Le pouvoir de Bujumbura ne cesse de réitérer son appel aux Burundais en exil de rentrer au pays. Mais pour certains jeunes burundais réfugiés à l’étranger, les circonstances ne se prêtent pas encore à un retour apaisé.
Revenir… J’aimerais dire que l’offre est alléchante. Mais je ne le pense pas. Comprenez-moi : ce n’est pas que mon pays ne me manque pas ! Oh, que j’aimerais rentrer. Parcourir à nouveau les rues de Bujumbura, dans l’insouciance. J’aimerais reparler Kirundi, partout, avec tout le monde. J’aimerais rire aux éclats, avec la sensation et l’assurance d’être enfin à la maison.
Mais je ne suis plus pressée de rentrer. Avec le temps, j’ai appris à me sentir chez moi dans chaque pays qui daigne m’ouvrir ses bras. Et je patiente. J’essaie de m’occuper assez pour ne plus ressentir toute cette nostalgie et ce manque.
Alors je trouve grossier de dire que « les portes sont ouvertes pour tous ceux qui le veulent. » Parce que, qui ne le voudrait pas ? Je suis peut-être « froussarde » mais dans un tel contexte, je ne pense pas que ‘‘vouloir soit pouvoir.’’
« Paroles, paroles… »
«J’aimerai porter à la connaissance de tout le monde qu’il n’y a aucun problème de sécurité au pays », dit le porte-parole du ministère de l’Intérieur. Sauf que la paix ne se dit pas. Elle se sent. Elle se vit. Elle est ce qu’il y a de plus évident. Elle n’a pas besoin de notifications, de rappels, encore moins de déclarations.
«Même la Communauté internationale commence à se rendre à l’évidence et l’atteste », continue-t-il. La même communauté internationale contre laquelle ‘‘le peuple burundais’’ manifeste au moins une fois le mois ? Cette communauté dont les rapports ne cessent de vous irriter? Ou alors celle dont fait partie Monsieur Doudou Diène, Madame Lucy Asuagbor et Madame Françoise Hampson, les trois ‘‘nouvelles’’ persona non grata sur le territoire burundais, suite à leur rapport rendu à Genève ? Un rapport que, évidemment, le gouvernement juge diffamatoire et mensonger, car ne le caressant pas dans le sens du poil…
Que « les 34 hommes politiques qui ont déraillé en 2015 » soient rappelés à la maison, c’est normal. Ils ont des statuts qui leur donnent cette garantie que moi je n’ai pas. Cette assurance qu’ils ne passeront pas inaperçus, et que par conséquent, le gouvernement n’aura pas d’autres choix que de les protéger pour qu’ils restent en vie. Parce qu’il a des choses à prouver aux yeux du monde. Tant pis pour eux s’ils se laissent exposer comme des bêtes de foire. De toute façon, eux, comme le régime en place, ils sont dans un jeu politique qui ne calcule pas trop les jeunes comme moi.
Je voudrais donc rentrer au Burundi, c’est clair. Mais avant, j’écouterai mon instinct. L’avis de ce gouvernement qui m’a poussé à la porte de sortie, je m’en passerai volontiers. D’ailleurs, même l’enfant prodigue s’est ramené tout seul.
A relire : Les réfugiés burundais : entre retour et exil !
« Mais je ne suis plus pressée de rentrer. Avec le temps, j’ai appris à me sentir chez moi dans chaque pays qui daigne m’ouvrir ses bras. » Soyez libre et mangez ce que l’on vous offre! Cependant, il y en a qui ne sont pas bien accueillis et qui ne se sentent pas à l’aise là où ils sont. A eux, l’appel est lancé de ne pas disputer les épluchures aux cochons, au contraire de rentrer.
Bien dit.