La première affectation au bloc opératoire est souvent un grand défi pour les étudiants en médecine. Entre la peur de la vue du sang et le fait de ne pas savoir exactement son rôle, l’étudiant est confronté à un immense défi. Cet étudiant en médecine nous partage sa première expérience à l’hôpital Roi Khaled.
Pour beaucoup d’entre nous, les seules idées que nous avons des blocs opératoires, nous viennent des séries médicales américaines : Grey’s anatomie, Dr House ou encore the Resident. Le bloc opératoire, ce milieu de travail mystérieux, mythique voire même fantasmé. Il n’est pas craint uniquement par les patients. C’est la bête noire des étudiants en médecine. Pour un externe, le premier jour au bloc opératoire, c’est toute une expérience, un monde nouveau qu’il découvre. C’est un nouvel aspect de la médecine qui va au-delà de la simple théorie et bien sûr, il y a du sang et de la chair.
Reprenons dès le début : le cursus de médecine comprend 3 premières années de cours théoriques, durant lesquelles nous ne fréquentons que les amphithéâtres. A partir de la 4e année, commencent les stages d’externat. Externat oui, car nous autres externes de la 4e et de la 5e, nous quittons les services à midi, ce qui est différent de ces malheureux internes de la 6e qui ne quittent quasiment plus l’hôpital. C’est à ce moment que nous nous munissons de la non moins fantasmée blouse blanche et bien sûr du fameux stéthoscope. Durant ces stages, nous sommes affectés dans différents services pour un mois ou deux.
C’est ainsi que je me suis retrouvé dans le service de Chirurgie, et plus particulièrement, au bloc opératoire pour toute une semaine, durant ce mois de juillet 2023.
Le Jour J
La journée commence par le staff du service de chirurgie où les externes, nous assistons discrètement, depuis le fond de la salle, à la présentation des cas. Par moments, je vois des internes se faire sermonner. Au fond de moi, je remercie le bon Dieu que mon heure n’ait pas encore sonné. Après le staff, j’échange ma blouse blanche contre une tenue de bloc : une chemise courte manche, un pantalon, un masque, des crocs et pour couronner le tout un bonnet. Une immense fierté, et un léger soupçon d’orgueil s’emparent de mon être, exactement comme la première fois que j’ai mis la blouse blanche. Ensuite, je me dirige vers le bloc opératoire.
En marchant dans le long couloir du bloc opératoire, je suis habité par un sentiment d’excitation couplé à de la nervosité. Je me demande si je vais supporter la vue du sang et de la chair. « Et si tu t’évanouissais ? », se moque la petite voix dans ma tête.
Le moment de vérité
Me voilà dans la salle de la chirurgie orthopédique. Je découvre une salle assez vaste, un peu froide (enfin, quelque part ou la climatisation fonctionne dans cet hôpital). Au milieu de cette salle, il y a une table sur laquelle le patient est déjà installé et endormi. Il y a plusieurs boites métalliques contenant une multitude d’outils, de sortes de scies, de marteaux, de vis, de clous, un peu comme chez le menuisier en fait. Il y a un chirurgien et deux médecins résidents pour l’assister. Ils portent des casaques au-dessus des tenues de blocs (une sorte de tablier stérile). Il y a également une infirmière de bloc et un anesthésiste. Un des résidents me demande : « Externe ? », je réponds par un petit oui timide, craignant déjà la question qui allait suivre : « Est-ce que tu sais te laver les mains au moins ? » Toute la salle éclate de rire.
Pour information, au bloc, l’asepsie est la règle d’or et se laver les mains ou mettre des gants stériles, c’est toute une technique en soi. Je suis d’emblée surpris par cette ambiance joviale et détendue qui y règne. Des blagues, sur un fond sonore du chanteur Israël Mbonyi, mais le tout cela avec une rigueur, une minutie et une concentration maximale (après tout, la vie du patient est en jeu).
C’est alors que l’intervention (la mise en place d’une prothèse de hanche) commença. Du sang, de la chair en lambeaux, et même des éclats d’os volèrent dans la salle. Au début, je sentis un léger malaise et des vertiges, craignant même de m’écrouler. Mais j’ai tenu bon jusqu’à la fin.
Au sortir du bloc, je suis exténué par ces 3 heures passées debout (et encore, je ne faisais qu’observer, je n’ose pas imaginer l’état des chirurgiens). Je suis par-dessus tout soulagé, car je viens de passer le test, sans m’évanouir et prêt à y retourner le jour suivant. Je suis plus que jamais fasciné par ces chirurgiens qui passent des dizaines d’heures par jour debout à réparer et à sauver des vies.