, explique Dalila, membre d’un de ces groupes dénommé Ihangiro. Il peut y avoir par exemple des groupes dont les membres se chargent des primes de match des joueurs et d’autres qui prennent en main tout ce qui est provisions. »
Le titre national s’est joué dans les ultimes journées du championnat. Pendant une grande partie de la compétition, Musongati était parmi les équipes qui avaient plus de chances de remporter ce graal qui lui échappe encore. Pour le soulever un jour, nul doute que l’exploit reviendra en partie à la ferveur que suscite la musongatimania.