Comme le reste du monde, Bujumbura a célébré la nouvelle année qui vient de commencer. Un moment de fête, mais que tous les Burundais n’ont pas pu pleinement savourer, pour diverses raisons. Voici la »Bonane » telle que ce blogueur l’a vécue.
Je remercie Dieu et mon employeur, car j’ai bien reçu mon salaire du mois de décembre. Cependant, il scie de signaler, hic at nunc, que ce pécule ne me permet plus de faire de grandes folies ni de faire la tournée des bars comme je le faisais il y a encore peu, à cause de cette foutue inflation qui n’en finit pas. La faute à qui ? Je ne suis pas la personne indiquée pour le dire.
C’est pourquoi j’ai passé la journée du 31 décembre 2024 chez moi, jusqu’à 21 h, afin de ne pas dépenser ce que je n’ai pas et surtout pour éviter tout problème avec mon bailleur qui, comme les Anglais, pratique le ‘’sharp on time’’ ; vous voyez ce que je veux dire ? Bref, à 21 h, je quitte mon humble demeure, sobre comme un pasteur méthodiste, pour aller découvrir à quoi ressemble le fameux réveillon qu’il ne faut surtout pas manquer.
Ma première surprise ? Les rues des quartiers sud, où j’habite, sont anormalement calmes. Mais contre mauvaise fortune, je fais bon cœur. Je me rends dans un premier bar, car amateur de la dive bouteille que je suis, je n’ai pas envie de dire au revoir à 2024 « lucide comme un plouc » (façon de parler, vous l’aurez compris).
A sec …
Là-bas, je suis surpris une deuxième fois ; les tenanciers m’informent qu’il y a quelques Beshu (petites bouteilles de la bière Amstel) disponibles. Et ce n’est pas tout ; pour en avoir un, il faut d’abord acheter un Vital’o, cette foutue eau gazeuse que la Brarudi vient tout juste de réinventer. « Iyibize nabi uyima ifu », dit la sagesse de nos ancêtres. J’achète donc deux « précieux » Beshu accompagnés de deux encombrants Vital’o, dont je ne sais absolument pas quoi faire.
Échec et mat
En deux temps, trois mouvements, voilà que j’avale d’un trait mes deux pauvres Beshu, histoire yo « gukura ibitangurigwa mu muhogo » (jargon des buveurs : me rincer le gosier). Je hèle un serveur en toute hâte pour commander deux autres, tout en me demandant ce que je vais bien pouvoir faire de mes deux Vital’o supplémentaires. C’est le serveur qui m’informe qu’il n’y a plus de Beshu en stock. Je réprime une envie de crier et me forge même un sourire jaune pour faire don de mes deux Vital’o au serveur.
Je remonte l’avenue des bus (le flou est volontaire) pour me retrouver dans un petit bar, pas très loin de l’église Saint-Anne de Kinanira. Je m’y engouffre avec la ferme intention de faire un stock conséquent, peu importe le nombre de Vital’o que je vais devoir payer sans les boire.
Troisième surprise : il n’y a que des Amstels de 65 cl. Pire encore, je n’ai droit qu’à une seule bouteille, et à condition d’acheter une brochette qui coûte 7 000 Fbu. J’en avale une, accompagnée d’une brochette qui ne paie pas de mine. Je tente même de soudoyer le serveur avec un petit billet de mille Fbu pour qu’il m’octroie une autre bouteille de ce précieux liquide, même s’il faut me taper encore une fois cette brochette peu ragoûtante. Il me jette un NIET catégorique qui frappe comme une dague dans mon amour-propre.
Autres lieux, autres bières
Toutes ces péripéties m’ont déjà coûté deux heures. Tic-tac, le réveillon approche. Je sillonne les rues du quartier pour enfin tomber sur un bar qui ne vend que du Buryohe et du Soma fabriqués à Ngozi. Pour assurer mes arrières, j’en achète trois Soma bien frais, en espérant qu’ils m’aideront à ‘’traverser’’ le réveillon. Je m’installe confortablement pour observer 2024 mourir de sa belle mort.
Armé de mes Soma, je regarde les gens (il en reste quand même très peu) se trémousser sous des rythmes pas vraiment catholiques. À l’approche de minuit, il ne reste qu’une petite centaine. Minuit pile, j’entends cinq ou six cris, pas vraiment impressionnants, « Bonane…!!! ». Il ne me reste plus qu’un seul Soma. Un ami de Kamenge m’appelle sur mon WhatsApp pour me souhaiter la bonne année. Après m’avoir adressé ses vœux, il me demande d’une voix geignarde si je ne connais pas un endroit où il pourrait trouver Amstel ou Primus ! Je lui ris au nez et il coupe la communication sans m’avertir.
Un Saint-Sylvestre qui n’augure rien de bon
Après mes Soma, et puisque presque tous les bars de Kinanira étaient à sec, je décide de rentrer pour me coucher. Dans mon lit, je me demande ce qu’est devenue vraiment la Brarudi, cette entreprise qui est censée détenir le monopole du marché de la bière au Burundi. Le 1er janvier 2025, je passe des coups de fil à des amis qui se trouvent dans différents quartiers de Bujumbura. Le constat est le même : même dans la capitale économique du pays, l’entreprise leader n’a pas été capable de distribuer suffisamment de ses produits. Que sera 2025 pour les buveurs ?
J’ai écouté ‘’religieusement’’ le Président dire que les fonctionnaires de l’État passent leur temps à boire pendant les heures de travail, même l’avant midi. Une question : banywa izihe ko twe no kuri Bonane Twabuze ? Ziva he ? Zitangirwa he ? Là, j’évite d’évoquer les indicateurs catastrophiques de l’économie burundaise que les confrères d’Ikiriho rappellent, pour ne pas donner l’impression d’établir une relation de causalité. The last, but not the least : si la Brarudi n’est plus en mesure de couvrir les besoins du pays, et qu’il vient d’y avoir une table ronde des partenaires financiers et des investisseurs privés, puisque le pays vit au rythme des pénuries de produits Brarudi depuis quelques années, leur a-t-on parlé de cette opportunité d’affaire ?
Mais encore, dans sa croisade de fin d’année, le Président de la République nous a promis un avenir radieux pour 2025. Radieux sans la « sainte » mousse ? Comment ?
Nimba ivyo wanditse arivyo, ukaba kuva usohotse 21h gushika minuit waranyose bechou 2, amstel ndende 1, soma 3, ukaba kandi warugikeneye n’izindi zo kurenzako, ugaca wiyumvira ko mu Burundi hari hafi 14 millions z’abantu bakora kandi biyumvira nk’uko kwawe, on n’est pas encore au bout de nos peines.
Ariko ndizeye ko wavyanditse uko kugira nyene ube uratuyagira amagogwa igihugu kigowe, mugabo apana kutubwira ibitigira vy’amacupa wari witeze kunywa nk’uko umnego niyo majambere. Ndibwira nyene ko kunywa inzoga nyinshi ku barundi biri no mubiduteye amagogwa. « Abana barara ubusa kubera akayoga » 8Ni ururirimbo nakuze numva. Knadi si ugutemura