article comment count is: 0

Billet retour : une escapade à Gatumba

Une petite équipe de Yaga a emprunté la route de Gatumba récemment. Entre trafic intense dû à la proximité avec la frontière, inondations, crues de la Rusizi et les malheurs qui ont frappé certains endroits de Gatumba, le petit groupe de curieux voulait voir à quoi ressemble la vie d’une zone frontalière avec la RDC.

Nous sommes 10h au bureau de Yaga. Avec trois de mes collègues, nous embarquons vers Gatumba. Je suis aussi curieux de voir si le niveau de l’eau qui a envahi certaines localités de Gatumba a baissé ou pas. Après Kajaga, nous voici Kigaramango. Tout le monde s’étonne des maisons qui y poussent. « Qui a osé attribuer des parcelles se trouvant dans une zone aussi dangereuse ? », demande une collègue, sans réponse. Nous traversons la Rusizi. A gauche de la route, les bureaux des responsables du parc sont en démolition. Espérons que l’on veut construire un autre bâtiment plus moderne.

Chemin faisant, nous demandons à notre conductrice de continuer jusqu’à la frontière burundo-congolaise. La dame appuie sur le champignon et le véhicule prend de la vitesse sur cette route en bon état. Chacun veut voir comment la situation se présente.

Une frontière mouvementée

Nous voici au milieu de nulle part, où seuls les papyrus s’étendent à perte de vue. Nous croisons des véhicules, en majorité de transport en commun, immatriculés au Burundi ou en RDC. Après avoir roulé 3 km supplémentaires dans la zone, nous arrivons à la frontière. La vigilance est de mise. Les agents policiers, très attentifs, guident les véhicules dont la plupart des conducteurs veulent tricher pour dépasser. On voit aussi des personnes qui ne font rien mais qui ont l’air d’observer tout ce qui se passe. « Il doit y avoir beaucoup d’agents de renseignement, c’est normal », glisse un vendeur ambulant.

Nous passons quelques minutes sous un soleil de plomb. Nous remarquons les personnes en situation de handicap transportant des marchandises sur leurs tricycles se faufilant entre les véhicules. Il paraît que les personnes en situation de handicap ne paient pas les frais de dédouanement des marchandises. Après quelque temps, nous faisons demi-tour. Cap sur Warubondo.

Une ZES à Warubondo ? Quelle idée !

Nous quittons la RN4 asphaltée pour prendre une route en terre battue. Le soleil n’est pas du tout clément. La route que nous prenons me rappelle le terrible enterrement des 19 personnes assassinées, fin 2023. Yaga en avait parlé.

Plus loin, nous atteignons des bâtiments abandonnes qui semblent n’avoir jamais servi. Après quelques renseignements nous apprenons que ces installations étaient destinées à accueillir la Zone économique spéciale (ZES), une initiative pour booster la production industrielle du pays.   « Mais qu’est-ce qu’il a de si spéciale, cet endroit ? Comment peut-on penser installer une ZES avec cette route en piteux état ? », s’interroge un collègue. Le Gen Z n’est pas habitué à fouler le pied dans des endroits pareils. Après quelques kilomètres sur cette route tortueuse, nous voici près de deux constructions bizarres.

Deux clôtures surmontées par des fils de fer sont visibles. La première peinte aux couleurs nationales est le dernier demeure de près de 40 personnes victimes du carnage de Gatumba de septembre 2011. Elles ont été massacrées alors qu’ils étanchaient leur soif dans un bar. Je ne vais pas fatiguer les lecteurs en leur parlant du procès qui s’en est suivi. Il suffit juste de parler d’un certain feu Nzarabu et Mukono, ceux qui étaient adultes à l’époque s’en rappelleront. L’autre clôture entoure le site où sont enterrés 166 réfugiés congolais dont 152 Banyamulenge et 14 Babembe massacrés en 2004.

Last but not least…

Plus loin, nous arrivons à un autre cimetière où les 19 personnes assassinées fin 2023, dont je vous ai déjà parlé en haut, ont été ensevelies. Les cris stridents des proches en pleurs me reviennent en mémoire. Les noms des bébés, des personnes du troisième âge assassinés sont encore visibles sur les croix ! Sur un espace réduit, trois cimetières des gens qui ne sont pas morts de mort naturelle, un ZES en état de délabrement, très peu de maisons, aucune âme qui vive, le coin est finalement triste. Nous décidons de faire demi-tour. On en a assez vu.

 

Est-ce que vous avez trouvé cet article utile?

Partagez-nous votre opinion