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La reconstruction du marché central de Bujumbura : des promesses en l’air ?

«Si rien ne change, nous avons décidé au niveau du conseil des ministres que les travaux commencent au cours de cette année, 2017». Cette déclaration est du ministre des Travaux publics, Jean Bosco Ntunzwenimana. C’était le 28 janvier 2017, au lendemain du 4ème anniversaire de l’incendie du marché central du Bujumbura. Une année après cette promesse vraisemblablement tombée aux oubliettes, les victimes craignent de voir leurs espoirs repartir en fumée, encore une fois.

Claude est un célibataire de 31 ans. Au marché central, il vendait des friperies. «Ça rapportait beaucoup d’argent. Je parvenais à payer le loyer, à aider mes deux frères sur le banc de l’école et à entretenir ma mère». Apres le cauchemar, il a glané un peu d’argent auprès des amis. « J’ai réussi à avoir un million de Fbu». Ce n’était pas facile. Il ne pouvait pas emprunter de l’argent à ses amis vu qu’un bon nombre était dans le même embarras. En plus, il ne pouvait pas se tourner vers les banques. Il n’avait pas d’hypothèque.

Claude a dû vendre tous ses biens de valeur. Il évoque notamment meubles, bijoux et habits. Le jeune aspirant au mariage a pu redémarrer une affaire. Il achète du charbon en provinces et le revend en mairie de Bujumbura.

Quant à Mungenge, père de deux enfants, il vendait des habits de sport dans le marché central. Son stand était situé à un endroit stratégique, affirme-t-il. Il était juste à la sortie de la partie ouest. Tous les habitants des quartiers sud de la capitale passaient devant ses habits. «Je vendais beaucoup ». Après l’incendie, il témoigne avoir passé plus d’une année sans emploi. Il a dû céder sa parcelle pour reprendre une activité. Il vend actuellement des chaussures pour dames au marché de Ruvumera en commune Mukaza de la mairie de Bujumbura. Une situation à laquelle il a toujours du mal à se remettre.

Gashaka, un vieux de 55 ans, garde en mémoire la tragédie du 27 janvier 2013. Il a été complétement ruiné. Il avait un capital de plus 20 millions. Tout est parti en fumée. Il sera désœuvré pendant deux années. Mais, grâce à la solidarité de sa famille, il tient aujourd’hui une petite boutique au marché de Ruvumera. « Ils se sont cotisés et bon gestionnaire, j’essaie de gagner ma vie». Néanmoins, il soutient que son business n’a rien à voir avec celui d’avant l’incendie du marché. «Je travaille à perte. Le pouvoir d’achat des Burundais diminue de jour en jour et c’est nous les commerçants qui en subissons les conséquences». M. Gashaka croise les doigts pour que le marché central de Bujumbura rouvre. «Cependant j’ai l’impression que les autorités ne s’y mettent pas », lâche celui qui espère regagner son stand bientôt.

Espoir partagé avec Éric. Celui-ci est aujourd’hui aide-chauffeur (« convoyeur » dans le jargon local) des bus dans la ville de Bujumbura mais avant l’incendie, il avait avec son père une place dans le marché central. Ils vendaient des sacs à dos. Ils brassaient des affaires. «Nous gagnions au moins 30 mille Fbu chaque jour ».

Quelques jours après le drame, son père est retourné à la campagne. Eric, qui a abandonné les études au niveau de l’école primaire, est obligé de faire de petits boulots pour survivre.

Où en est-on avec la parole du ministre ?

Ce jour-là, les anciens occupants ont lancé un ouf de soulagement. Certes, le marché n’allait pas rouvrir. Mais, la promesse du début des travaux, c’était un bon signe qu’ils allaient un jour retrouver leurs stands.

Pourtant, plus d’une année après, le site de l’ancien marché reste tel qu’il était. Des décombres, des pourritures, de tristes images surtout quand on se rappelle des milliers de gens qui le fréquentaient et de ce que représentait ce marché dans l’économie nationale.

Le projet jeté aux oubliettes ?

Etonnamment, le même ministre, vendredi 26 janvier, lors de la présentation de son bilan de l’année passée, il n’a pipé mot sur la reconstruction du marché central de Bujumbura.

Encore plus troublant, il n’a pas annoncé ce projet parmi les perspectives de cette année en cours. Il a parlé du bitumage et de la réhabilitation des routes, de la modernisation du port de Bujumbura, de l’extension et de la modernisation de l’aéroport. Mais, jamais du marché central!

Où en est-il alors ? La question reste en suspens. Le ministre a annoncé le début des travaux. Ceux-ci n’ont pas eu lieu. Normalement, il devrait s’expliquer ne fût-ce que pour informer les Burundais- car c’est leur droit- qui ont hâte de voir s’élever un grand centre commercial à la place des débris de l’ancien marché, comme promis. Le gouvernement n’avait-il pas assuré que « bientôt s’élèvera un Mall de cinq niveaux doté d’un parking souterrain, avec une capacité d’accueil de plus de 300 véhicules » ?

Tout le Burundi a hâte de revoir ce site aujourd’hui dans la pourriture grouiller de monde comme jadis.


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