article comment count is: 0

RDC : La diaspora burundaise divisée sur la crise actuelle

Le blogueur Armel Derere, de passage en République démocratique du Congo, a pu rencontrer quelques ressortissants burundais. Ils lui ont fait part de leur perception de la crise politico-sociale que traverse le Burundi. Des avis aussi tranchés que divergents.

Je suis à l’aéroport de Goma, j’attends le vol de 14h pour Kinshasa, la capitale de la RDC. Il est 11h30 quand j’entends un « Bite ? » (bonjour). Je tourne le regard derrière moi. Leo, un ami de longue date avec qui j’ai gardé contact sur Facebook me toise gentiment. Il est originaire de l’actuelle province de Rumonge, dans le sud-ouest du Burundi, mais vit en RDC depuis 2010. Il est accompagné de deux amis, Mechack, un Burundais, et Alex, un Congolais. « Tu fuis la tyrannie de Nkurunziza ? », me demande-t-il. « Non, c’est pour des raisons professionnelles que je sillonne la RDC », répondé-je.

Visions opposées

Leo a sa vision de la crise burundaise. Pour lui, le président Nkurunziza n’aurait pas dû se représenter pour un troisième mandat contesté. La famille de Leo s’est exilée en Zambie depuis mai 2015, au lendemain du coup d’État manqué. « Mon cher ami, fuyez ce président tant que vous avez la possibilité. Il va ruiner ce pays à petit feu », me murmure-t-il.

Mechack, originaire de la province de Cibitoke au nord-ouest du Burundi, a quant à lui un avis opposé à celui de Leo. Pour lui, le pouvoir de Kigali n’a jamais avalé le fait qu’il y ait un président issu d’une rébellion hutu au Burundi. « Le pouvoir actuel rwandais est issu d’une rébellion tutsi qui a chassé les génocidaires hutu rwandais. Ces derniers auraient collaboré avec la rébellion CNDD-FDD dans les années de maquis (1996-2003) pour faire face aux attaques de l’armée de Kigali,  venue les pourchasser en RDC », explique Mechack. Pour lui, Kigali veut venger cet échec en tentant de renverser le pouvoir CNDD-FDD.

Solutions à l’horizon ?

« Puisque à chaque fois qu’une crise politique fait surface au Burundi elle finit par avoir une dimension ethnique, pourquoi ne pas créer une solution durable ? Une solution à deux Etats ? », intervient Alex le Congolais. « Comme ça vous créez d’un côté un Etat hutu et de l’autre un Etat tutsi, et de ce fait, il y aura d’un côté un pouvoir hutu éternel et de l’autre un pouvoir tutsi éternel », ajoute-t-il avec tout son sérieux. Silence-radio durant quelques secondes…

Il est presque midi quand je prends la parole pour expliquer que le problème n’est pas ethnique. Je souligne que bien que certaines autorités du pays ou certains opposants laissent croire que la crise serait d’origine ethnique par leurs déclarations, et  que bien que le pouvoir soit issu d’une rébellion hutu, il y a les accords d’Arusha qui équilibrent le partage des responsabilités politiques entre les ethnies. Hutu et tutsi ont manifesté ensemble et ont aussi fui ensemble. Et pour la solution à deux Etats, où se placeraient les « Hutsi », ces innombrables Burundais issus d’unions de personnes d’ethnies différentes, ou bien les Twa? Je conclus en leur rappelant qu’il s’agit d’une crise née du non-respect de certains accords politiques, accords d’Arusha pour être précis. Et comme cette crise est politique, la solution sera sans doute politique.

Est-ce que vous avez trouvé cet article utile?

Partagez-nous votre opinion