Autrefois perçue comme un trésor à protéger, la virginité semble aujourd’hui être devenue un sujet de moquerie ou de malaise. Qu’elle soit brandie, cachée, niée ou revendiquée, elle n’échappe pas au jugement. Et si, finalement, la virginité ne disait pas grand-chose de nos corps… mais tout de notre société ?
Laissez-moi vous raconter une scène. Une scène banale, anodine peut-être qui m’est venue dans la tête à la lecture d’un article (virginité). On était entre amis, autour de verres et de rires. Une ambiance légère, sans prétention. Et puis, comme souvent, la conversation dérive… et glisse dans ces zones fragiles, où le regard pèse plus que les mots. Là, une fille douce, simple, sincère lâche, presque comme un souffle : « Moi je suis encore vierge. » Et là, silence. Puis… les rires
Des rires pas méchants. Des rires gênés, nerveux, moqueurs peut-être. Mais des rires tout de même. Comme si elle venait d’avouer une anomalie, une bizarrerie, une vérité qu’il ne fallait surtout pas dire à voix haute. Une autre amie a levé les yeux au ciel : « Les gars aiment les filles avec de l’expérience. »
Le CV de l’intimité
Apparemment, on demande de l’expérience partout maintenant. Même au lit.
J’ai repensé à cette scène longtemps après. Et je me suis dit : mais depuis quand ne pas avoir couché est devenu une honte ? Depuis quand la virginité est-elle perçue comme une faiblesse, un défaut, un signe de « manque de pratique » ? Est-ce qu’on a glissé dans un monde où l’innocence gêne, où le silence du corps fait trop de bruit ?
Autrefois, c’était aux garçons de mentir. Pour se faire mousser. Pour paraître virils, expérimentés, dangereux. « Moi j’ai déjà fait ça », « Avec deux filles en même temps », « Dans une voiture ». C’était une compétition absurde, mais c’était clair : il fallait avoir fait, pour être quelqu’un.
Aujourd’hui, la pression a changé de camp. Ce sont les filles qui mentent. Pas pour se vanter. Non. Pour éviter d’être vues comme des filles sans histoires. Ou plutôt : sans expérience. Parce qu’une fille vierge, aujourd’hui, ce serait quoi ? Une coincée. Une sainte-nitouche. Une qui n’a pas de vécu. Une qui ne sait pas faire.
Les sermons à sens unique
C’est étrange, non ? Cette inversion. Cette époque où la pudeur dérange, où l’attente agace, où le mot vierge sonne comme un mot d’un autre temps. On est passés d’une ère où la virginité était une obligation… à une ère où elle devient presque une honte. Deux extrêmes. Aucune liberté.
On dit aux filles à l’église : « Garde ta virginité. » Mais pourquoi ne dit-on pas la même chose aux garçons ? Pourquoi le sermon ne monte-t-il que d’un côté de la chaire ? Pourquoi l’honneur, l’attente, la pureté seraient-ils des valeurs à sens unique ? Pourquoi leur enseignement s’arrête-t-il aux frontières du vagin ?
La vérité, c’est que la virginité n’est plus vraiment une affaire biologique. C’est une affaire sociale. Une affaire symbolique. Un champ de bataille entre traditions et modernité, entre liberté et pression, entre attentes et réalité. Ce n’est plus un hymen, c’est une idée. Une idée lourde, pesante, étouffante parfois.
La prochaine fois qu’une fille dira qu’elle est vierge, ne riez pas. La prochaine fois qu’un garçon dira qu’il veut attendre, ne le traitez pas de bizarre. Apprenez plutôt à être libre de vos choix et à respecter la liberté des autres