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Le code des investissements : le projet de loi va-t-il trop loin ?

Le nouveau code d’investissement fait débat dans les milieux économiques du pays. Gitega veut attirer des investissements consistants. Certains hommes d’affaires et analystes trouvent que la barre pour bénéficier des avantages fiscaux est placée très haut, ce qui risque plutôt de décourager les investissements. N’aurait-il pas fallu un débat technique et profond avant l’adoption de cette loi ?

Le 29 avril 2021, les élus du peuple se sont prononcés à l’unanimité en faveur du nouveau code des investissements. Le projet de loi avait été adopté en conseil des ministres à la mi-février. L’une des nouveautés de cette loi : le montant minimum d’investissement pour être éligible aux avantages du code des investissements est revu à la hausse. Il passe de 100 millions de BIF en Mairie de Bujumbura (la moitié dans d’autres localités) à 500 000 dollars américains (la moitié dans d’autres localités). Selon l’Exécutif, le nouveau code des investissements vise à attirer des investissements de qualité qui produisent un impact réel et visible en termes de création d’emplois décents.   

La barre est placée trop haut

Cette innovation ne fait pas l’unanimité auprès des hommes d’affaires, des économistes et des acteurs économiques du pays. Denis Nshimirimana, secrétaire général de la Chambre Fédérale du Commerce et d’Industrie du Burundi (CFCIB) ne mâche pas ses mots : « Je suis vraiment déçu. L’Etat n’a pas considéré notre proposition. Nous avons proposé un minima de 100 millions de BIF, environ 50 mille dollars.»

Ce responsable fait savoir que ce projet de loi a été rejeté par les élus du peuple en 2019. La chambre du commerce était donc contre le minima de 500 000 dollars américains.

Selon lui, le nouveau code aura des conséquences sur les investissements : « Je reste convaincu que la barre des 500 000 dollars américains va freiner les investissements. ». Peut-être que les députés qui ont voté ce projet n’ont pas été avisés sur les conséquences dudit code sur l’économie du pays.

Nshimirima tient à préciser que les entreprises ayant de gros capitaux ne créent pas toujours beaucoup d’emplois et de richesses. A titre d’exemple, explique-t-il, une entreprise peut investir 500 000 dollars et créer 40 emplois alors celle qui investit 50 000 dollars embauche 80 personnes.

Selon un analyste qui a voulu garder l’anonymat, le Burundi est une petite économie. Il lui faut un code d’investissement qui impulse les petites unités de transformation des produits agro-alimentaires. Soutenir les investisseurs locaux qui détiennent des petits capitaux est une priorité. 

La difficulté d’accès au crédit, l’autre écueil 

Pour cet expert en banque, ce minima n’incite pas les hommes d’affaires locaux à investir. «Combien d’hommes d’affaire locaux détiennent un capital de 500 000 dollars ?», s’interroge-t-il. Peu d’hommes d’affaires burundais détiennent des investissements de plus de 200 millions de BIF. D’autres sont des jeunes entrepreneurs ayant moins de 20 millions de BIF. 

D’après ce banquier, un prêt de 500 000 dollars est dans la catégorie des prêts souvent considérés comme plus risqués par les banques. Pour ce moment, peu de banques prendraient le risque d’accorder un prêt de plus de 1 milliard BIF à un homme d’affaires.    

Le nouveau code d’investissement en cours de révision préoccupe donc. Gitega veut attirer les investissements de qualité tandis que certains spécialistes trouvent que la barre des minima d’investissement pour bénéficier des avantages fiscaux est trop élevée. 

Un débat s’impose

A mon humble avis, le code des investissements est l’un des principaux outils de la politique économique de l’Etat. Il détermine les avantages financiers et fiscaux offerts aux investisseurs étrangers ou nationaux. Ses dispositions sont souvent conçues de façon à encourager la création des richesses et d’emplois. Ce code est censé renforcer le tissu industriel et fortifier les investissements publics par des investissements privés locaux dans un nombre de secteurs.

C’est pour cela que les hommes d’affaires, les banques, les médias, les experts doivent débattre sur le projet du code des investissements avant son adoption par l’assemblée nationale. Après le débat, le ministère du commerce devrait organiser un atelier de validation dudit code. Ce n’est pas tard. Le débat est encore possible car le nouveau code n’est pas encore promulgué.

 

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