Quels sont les dangers de la mauvaise utilisation des antibiotiques et d’autres antimicrobiens ? Concernent-ils les seuls humains ? Quand peut-on parler de la résistance aux antimicrobiens ? Comment peut-on s’en prévenir ? Telles sont les questions auxquelles les professionnels de la santé ont essayé de répondre à l’occasion de la célébration la semaine mondiale pour le bon usage des antimicrobiens qui a eu lieu du 18 au 24 novembre. Yaga y a dépêché un blogueur.
L’OMS qualifie les antimicrobiens d’armes essentielles pour lutter contre les maladies chez l’être humain, les animaux et les plantes. Cette catégorie de médicaments englobe les antibiotiques, les antiviraux, les antifongiques et antiparasitaires.
On parle de résistance aux antimicrobiens (RAM), lorsque les médicaments n’agissent plus comme ils le devraient contre les maladies transmissibles. Les microbes s’adaptent et développent des caractéristiques leur permettant d’y résister ou d’en neutraliser les effets.
Le Pharmacien Donatien Bigirimana, est chargé du programme Médicaments Essentiels au Bureau de l’OMS du Burundi. Il a présenté ces quelques exemples : « Dans le monde, 480 000 personnes contractent chaque année une tuberculose multi-résistante. Et la résistance commence aussi à compliquer la lutte contre le VIH et le paludisme. »
Une véritable épée de Damoclès
Le Dr. Pharmacien Dedith Mbonyingingo, directeur général de l’ABREMA (Autorité Burundaise de Régulation des Médicaments et des Aliments) a fait un exposé sur le danger que présente la résistance aux antimicrobiens. « Avec la RAM, il survient des infections difficiles à traiter. Ce qui accroit leur risque de propagation. La durée d’hospitalisation augmente ainsi que le coût global des soins de santé. La menace de la résistance aux antimicrobiens peut donc remettre en cause des décennies des progrès enregistrés dans la lutte contre les maladies infectieuses comme le VIH/SIDA, les infections sexuellement transmissibles, la tuberculose et le paludisme ».
En outre, il ne faut pas oublier que le rapport du Groupe spécial de coordination inter-institutions des Nations Unies sur la résistance aux antimicrobiens (IACG) avait déjà sonné l’alerte en 2019 : « Au moins 700 000 personnes décèdent chaque année du fait de maladies pharmacorésistantes, parmi lesquelles 230 000 meurent de la tuberculose multirésistante. Si aucune mesure n’est prise, les maladies résistantes aux médicaments pourraient être responsables de 10 millions de décès chaque année d’ici à 2050. »
Pire, selon les projections dudit rapport, à l’horizon 2030, la résistance aux antimicrobiens pourra faire basculer jusqu’à 24 millions de personnes dans l’extrême pauvreté.
Trop d’antibiotiques tuent l’antibiotique
La résistance aux antimicrobiens est un phénomène naturel. Mais, elle est accélérée par le mauvais usage de ces médicaments chez l’homme et chez les animaux. L’automédication en est l’exemple classique. Un autre fait dangereux est l’usage excessif ou abusif des antibiotiques. Trop d’antibiotiques tuent l’antibiotique. Cette réalité est aussi valable dans le secteur agro-pastoral.
« Dans les facteurs exacerbant la RAM au Burundi, on a entre autres l’automédication, le non-respect des schémas de traitement, la prescription non optimale et l’administration excessive de médicaments antimicrobiens par les professionnels de santé, le manque de réglementation sur la disponibilité et l’utilisation des médicaments, la promotion inappropriée des médicaments ainsi que des motifs plus lucratifs pour la vente des médicaments. », a tenu à préciser le pharmacien Emmanuel Bamenyekanye, directeur des laboratoires de Biologie médicale.
Tous contre la RAM
Le pharmacien Donatien Bigirimana donne la ligne directrice de réduction de l’impact et la limitation de la propagation des résistances. « On doit prendre des mesures à tous les niveaux de la société accompagnées des stratégies efficaces de mise en application. Tout le monde (cliniciens, laborantins, pharmaciens, vétérinaires, éleveurs, chercheurs et patients) doit prendre conscience de cette menace et s’engager pour limiter la spirale de la résistance aux antimicrobiens.»
Sur le plan individuel, il ne faut utiliser ces médicaments que s’ils sont prescrits par un professionnel de santé qualifié. Ne jamais partager un antibiotique ou autre antimicrobien avec d’autres personnes. Sans oublier que les règles de base d’hygiène doivent être respectées pour prévenir les infections.